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Vivons Pour Le Bonheur

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Par   •  28 Juillet 2014  •  6 021 Mots (25 Pages)  •  899 Vues

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Pour les matérialistes du XVIII ème siècle, comme le baron d’Holbach, le bonheur est avant tout un plaisir dont nous souhaitons la durée. Le bonheur se mesure à deux caractères : la longueur et l’intensité. Un bonheur très bref est appelé plaisir. Entre plaisir et bonheur il n’y a qu’une différence de durée, pas de nature. Le bonheur et le plaisir ne sont qu'une seule et même chose. Notre corps ne supporte qu’une intensité limitée de plaisir, au delà d’un certain seuil, il y a la douleur. Il doit y avoir une méthode pour user des plaisirs. Il devrait donc y avoir un art de vivre dans l’usage du plaisir qui devrait nous donner le maximum de bonheur.

Pourtant le bonheur est-il une somme de plaisirs ? Est-il exact que le bonheur et le plaisir soit une seule et même chose ? Peut-on les situer sur le même plan? Le plaisir est certainement une motivation que l'on peut poursuivre, mais y a-t-il des recettes pour être heureux ? Les gens qui « ont tout pour être heureux » ne le sont pas forcément et ce n’est pas obligatoirement une maladresse de leur part. Le bonheur est-il de l'ordre d'une pratique? Le bonheur est-il un simple hasard ? Le bonheur est-il une sorte de grâce païenne qui survient d’elle-même, sans qu’on y prenne garde et qui défie toutes les prétentions d’une méthode ? Le bonheur peut-il être le résultat d’une pratique ou d’un art de vivre ?

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A. Bonheur de libertin et hédonisme postmoderne

1) Disons tout de suite oui ! Partons du principe que plaisir et bonheur sont identiques pour examiner ce qui s’ensuit. Cela ne nous éloigne pas du sens commun. Partons de l’hypothèse que le bonheur est seulement une somme de plaisirs. Ce type d'hypothèse nous conduit droit au fil conducteur du libertinage. Si le bonheur consiste dans le plaisir, pour trouver le bonheur il faut savoir trouver le plaisir, le saisir avec adresse et le conserver. Stendhal nous dit que le plaisir le meilleur est court et vif. Une débauche sans règle engendre très vite le dégoût et l’ennui. L’homme qui veut être "heureux" de cette manière, doit donc savoir user des plaisirs avec habileté, art et modération, savoir par exemple repousser à temps un plaisir qui risque de virer à la peine. Il faut savoir capturer le plaisir du moment et le porter à la plus haute intensité. Le donjuanisme est cet art du libertin qui consiste à jouer le jeu du plaisir, tant qu’il y a plaisir, puis à l’abandonner dès qu’il y a ennui ou lassitude. Jouer le jeu de la séduction tant qu’il y a du plaisir, conquérir la proie du désir et passer à une autre, dès que l’ennui survient. C’est jouer le jeu de l’hédonisme, d’un égocentrisme du plaisir conséquent, qui vise à la recherche de sa propre satisfaction. Don Juan joue le jeu de la séduction, tant que le plaisir émoustille il est vif, s’il faibli, aussitôt Don Juan se tourne vers une nouvelle conquête. La séduction, c’est une façon de chasser le plaisir le plus vif. Vivre en séducteur, c’est renouveler constamment le plaisir en vivant la vie comme un jeu et en ne lui accordant évidemment pas de sérieux. Le sérieux, ce serait l’ennui, ce serait se gâcher le plaisir. L’important, c’est d’être joueur, d’avoir la promptitude nécessaire pour passer d’un plaisir à l’autre, pour en conserver toute la vivacité. On ne va tout de même pas éteindre cette vivacité par le sérieux. Le sérieux, c’est l’ennui tandis que l’homme du plaisir lui sait s’amuser. Sa « morale », c’est ce qu’il nomme profiter de la vie... tant que l’on est encore vivant.

Il s’agit par exemple chez Stendhal pour Lucien Lewen de détailler son bonheur, ce qui veut dire en jouir par le détail. Profiter de la vie avec insolence et légèreté, jouir de l’instant vif le plus possible. Curieusement, cette méthode implique qu’il ne faut pas pour autant se jeter tête baissée dans toutes les sensations. L’homme qui se contente de se livrer à la première sensation venue est un lourdaud, pas un artiste du plaisir, il est inculte. Il ne fait que subir, mais en cela il n’éprouve rien de vif, il perd la tête et c’est tout. Selon Stendhal, à la différence, le liibertin véritable est davantage perception, que sensation. L’homme brut, l’homme sensuel sans culture du bonheur, tombe dans la sensation sans la saisir. Jouir c’est percevoir la sensation elle-même, s’en emparer volontairement. Il faut sentir et percevoir ensuite pour jouir dans le détail, se reprendre volontairement dans la perception pour profiter de la sensation. Dans un premier temps on subit, on est troublé, puis dans un second temps on trouve ce qu’il faut faire. La méthode demande que l’on trouve un équilibre parfait entre la vivacité troublante de la sensation et la rigueur un peu sèche de la volonté. Mais il ne s'agit surtout pas de se laisser aller. D’où quelques réussites : en février 1805 : « la plus belle journée de ma vie... Jamais je ne déploierait plus de talent. La perception n’était que juste ce qu’il fallait pour guider la sensation ». Tout ne monde n’a pas ce talent. Stendhal trouve par exemple que les italiens par tempérament trop impétueux, ils se jettent dans la sensation sans la percevoir.

Le moi doit échapper à l’esclavage de la simple sensation et s’identifier à la volonté. L’important c’est d’être à tout moment un conquérant, un homme d’action, un séducteur en quête d’une proie. Moi joueur, moi prenant un personnage, moi séducteur, moi libertin. L’important c’est d’agir : « nulle jouissance sans action ». Le plaisir vital que revendique le libertin consiste en action et non en passivité. Un tempérament passif s’englue dans la sensation. C’est la tension volontaire qui fait que l’on renouvelle le plaisir. Don Juan convole vers de nouvelles conquêtes, Lucien se jette dans l’action. S'il n'y avait pas d'action, il n'y aurait pas de divertissement, alors apparaîtrait le sentiment horrible de l’ennui : maladie de l’âme, premier symptôme du malheur dit Stendahl. L’ennui en effet repose sur l’absence de sensation vive. Quand non ne sent plus rien on s’ennuie. Si le libertinage consiste justement à profiter du plaisir et que le libertin se retrouve dans une période désertique, il endure un enfer. Il lui faudra immédiatement une sensation pour s’occuper. N’importe quoi pour se distraire, pour éprouver quelque chose, pour dégeler la torpeur de l’ennui par de la gaieté : faire la tournée des bars ou des boîtes de nuit, des casinos ou des maisons de jeux, là

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