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Le Temps vécu - Sujet Et Corrigé D'une Dissertation " Hâtons-nous Le Temps Fuit " Boileau

Note de Recherches : Le Temps vécu - Sujet Et Corrigé D'une Dissertation " Hâtons-nous Le Temps Fuit " Boileau. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  12 Décembre 2013  •  2 239 Mots (9 Pages)  •  1 484 Vues

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Il n’est pas rare que nous nous lamentions parce que nous n’avons pas eu assez de temps, voire que nous avons manqué une occasion. On peut alors comprendre cette prescription de Nicolas Boileau dans ses Épîtres (1673)

« Hâtons-nous ; le temps fuit, et nous entraîne avec soi :

Le moment où je parle est déjà loin de moi. »

L’écrivain prescrit aux hommes, y compris à lui-même, de se dépêcher, sans indiquer pour quoi ou en quoi. C’est que la hâte ici n’a d’autre but que de compenser la fuite du temps comme il l’explique. Mais cette fuite du temps ne serait rien si elle ne conduisait aussi à emmener avec elle l’individu lui-même dans son être. Et pour l’illustrer, il écrit paradoxalement que le temps où il parle est parti au moment même où il est censé l’énoncé.

Or, il y a dans une telle prescription, comme la manifestation d’une impossibilité. Car si le temps fuit ou plutôt nous fuit, comment pourrions-nous jamais le rattraper si la prescription elle-même implique sa disparition ? Nous la pensons que déjà elle n’est plus.

Ou alors, il est possible d’être toujours à temps et dès lors ce ne serait pas le temps qui nous fuit. C’est nous qui en userions mal avec lui de telle sorte qu’il nous donnerait l’impression de fuir.

On peut donc se demander si la prescription de Boileau qui nous invite à ne pas perdre notre temps et à nous perdre ainsi à un sens et lequel.

Pour cela, nous verrons en nous appuyant notamment sur le chapitre II de l’Essai sur les données immédiates de la conscience de Bergson intitulé « De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée », sur la nouvelle de Nerval, Sylvie, de son ouvrage Les filles du feu et sur le roman de Virginia Woolf, Mrs Dalloway en quoi on peut dire que le temps fuit et nous avec ; puis en quoi cette fuite du temps repose sur un temps purement objectif si le temps vécu est à nous et comment ; et enfin en quoi cette fuite du temps n’est rien d’autre que notre propre fuite vis-à-vis de la vie dont le temps est toujours suffisant.

La prescription de Boileau repose sur l’idée de la fuite du temps, c’est-à-dire sur le fait que le temps s’écoule indépendamment de nous mais que, comme il est la substance de notre être, celui-ci disparaît aussi. Le changement est dans la vie la marque de cette fuite. Ainsi, la vieille tante pousse un cri lorsqu’elle voit redescendre de sa chambre, Sylvie et le Parisien avec ses habits de noces et ceux de son défunt époux. Le narrateur commente « C’était l’image de sa jeunesse. » (VI. Othys). Lorsque Mrs Dalloway reçoit, son amie d’enfance, Sally Seton, devenue lady Rosseter, elle apparaît transformée. La jeune fille élancée est remplacée par une mère de famille de cinq enfants. La jeune fille espiègle et rebelle est devenue une brave femme d’industriel (cf. Mrs Dalloway, p.290). Disons donc que le passé apparaît irrémédiablement révolu, preuve donc de la fuite du temps. Elle apparaît également quand on compare le temps et l’espace. L’aiguille ou l’oscillation de l’horloge occupe toujours la même position pendant que les instants se succèdent les uns les autres. Et si l’on s’en tient à cette succession, alors ils disparaissent les uns après les autres. C’est cette expérience qui permet à Bergson de dire que le mouvement de l’horloge n’est pas le temps (Essai, p.80-81). Mais cette fuite du temps n’empêche-t-elle pas de pouvoir se hâter puisqu’il est en quelque sorte toujours trop tard ?

Si le temps fuit, c’est-à-dire passe, c’est pour qui justement agit comme s’il avait l’éternité devant lui. Il faut alors rappeler avec Bergson que le temps homogène et disponible n’est qu’un « concept bâtard » (Essai, p.73) qui est l’introduction de l’espace dans la durée vécue. Si donc on revient à soi, alors les différents moments forment une indissoluble qualité, une multiplicité qualitative ou la succession des moments permet une unité comme mélodique de notre vie (sur les notes de la mélodie, Essai, p.75). On peut alors par le souvenir, fut-il involontaire comme dans Sylvie (I. Nuit perdue) puisqu’il apparaît à la lecture des journaux, retrouver son passé et finalement vivre aussi dans sa fidélité. Le narrateur décide alors sur la base des souvenirs qui lui sont revenus, de retourner voir Sylvie. Tout se passe comme s’il voulait rattraper le temps perdu. Le souvenir peut être déclenché par un sentiment toujours vivace de soi comme dans Mrs Dalloway. On peut alors retrouver ce qui dans le temps consonne avec notre vie actuelle de telle sorte d’avoir en quelque sorte le temps à disposition. En effet, Clarissa, tout en allant préparer sa réception, est immédiatement dans le souvenir. Que l’heure retentisse, « irrévocable ». Qu’elle l’éprouve avec cette image récurrente « Les cercles de plomb se dissolvaient dans l’air. » (p.63 ; cf. p.122, 185, 310), ne l’empêche pas d’avoir une adéquation entre ce dont elle se souvient et ce qu’elle fait.

Néanmoins, cela n’implique-t-il pas justement que le temps n’est rien d’autre que ce que nous faisons de lui ou plutôt avec lui ? N’est-ce pas alors que le thème de la fuite du temps et l’injonction de se dépêcher d’agir sont une sorte de confusion sur la nature même du temps ?

En effet, que signifie finalement la fuite du temps sinon qu’il s’écoule hors de notre prise. Or, ce temps qui s’écoule ainsi, c’est le temps objectif, celui de la physique, c’est éventuellement le temps social ou historique, dont nous ne disposons pas, mais ce n’est pas le nôtre : le temps vécu. Le temps objectif ne dépend pas de nous puisqu’il nous sert à mesurer les événements afin qu’ils soient socialement disponibles. On peut souscrire à cette analyse de Bergson qui parcourt tout le chapitre 2 de l’Essai (cf. p.96-96, 102-103). Ainsi, le Parisien dans Sylvie, lorsqu’il veut savoir l’heure, ne peut user de l’horloge vieille de deux siècles que le narrateur nous décrit complaisamment, qui ne marque pas les heures parce que son mécanisme n’a pas été remonté. Il lui faut aller la demander à un concierge (Sylvie, III Résolution). En tenant compte de ce temps, il est tout à fait possible de calculer et d’arriver à synchroniser en quelque sorte ce que nous désirons et les événements. Ainsi pour le narrateur de Sylvie qui relate comment il a pu ainsi non seulement avoir la résolution de revoir Sylvie, mais également la réalisation. Ce temps objectif parce qu’il repose sur une

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