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Le Devoir

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Par   •  4 Juin 2014  •  2 952 Mots (12 Pages)  •  2 852 Vues

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Le devoir

On parle sans cesse de droits : j’ai le droit d’être respecté, droit de vivre ma vie comme je l’entends, droit de voter, droit au logement, droit de choisir ma sexualité, droit à la dignité… Mais pour qu’il y ait des droits, il faut des devoirs : l’un ne va pas sans l’autre.  Les droits des uns ne sont respectés que si les autres accomplissent leur devoir. De plus, LES DROITS SONT L’AFFAIRE DE CEUX QUI M’ENTOURENT, LE DEVOIR EST MON AFFAIRE PERSONNELLE. Se questionner sur le devoir, c’est se questionner sur la VIE BONNE, que je peux seul mener.

Avoir des devoirs suppose d’être un SUJET LIBRE ET MORAL (sujet = source de ses actions/libre = capable de choisir parmi ses actions/moral = avec une conscience du bien et du mal). Les objets ou les êtres totalement déterminés n’ont pas de devoir.

Qu’est-ce que le devoir ? Première définition : Une voix en nous qui donne des ordres. Quand nous nous demandons comment agir : une voix dit « c’est ton devoir ». Quand nous agissons mal : « tu as manqué à ton devoir ». En termes techniques :

Le devoir manifeste la transcendance d’une exigence : je suis dépassé par une norme plus haute que moi qui s’impose à moi. Le devoir vient de plus haut que moi (même si ça peut être à l’intérieur de moi-même : une partie haute commande à une partie basse)

Question : d’où vient le devoir ? D’où vient cette exigence ? D’où vient qu’en moi il y ait des normes morales ?

I Quelle est la source du devoir ?

A La conscience morale

Première réponse : on n’a pas besoin de chercher très loin la source du devoir, elle est en nous, elle se nomme « conscience », et c’est un sentiment inné qui nous dit très clairement ce qui est bien et ce qui est mal.

Kant : « Il n'est besoin ni de science ni de philosophie pour savoir ce que l'on a à faire, pour être honnête et bon, même sage et vertueux ». En effet, ce ne sont pas forcément les philosophes qui sont les plus vertueux, au contraire certains manient les mots et les idées pour justifier rationnellement leur perversité. A la source du devoir : pas nécessairement de longs raisonnements.

Rousseau : « Je n'ai qu'à me consulter sur ce que je veux faire : tout ce que je sens être bien est bien ; tout ce que je sens être mal est mal. » Le mot important ici, c’est sentir. Cela veut dire que la source de la morale, c’est un sentiment du bien. En effet, on a souvent un sentiment très clair du fait qu’on est en train de faire quelque chose de mal : je mens, je sais très bien que ce n’est pas bien, que la règle est de ne pas mentir… En mentant, j’ai conscience de faire une exception à la règle, signe que je sais différencier ce qui est bien de ce qui est mal.

PB : on peut redoubler la question : cette conscience morale, d’où vient-elle ? Est-il si certain qu’elle soit naturellement en nous depuis toujours ? Beaucoup ont attaqué cette idée d’une conscience morale innée, avec virulence : Montaigne, Nietzsche, Freud, Durkheim...

B L’intériorisation de normes sociales

Durkheim, L’éducation morale : « Toutes les fois où nous délibérons pour savoir comment nous devons agir, il y a une voix qui parle en nous et qui nous dit : voilà ton devoir. […] Et quand nous avons manqué à ce devoir qui nous a été ainsi présenté, la même voix se fait entendre, et proteste contre notre acte. Parce qu'elle nous parle sur le ton du commandement, nous sentons bien qu'elle doit émaner de quelque être supérieur à nous ; mais cet être, nous ne voyons pas clairement qui il est ni ce qu'il est. […]Quand notre conscience parle, c'est la société qui parle en nous.  »

Explication : Devoir : présence d’une transcendance, il y a moi, et il y a une norme qui me dépasse et qui s’impose à moi. D’où vient-elle ? Choix des termes de Durkheim : un « être supérieur » : fait penser à Dieu, ou à la conscience morale perçue comme une étincelle divine en nous. Mais justement Durkheim choisit ces termes pour dire quelque chose de très différent : ce qui est plus grand que nous et pourtant qui parle de l’intérieur de nous, c’est la SOCIETE.

Pourquoi la société serait-elle en nous ? Parce qu’elle nous précède, on naît quand elle est déjà là et nous nous formons tout entier en elle, à travers l’éducation en particulier.

Imaginons : je suis un enfant, je peux faire ce que je veux, aller de plaisir en plaisir, manger des bonbons par centaines, jouer sans ranger… Mais voilà que tombe un INTERDIT : tu ne dois pas faire cela. Il vient d’une personne : un parent, un professeur… Pourquoi obéissons-nous ? Parce que derrière ce parent, ce professeur, nous sentons qu’il y a plus qu’un parent, plus qu’un professeur : il y a un ordre qui se nomme la SOCIETE. Peu à peu j’intériorise cet ordre, il devient ma seconde nature, dès que je m’en écarte, je souffre de culpabilité. C’est cela qui nous transcende et on est bien obligé d’obéir.

PB : Faut-il réduire le devoir à une intériorisation de normes sociales ? Si oui : alors le Bien et le Mal ne sont pas des absolus, mais dépendent des sociétés. Ce qui est bien ici pourrait être mal là. (Absolu = qui ne dépend de rien, vrai en tout contexte/ relatif = qui dépend de). C’est en partie la position de Nietzsche qui parle de « généalogie de la morale ».

En fait, on pressent une différence de nature entre le devoir social et le devoir moral : on s’en fiche un peu si le devoir dans telle société est de manger avec des couverts et dans telle autre de partager le même plat… Par contre, si la question est de savoir si on peut ou non pratiquer la peine de mort, ou si il faut respecter la personne individuelle ou faire passer l’intérêt du groupe devant : c’est plus gênant, on aspire à une règle absolue… On trouve par ailleurs que les hommes de bien se ressemblent malgré la diversité de leurs origines sociales. Pourrait-il donc y avoir une source du devoir moral qui ne soit pas la société ?

C Le visage d’autrui

Prendre soin d’un nourrisson abandonné, le fait-on par respect de conventions sociales ? A priori non, cela semble plus universel… Le nourrisson nous oblige à prendre soin de lui, parce que sans ce soin il est voué à la mort. Autrui, dans sa faiblesse, suscite notre responsabilité. Le voyant, nu et sans défense, je ne peux le laisser seul, je ne peux pas faire autrement que d’en prendre soin (je le peux au sens de la possibilité

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