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La démonstration

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Par   •  29 Avril 2013  •  2 984 Mots (12 Pages)  •  598 Vues

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La démonstration

Les enjeux de la notion – une première définition

La présence dans le mot démonstration de l’acte de montrer évoque l’exposition au regard d’un public de la vérité d’une assertion, d’un raisonnement. L’objectif d’une telle « monstration » est de rendre indubitable la conclusion mise à l’épreuve. Donnons quelques propriétés fondamentales de la démonstration. Premièrement, la démonstration est une procédure, c’est-à-dire une série d’actes conduisant à une conclusion, et cela en suivant un ensemble de règles. Deuxièmement, la démonstration est de nature discursive, c’est-à-dire qu’elle s’exprime dans des discours, des énoncés, ou plus généralement qu’elle est extériorisée (sur un support d’écriture par exemple). Troisièmement, elle engage un raisonnement tant de la part de celui qui fournit la démonstration que de celui qui la reconnaît comme valide ; ce n’est qu’en vertu d’un tel raisonnement que la démonstration peut prétendre « montrer » la vérité. Il s’agira pour nous dans ce cours d’étudier tout d’abord les formulations « canoniques » du concept de démonstration, chez Aristote et Averroès, avant d’en préciser la nature en saisissant la démonstration dans son environnement « naturel », à savoir les mathématiques. Nous nous attacherons ensuite à une notion connexe, celle de preuve, qu’il ne faut pas confondre avec la démonstration, puis au rôle dans la démonstration de cette donnée subjective qu’est l’évidence. Nous serons alors conduits à traiter du rôle capital dévolu à la démonstration dans la logique et les sciences déductives au 20ème siècle. Pour conclure, nous nous intéresserons à ce que l’on peut appeler les limites de la démonstration en exposant notamment la conception de cette dernière comme pratique (comme un « faire » plus qu’un « connaître ») ou encore en posant la question de l’existence des objets mathématiques.

Les origines de la démonstration

« Le syllogisme est un discours dans lequel, certaines choses étant posées, quelque chose d’autre que ces données en résulte nécessairement par le seul fait de ces données. Par le seul fait de ces données : je veux dire que c’est par elles que la conséquence est obtenue ; à son tour, l’expression c’est par elles que la conséquence est obtenue signifie qu’aucun terme étranger n’est en plus requis pour produire la conséquence nécessaire. » Aristote, Organon (Premiers Analytiques).

Aristote est le premier à analyser et définir le concept de démonstration (apodeixis). La démonstration est pour lui un type spécifique de syllogisme, notion que nous devons expliciter dans un premier temps. Un syllogisme est un raisonnement déductif, produisant une connaissance, et qui, à partir de deux prémisses permet de tirer une conclusion. L’exemple le plus célèbre est sans doute le suivant : à partir des deux propositions « Tous les hommes sont mortels » et « Socrate est un homme », on peut déduite que « Socrate est mortel ». La science du syllogisme est une science des formes du raisonnement, des différents enchaînements et combinaisons de proposition (universelles : « tous les… », existentielles : « il existe un… ») à partir de laquelle on peut juger de la validité des raisonnements indépendamment de ce à quoi renvoient les termes (« les hommes », « Socrate ») dans la réalité. Aristote présente donc la démonstration comme un type particulier de syllogisme, ayant pour prémisses des principes premiers évidents et indémontrables. Le syllogisme démonstratif se distingue, dit Aristote, des syllogismes dialectique et rhétorique et se présente comme l’outil premier de la science.

Au Moyen-Âge, Averroès va développer la conception aristotélicienne de la démonstration. Averroès identifie le raisonnement à la démonstration. Si la grande partie des hommes procède à l’aide de la rhétorique ou de la dialectique, le scientifique (le philosophe) est celui qui pense par démonstration. Cette dernière a, en outre, plus de valeur que l’analogie (notion cardinale au Moyen-Âge) qui pose qu’il est possible de connaître une chose encore inconnue si elle présente des affinités avec une chose connue. Or, affirme Averroès, Dieu ne peut être connu par analogie car cela signifierait qu’il présente des affinités de nature avec l’homme. Ajoutons qu’Averroès établit, à partir des écrits d’Aristote, une distinction qui deviendra fondamentale entre la démonstration quia, démonstration factuelle ou existentielle, et la démonstration propter quid, démonstration essentielle, au sens où elle donne le « pourquoi » d’une chose. La première de ces démonstrations procède des effets aux causes, la seconde des causes aux effets.

Mathématiques et philosophie

C’est dans les mathématiques que la démonstration a acquis ses lettres de noblesse. N’évoquons ici que la figure d’Euclide et ses Éléments de Géométrie, divisés en quinze livre, et qui constitue l’acte de naissance de cette science qu’est la géométrie, l’objet de celle-ci étant les figures ou plus exactement les relations entre points, droites, plans et espaces. La méthode euclidienne est axiomatique, c’est-à-dire qu’elle fonde la démonstration sur des définitions, des axiomes ou postulats, et enfin des notions communes. Définitions, axiomes et postulats sont relatifs aux entités primitives (ex : « tous les angles droits sont égaux entre eux ») tandis que les notions communes sont des énoncés universels, évidents (« les choses qui sont égales à une même chose sont égales entre elles »). Ces propositions « de base » ne font pas l’objet d’une démonstration. Elles sont ce à partir de quoi seront tirées, par déduction, toutes les vérités géométriques, les théorèmes. La démonstration est une chaîne déductive qui, à partir des définitions, axiomes, etc. et des théorèmes précédemment démontrés, déduit de nouveaux théorèmes.

Le système euclidien, et plus généralement la méthode des mathématiques ont longtemps symbolisé l’idéal de la connaissance ; on y voyait alors la réalisation de la science au sens qu’Aristote

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