Lever De Soleil
Mémoires Gratuits : Lever De Soleil. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dissertation • 6 Avril 2014 • 8 880 Mots (36 Pages) • 881 Vues
LEVER DE SOLEIL
SUR L’APPROCHE DE JOHN LYONS EN EQUITATION
« L’Art doit toujours suivre la nature et jamais ne s’y opposer »
Newcastle
« L’Art est beau, quand la tête, le coeur et la main travaillent ensemble. »
J. Ruskin
« Il n’y a pas de bonne main. Il n’y a pas de mauvaise main.
Il y a la main qui sait, il y a la main qui ne sait pas. »
Beudant
« C’est le temps que tu as perdu pour ta rose qui fait ta rose si importante. »
Antoine de Saint Exupéry
Je vous livre ici mon voyage aux sources de la tradition française à partir de l’équitation amicale pour les chevaux de John Lyons. Mon désir est de contribuer ainsi par cette conversation sur les méthodes non seulement « à retrouver le bien commun des équitations qui veulent le bien-être du cheval » (René Bacharach), mais aussi d’ouvrir à l’écoute déférente et joyeuse du cheval.
« C’est une joie indéfinissable et si agréable qu’on s’en passionne et qu’elle chasse loin derrière elle toutes les sensations enivrantes de l’équitation. Promenades dans les plus jolis sites à l’air si pur de l’aurore, vitesse, sauts, chasse à courre, succès en public, etc., tout cela amène peut-être plus d’excitation, d’enthousiasme, mais rien n’égale le charme réel, complet, pur de tout sentiment étranger à l’équitation, que la légèreté procure. C’est le charme suprême auquel rien ne saurait être comparé. […] Le cheval agit seul, tout se fait sans effort, sans heurt, et le cavalier ressent l’impression de bien-être, de contentement que seul procure le travail exécuté avec légèreté, avec descente de main et de jambes » Beudant.
Oui, absence de représentation, ou monter mon cheval sans main ni jambes, monter pour nous deux, lui et moi comme si nous étions seuls et pas pour les autres. Beauté de l’écoute, ou remercier mon cheval au moment où nait l’intention du mouvement. Et mon cheval danse. Nous dansons ensemble.
Quand John Lyons tient la main de Baucher
L’équitation naturelle est européenne, « inscrite en nous, français depuis longtemps, depuis la Renaissance », affirme Patrice Franchet d’Espèrey. Le mot est écrit : une équitation toute naturelle. D’ailleurs, l’expression anglaise « Natural Horsemanship »,
tant célèbre aujourd’hui, traduction de l’expression française « équitation naturelle », se trouve utilisée par Seunig dans son ouvrage de 1941 Von Der Koppel bis zur Kapriole :
« Gymnastic training, or dressage in the narrow sense, is natural horsemanship, because the means employed to exercise the horse are adapted to its build and to the mechanism of its natural gait »1.
Au sein du manège de la Renaissance et des diverses académies équestres, un dialogue socratique se déroule avec le cheval où le calme, la douceur et la récompense remplacent la parole. Il ne s’agit que de se faire comprendre.
« Par le dialogue que le cavalier et cheval entretiennent, le dressage est donc, pour l’homme aussi, un travail de recherche du Vrai, du Beau et du Juste ». Patrice Franchet d’Espèrey.
La douceur met à contribution l’intelligence du cheval et celle du cavalier, inséparablement. On ne dialogue pas, en effet, avec une machine-animale, à une « machine sans âme » (Beudant). Bien au contraire, le dialogue « socratique » avec le cheval exige deux intelligences qui s’écoutent : celle du cavalier et celle du cheval, tel « que bientôt ces deux intelligences n’en forment plus qu’une » (Baucher) pour le bonheur du cavalier et le bien-être du cheval.
Certes le cheval n’a pas la parole2. Mais, le « mettre à la raison », c’est, au fond, se proposer le projet de lui donner la parole. Alors, comment exercer la cervelle du cheval plutôt que son corps pour la faire progresser ? Comment faire advenir un Cheval (d’homme) anthropomorphe pour être soi-même, cavalier, pleinement Homme (de cheval) ?
Il faut mettre à contribution la main du cavalier, qui est reliée à la bouche du cheval. Ainsi, la main intelligente du cavalier est ce merveilleux substitut de la parole qui permet de « cérébraliser » le cheval, humanise le cavalier, et donne accès au dialogue socratique entre le cheval et son cavalier.
« La main serait donc le creuset de cette docilité paisible, la coupe où l’on déguste une aussi succulente joie ? Tout le mystère de l’équitation serait dans la main ? » (Luc de Goustine dans Cheval Cavalier ou les aquarelles du colonel Margot, 1996).
La main est l’outil par excellence de la « mise à la raison » du cheval. Par la main, le cheval est éduqué intelligemment, avec douceur. Autrement dit, le cavalier intelligent et le cheval mis à la raison communiquent ensemble par l’intermédiaire de la main, et donc du mors et des rênes.
Certes, l’on peut prétendre qu’il n’y a rien de virtuel dans la bouche du cheval. Puisqu’elle n’est qu’un organe utile à la nutrition. Point de Rassembler en elle. Pas plus
1 Horsemanship par Wlademar Seunig 1956 (English traduction).
2 Mais, Baucher, par l’intermédiaire du dieu des quadrupèdes, le grand Hippo-Théo, met en dialogue un cavalier et un cheval.
qu’il n’y a la figure d’Hercule dans un bloc de marbre blanc indifférent à le recevoir. Pourtant, tout autre est ce marbre s’il y avait des veines « qui marquassent la figure d’Hercule préférablement à d’autres figures, cette pierre y serait plus déterminée, et Hercule y serait comme inné en quelque façon, quoiqu’il faudrait du travail pour découvrir ces veines, et pour les nettoyer par la polissure, en retranchant ce qui les empêche de paraître » (Leibniz Essai sur l'entendement humain). De même, tout autre est cette bouche par ce « travail » de la main savante qui retranche ce qui empêche le Rassembler de paraître. Le Rassembler serait ainsi, par analogie, inné au cheval, comme disposition, virtualité naturelle. Mais par un certain travail de la main.
La main ! Et donc le mors et les rênes! Mais quel est donc ce travail particulier de la main ? Quelles sont ces « veines » qui peuvent, une fois la bouche nettoyée, marquer la figure du cheval rassemblé ?
La main qui sait faire paraitre le Rassembler, c’est la main qui sait converser avec la bouche du cheval et qui invite peu à
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