Leibniz, sur les sens

"Les sens, quoique nécessaires pour toutes nos connaissances actuelles, ne sont point suffisants pour nous les donner toutes, puisque les sens ne donnent jamais que des exemples, c'est-à-dire des vérités particulières ou individuelles. Or tous les exemples qui confirment une vérité générale, de quelque nombre qu'ils soient, ne suffisent pas pour établir la nécessité universelle de cette même vérité, car il ne suit point que ce qui est arrivé arrivera de même (...) D'où il paraît que les vérités nécessaires, telles qu'on les trouve dans les mathématiques pures et particulièrement dans l'arithmétique et dans la géométrie, doivent avoir des principes dont la preuve ne dépende point des exemples, ni par conséquence des témoignages des sens, quoique sans les sens on ne serait jamais avisé d'y penser."

Leibniz

Résumé:

Selon la théorie des empiristes, l'expérience seule permet de connaître la vérité. Au contraire, les rationalistes privilégient la raison dans la connaissance de la vérité. Selon eux, les hommes sont supérieurs aux animaux précisément parce que ceux-ci sont empiristes alors que l'homme est capable de raisonner et de combler les lacunes de l'expérience. Dans cet extrait des Nouveaux essais sur l'entendement humain, Leibniz montre que la vérité ne peut pas avoir son fondement que dans l'expérience, mais qu'elle dépend davantage de la raison.

Extrait du document:

La thèse de Leibniz est donc que la vérité dépend de la raison, l'expérience ne servant que de moteur, d'impulsion première à sa connaissance.

En effet, si nous nous contentons des sens pour connaître la vérité, nous ne connaîtrons que des « vérités particulières ou individuelles ». Par exemple, si nous ne connaissons qu'un chien et que celui-ci est agressif, nous ne pouvons pas conclure que tous les chiens sont agressifs : l'agressivité est une caractéristique particulière à ce chien. Ainsi Leibniz conclue que nous ne pouvons pas connaître la vérité uniquement grâce aux sens et aux expériences vécues. La vérité, dont les sens donnent une ébauche, a donc pour principe la raison.

Pour le prouver, Leibniz utilise un raisonnement par l'exemple. Ces illustrations sont développées dans la mineure, lorsque l'auteur prouve que les faits constatés ne peuvent établir à eux seuls une vérité. Ainsi, même si les Grecs et les Romains vivaient l'alternance du jour et de la nuit, il n'en était pas de même au nord de la Russie : l'expérience des Grecs et des Romains ne peut pas servir à établir une vérité universelle. Leibniz peut ainsi élargir sa pensée aux mathématiques et prendre Euclide comme référence : tout comme lui, le mathématicien raisonnait à partir des données de son expérience sensible.

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