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La destination créatrice de l'homme

Analyse sectorielle : La destination créatrice de l'homme. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  18 Décembre 2014  •  Analyse sectorielle  •  597 Mots (3 Pages)  •  672 Vues

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La Laurent Gagnebin, Nicolas berdiaeff, ou la destination créatrice de l'homme, Lausanne, L'âge d'homme, 1994

A l'heure où nous abandonnons les Russes au péril de leurs fantasmes, cette relecture superbe de Berdiaeff s'impose. Non que l'on se sente d'emblée sur la même longueur d'onde que cette oeuvre, dont la publication commence un peu avant la première guerre mondiale et s'achève un peu après le seconde. Elle est de part en part traversée par un sentiment apocalyptique, par une métaphysique eschatologique, par l'onde de choc encore à venir d'un irréparable désastre ; et traversée du même mouvement par un élan ensemble existentiel, religieux, social, et cosmique vers la beauté, qui serait la seule justification de notre destinée, sauverait le monde de la laideur de l'histoire, et restituerait la correspondance entre la création humaine et la rédemption divine. Cette esthétisation du politique, notamment, cette dénonciation de la laideur démocratique, ou cette charge contre la civilisation technique qui nivelle l'humanité, sont des visages de cette oeuvre qui la font contemporaine du fascisme et de ceux qui lui ont résisté. La gêne peut alors nous envahir, comme à entrer dans une mémoire qui nous touche douloureusement, et que nous ne comprenons plus. Le Nouveau Moyen-Age dont il parle et qui l'a rendu célèbre est comme la remémoration d'un autre futur possible.

C'est précisément ici que je vois l'utilité de cet ouvrage. Il nous remet sur cette longueur d'onde perdue, l'intention qui anime la révolte de 1917, et la révolte contre l'illusion révolutionnaire elle-même. Car Berdiaeff, dressé dans le refus des orthodoxies totalitaires comme du conformisme démocratique, propose une apologie de l'esprit, qui est liberté insurgée contre toute nécessité. Pour lui, les évolutions comme les révolutions échappent à leurs initiateurs, et celles qui ont réussi sont celles qui "échouent" finalement le plus. Ce n'est pas un hasard si le réquisitoire contre la révolution russe de celui qui, banni en 1922, aussi mal à l'aise avec des émigrés amers qu'avec une révolution par lui considérée comme rien d'autre que la sanction quasi mécanique des injustices passées, est publié dans le premier numéro d'Esprit, en 1932, sous le titre "Vérité et mensonge du communisme". Comme Mounier, entre individualisme et collectivisme, il cherche un personnalisme social, avec peut-être une insistance particulière sur la dimension cosmique de la personne. Il n'est pas impossible d'en entendre l'écho dans un texte de Ricœur comme "l'image de Dieu et l'épopée humaine". Bref c'est une oeuvre particulièrement "placée" dans la mémoire intellectuelle du 20ème siècle.

On y trouve des notations qui seront développées par l'Ecole de Francfort : cette idée, qu'en dépit de l'optimisme du premier et du pessimisme du second, le capitalisme ressemble au communisme en ce qu'il écrase les singularités ; qu'aucune justification ne permet de sacrifier le présent et le prochain au lointain et à l'abstrait ; que l'espérance n'est pas portée par une classe économique davantage que par un parti

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