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L'homme Est-il Libre De Penser

Note de Recherches : L'homme Est-il Libre De Penser. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  14 Mai 2013  •  1 675 Mots (7 Pages)  •  1 408 Vues

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le responsable technique, et certains comédiens, Un salon octogone, chez Plumard, mobilier élégant. — Porte au fond donnant sur le vestibule. — À gauche, premier plan, une cheminée. — À droite, premier plan, une porte donnant dans les appartements de Plumard. Dans le pan coupé de gauche, une porte donnant sur un cabinet noir. — Dans le pan coupé de droite, une porte donnant dans les appartements de Pépita. — Entre la porte du fond et le pan coupé de droite, une petite console. — À droite, premier plan, sur le devant de la scène, une table avec un tapis et ce qu’il faut pour écrire. — À droite et à gauche de la table, une chaise. — Au premier plan à gauche, sur le devant de la scène, une autre chaise. — Au fond, de chaque côté de la porte d’entrée, une chaise. — Sur la cheminée un mètre impliable en bois ; contre la cheminée, un petit cerceau à sonnettes pour enfant.

Pépita, Plumard

Plumard, écrivant à la table de droite… — … Vous le reconnaîtrez facilement à son air de profond crétinisme. Signé : un anonyme… qui ne dit pas son nom. (Parlé.) Là ! voilà qui est fait… Et maintenant à nous deux, mon bonhomme.

Pépita, lisant le journal. — Ah ! mon Dieu !

Plumard, sursautant. — Qu’est-ce qu’il y a ?

Pépita. — Elle est morte.

Plumard. — Qui ça ?

Pépita. — La victime du crime de Suresnes.

Plumard. — Oui ? Eh bien ! qu’est-ce que ça me fait à moi ?

Pépita, avec dédain. — Monsieur Plumard ! vous n’avez pas de cœur… Toutes les fois que ce n’est pas vous qui mourez, ça vous est égal.

Plumard. — Ah ! tu sais, c’est le mépris de la vie qu’avaient nos pères… le mépris de la vie des autres.

Pépita. — Tenez ! vous ! vous êtes trempé comme un Curiace.

Plumard. — Ma bonne amie, on dit "cuirasse…" Tu ne dis pas un "curiassier !" mais un "cuirassier…" il ne faut pas confondre cur et cuir…

Pépita. — Oh ! vous ne les confondez pas, vous, les cuirs… (À part.) Quel ignare ! Et dire que c’est mon mari… Ah ! pourquoi faut-il que moi, la Lamballe… une étoile d’opérette à la mode, j’aie épousé cet ancien herboriste…

Elle se plonge dans son journal.

Plumard. — C’est étonnant comme la femme est ignorante sur certaines choses.

Pépita. — … Après une nuit d’agonie… pendant laquelle le sang de la jeune femme s’était complètement tourné…

Plumard. — Quand le sang tourne on doit prendre des dépuratifs… trois sous de chicorée amère, quatre sous de cresson… Si elle avait vu un herboriste…

Pépita. — Mon ami ! on ne vous demande pas de consultation.

Plumard. — Je ne dis pas non ! mais tu sais, nous autres, dans la médecine…

Pépita. — Où ça ! La médecine ! je vous demande un peu ! un ancien herboriste ! Ce n’est pas de la médecine, c’est tout au plus du médicament.

Plumard. — Les médecines sont des médicaments, ma bonne amie.

Pépita. — Oui, c’est bon ! (Lisant.) "La malheureuse est morte… on a même profité de cela pour l’enterrer…" (Parlé.) C’est horrible !

Plumard. — Ah ! qu’est-ce que tu veux… la mort, c’est la vie !

Pépita. — Et cet assassin qu’on ne retrouve toujours pas… C’est égal, à l’heure qu’il est, on doit le tenir… Nous verrons ça dans un journal du soir… Quand Taupinier sera là, je l’enverrai…

Plumard. — Ah ! M. Taupinier va venir !

Pépita, se levant. — Ça vous fâche… Mais qu’est-ce que vous avez donc contre lui ?…

Plumard, sèchement. — Moi ! rien ! (Pépita lève les épaules et se replonge dans sa lecture. — Au public.) Il fait la cour à ma femme, voilà tout ; et ça me vexe… quand il vient, on m’envoie faire jouer Bébé… avec ce cerceau. Voilà six mois que ça dure ! heureusement je ne suis pas un de ces maris aveugles… j’ai tout compris… depuis hier soir… Ah ! c’est que l’ai lu Othello… Un drame d’un Anglais,… qui écrit même très bien le français pour un étranger… Ça m’a ouvert les yeux ! J’ai pensé tout de suite aux oreillers… mais j’ai trouvé ça un peu anglais pour moi… J’ai préféré quelque chose de plus gascon… J’ai pris une plume et j’ai écrit au commissaire de police : (Tirant sa lettre de sa poche et lisant.) "Monsieur le commissaire, soyez chez M. Plumard, 7, rue aux Anes, ce soir à cinq heures ! vous trouverez dans un salon un malfaiteur de la pire espèce ! vous le reconnaîtrez facilement à son air de profond crétinisme." — Entre nous je n’étais pas fâché de le bêcher un peu !… Il est quatre heures moins cinq et dans une heure cinq… Ah ! nous allons bien rire.

On sonne.

Scène II [modifier]

Les Mêmes, Taupinier

Taupinier. — C’est moi.

Pépita. — Ah ! vous arrivez bien ! Vous allez retourner me chercher un journal du soir et puis vous passerez à la Préfecture de Police…

Taupinier. — Encore ! Quelle existence ! C’est bon ! je m’envole et je reviens, rapide comme l’oiseau.

Fausse sortie.

Plumard, entre les dents. — Va donc pierrot !

Taupinier. — Qu’est-ce qu’il faudra faire à la préfecture ?

Pépita. — Demander si l’on n’a pas retrouvé ma petite broche… ma tête de chien en diamant… vous savez.

Plumard. — Ah ! ton petit Médor.

Taupinier. — Oui ! Auquel madame tenait tant… parce que c’était un souvenir.

Plumard, brusquement. — Un souvenir ! Ah ! de qui donc ?

Pépita, vivement. — Eh ! bien, de chose… machin… mon père… qui l’avait porté toute sa vie… vous comprenez si j’y tiens ?

Plumard. — Une relique paternelle, c’est sacré… Ainsi comme cela, votre père portait des broches en diamant ?

Pépita, balbutiant. — Oui, dans les bals officiels ! Comme il n’était pas décoré, alors pour ne pas avoir l’air d’un domestique…

Plumard. — Oui… on prenait cela pour un ordre étranger…

Taupinier. — C’est très ingénieux !… Allons ! je me sauve…

Plumard, le rattrapant par le pan de son vêtement. — Ah ! dites donc !… pas pour longtemps au moins… Oh ! mais vous avez le temps, vous savez… il est quatre heures cinq, vous avez encore quarante-cinq bonnes minutes devant vous !

Taupinier, qui ne comprend pas : — Ah ! j’ai…

Plumard. — Oui ; seulement soyez là un peu avant cinq heures, vous me ferez plaisir.

Taupinier. — Bon ! Bon ! Adieu !

Il sort.

Pépita. — Quel excellent garçon !

Plumard. — Oui, va ! mais nous allons bien rire tout à l’heure ! mon Dieu ! que nous allons rire !

Scène III [modifier]

Les Mêmes, Mariette, puis Lemercier

Mariette. — Madame, c’est un monsieur qui s’appelle M. Lemercier ! Il demande si madame est visible ?

Pépita. — Lemercier ?… Inconnu. Faites entrer et priez d’attendre ! Venez-vous, Plumard !

Plumard. — Voilà ma bonne amie ! Ils sortent.

Mariette.- Si monsieur veut prendre la peine d’entrer, madame vient dans un instant…

Lemercier, portant un panier, contenant un petit chien, sous un bras et un parapluie sous l’autre. — Vous avez annoncé M. Lemercier, n’est-ce pas ?…

Mariette. — Oui, monsieur.

Lemercier. — C’est bien.

Elle sort.

Scène IV [modifier]

Lemercier, seul

Lemercier. — M. Lemercier, c’est ça, c’est bien ça… Quand je dis "c’est bien ça", ça n’est pas ça du tout… Je m’appelle Aristide Grognard… professeur de rhétorique à Quimper. Quant à Lemercier, c’est le nom de ma belle-mère… parce que, quand je fais mes fredaines, je ne tiens pas à compromettre mon nom… alors je prend celui de ma belle-mère. Or, je les fais, de ce moment-ci, mes fredaines… Oui ! comme je suis sans ma femme à Paris, je me suis dit : je vais aller chez une actrice… j’adore les actrices, c’est mon vice ! et voilà comment je suis chez la Lamballe, la célèbre Lamballe des Folies-Erotiques, comme un boudiné… je m’emboudine en ce moment… Enfin, je lui apporte ce petit chien, à la Lamballe. C’est tout un roman !… Hier soir, j’étais aux Folies-Erotiques. Derrière moi, deux gandins ; l’un d’eux dit à l’autre : "Dis donc, tu ne sais pas, Hector, la Lamballe a perdu Médor !" Je me rappelle qu’il s’appelait Hector, parce que ça faisait deux vers.

Reprenant.

"Dis donc, tu ne sais pas, Hector,

La Lamballe a perdu Médor !"

"Allons donc ! — Oui, Médor, ce ravissant bijou, ce petit chien que lui avait donné le prince." — Alors, moi, il me vient une idée. Je me dis : "Voilà mon affaire ! Si je pouvais lui retrouver son Médor, ce serait piquant !…" Et ce matin je me mets à suivre tous les chiens… avec mon parapluie, parce que comme il faisait justement ce temps-là… un temps de chien, vous comprenez… Tout à coup je vois un roquet assez gentil qui flânait sur un amour de petit tas d’ordures. J’ai un pressentiment ! Je crie : "Médor ! Médor !" Je lui tends un morceau de sucre ; il arrive et il mange mon sucre : je savais bien que c’était lui ! Bref… (Fredonnant.) "c’est Médor que je lui ramène". On vient ! Ce doit être la Lamballe… (Il retire son paletot et le place avec le panier sur la chaise au fond.) Et maintenant à nous la galanterie française ! De la tenue et que rien ne trahisse le professeur : "Sic itur ad astra !".

Scène V [modifier]

Lemercier, Plumard

Lemercier, apercevant Plumard. — Hein ! un homme ?

Plumard, saluant. — Monsieur, heureux et fier ; j’ai bien l’honneur…

Lemercier, machinalement, tout en dévisageant Plumard. — Monsieur… croyez que la réciproque… (À part.) Ah çà ! quel est ce personnage ?

Plumard. — Prenez donc la peine de vous asseoir.

Il lui indique la chaise qui est près de la cheminée. Lemercier gagne celle qui est à gauche de la table.

- Passade.

Lemercier, s’inclinant. — J’allais vous le dire !… (Ils s’asseyent.) Pardon de mon indiscrétion, mais je serais curieux… j’aimerais… Enfin, c’est vous qui servez de mère ici ?…

Plumard. — Plaît-il ?

Lemercier. — Oui, de mère d’actrice !… C’est connu… c’est vous qui êtes l’oncle ? quoi ?… quand il n’y a pas de mère, il y a toujours un oncle… un personnage respectable… avec des décorations !… vous n’avez pas de décorations, vous ?…

Plumard. — Non, monsieur, pas jusqu’à présent ! Mais ma femme connaît un Turc qui…

Lemercier. — Oui, parfaitement… Enfin… vous êtes quelque chose dans la maison !

Plumard. — Comment quelque chose ? Mais je suis M. Plumard.

Lemercier, se levant et faisant mine de sortir. — Monsieur Plumard ! Mais je ne suis donc pas chez la Lamballe ?

Plumard, redescendant. — Si, monsieur ! la Lamballe, c’est ma femme.

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