Suis-je ce que j'ai conscience d'être ?
Dissertation : Suis-je ce que j'ai conscience d'être ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Bertrand • 14 Octobre 2021 • Dissertation • 3 936 Mots (16 Pages) • 435 Vues
Bertrand Loubatié
N° étudiant : 11905348
Examen de philosophie générale, dissertation
« Suis-je ce que j’ai conscience d’être ? »
Il arrive qu’un individu revendique une liberté totale de décider pour lui-même car, étant au plus proche de son esprit et de son corps, il aurait parfaitement conscience de qui il est pour savoir ce dont il a besoin. L’homme est, il existe dans le monde comme une entité constituée d’un corps, d’un esprit et animée par des pensées, des actions et des états. L’homme est également pourvu d’une conscience, qui est l’organisation dynamique et personnelle de sa vie psychique et qui lui du latin cum scientia lui procure une connaissance de son existence en rendant accessibles à son esprit les idées des phénomènes qui se produisent en lui et de son action dans le monde. L’homme serait ce qu’il a conscience d’être s’il disposait d’une juste connaissance de ce qui caractérise son existence, faisant que rien d’autre que ce dont il a conscience d’être ne le constituerait.
Il semble d’abord évident que la conscience que l’homme a de son existence lui révèle ce qu’il est vraiment. Tout en délivrant à l’esprit une connaissance immédiate et spontanée de quelque chose, la conscience comprend chez l’homme un degré réfléchi qui le distingue des autres êtres de la nature par le recul qu’elle lui procure sur ses sensations. La conscience que l’homme a de la réalité le rend présent à lui-même et lui permet de découvrir son existence, qu’il peut bien connaître en y rapportant tous les éléments qui y sont relatifs par sa manière de les penser à la première personne. Cette conscience étant la seule source d’information dont il dispose pour connaître ce qu’il est, l’homme pense et agit en conformité avec ce qu’elle lui rapporte et construit son identité à partir de ce qu’il croit être, ce qui exclut de sa définition les éléments qu’il ne connaît pas. La conscience serait alors le seul repère pour l’homme dans la manière de mener son existence et d’initier ses actions.
Pourtant, ce potentiel remarquable de la conscience ne parvient pas à restituer à l’homme certains éléments qui le constituent. Du point de vue physiologique, l’articulation du corps et de l’esprit est d’une telle complexité qu’il est impossible pour l’homme d’avoir conscience de chaque mouvement de ses cellules, il sait que ces mouvements sont nécessaires pour exister sans pouvoir les éprouver. L’homme peut à l’inverse être traversé par des pensées dont il fait l’expérience sans en comprendre la cause ni la signification, et qui lui font subir son existence en s’imposant à lui contre ce qu’il croit être, faisant coexister en lui deux tendances opposées et difficiles à concilier. En se limitant à constater ce que la conscience lui indique de ce qu’il est, l’homme ne s’ouvrirait plus à la compréhension totale de son existence mais en manquerait une partie en s’enfermant dans une connaissance incomplète voire fausse de ce qu’il est.
Dès lors, comment la prise de conscience par l’homme de son existence peut conduire à passer sous silence d’autres éléments qui le constituent ?
Si être pour l’homme revient toujours à se rapporter à ce dont il a conscience d’être, comment une chose qui échappe à la conscience pourrait caractériser son existence ?
Si l’homme se découvre d’abord comme ayant une certaine idée de ce qu’il est et à laquelle il se réfère, son existence est soumise à des facteurs qu’il ne connaît pas voire qu’il ne comprend pas, faisant apparaître la conscience comme une source imparfaite de connaissance qui peut être renforcée et complétée par d’autres éléments.
L’homme peut croire exister tel qu’il en a conscience puisque l’usage de cette conscience lui révèle la certitude de son existence et rassemble ce qui le caractérise pour constituer sa personne, hors de laquelle l’homme n’est rien puisqu’il pense et agit toujours à partir de ce qu’il croit être.
Tout d’abord, c’est par l’exercice de sa conscience que l’homme découvre exister avec certitude. En mettant en cause le monde qui l’entoure en se demandant s’il existe conformément à l’idée qu’il s’en fait, l’homme peut renverser sa réflexion et soumettre sa propre existence à ce questionnement. En effet, tout en éprouvant avoir un certain corps et être traversé par des idées, l’homme peut ne pas se contenter de la constatation de ces expériences pour avoir la conviction d’exister puisque ces expériences pourraient aussi être des illusions. Dans la deuxième Médiation métaphysique, après avoir découvert par le malin génie la possibilité d’un écart entre la raison humaine et le réel, Descartes étend dans un quatrième paragraphe le doute à l’existence de l’homme. En s’interrogeant sur l’existence d’un dieu trompeur, Descartes imagine que l’homme puisse lui-même produire de fausses perceptions de la réalité et renverse la question du trompeur au trompé, c’est-à-dire de l’existence de dieu à celle de l’homme. Le doute est alors poussé à son paroxysme puisqu’il pourrait mener l’homme à ne plus savoir s’il est, sans traiter cependant du corps. Descartes constate que l’individu, le « Moi » est nécessairement impliqué par le doute car tout doute portant sur une chose nécessite un sujet pour l’émettre. Lorsque l’homme se demande s’il est, seul lui demeure présent, et le doute implique alors son existence puisqu’il constitue un acte de pensée effectué par le sujet, et Descartes en conclut que la proposition « je suis, j’existe » est rendue vraie dès qu’elle est pensée ou prononcée. Ainsi, alors que le monde extérieur et autrui ont été mis en doute de sorte qu’il ne reste rien que le sujet, ce dernier parvient à découvrir la certitude qu’il existe par le seul exercice de sa conscience. La conscience que l’homme a de lui constitue donc un point de départ pour ce qu’il est puisqu’elle certifie qu’il existe bien, ouvrant alors la question de savoir ce qui le caractérise.
L’homme va trouver une réponse à cette question par sa capacité de se penser comme un sujet singulier dans la manière de vivre son existence et d’unifier les représentations de ses diverses expériences derrière ce sujet, afin de construire son identité et sa personne. La conscience immédiate délivre à l’homme une perception sensible du monde extérieur, mais la conscience réfléchie lui permet de produire un retour réflexif sur ces perceptions. Il peut les analyser et méditer sur son existence par la conscience de ses états qui l’informe sur ce qu’il est. Dans sa réflexion, l’homme accompagne ses pensées par le « Je » et s’habitue à s’exprimer par un terme qui manifeste son individualité et dont les autres corps sont absents. L’emploi de la première personne cristallise dans cette individualité les idées, les actes et les états exprimés derrière l’emploi du « Je », faisant que l’homme prend conscience puis s’approprie ce qu’il ressent, ce qu’il pense et ce qu’il fait. Dans le paragraphe 1er du livre 1er de l’Anthropologie d’un point de vue pragmatique, Emmanuel Kant illustre la conscience que l’homme prend de son existence lorsque l’enfant emploie pour la première fois le « Je ». Avant l’enfant ne pouvait décrire ses sensations, ses idées et ses actions qu’en en demeurant extérieur puisqu’elles étaient exprimées à la troisième personne. Dès qu’il emploie le « Je », l’enfant se saisit de ce qui le caractérise et parvient à le dissocier des éléments propres aux autres choses du monde, parce l’expression de ce qui le caractérise s’accompagne et se rattache à l’expression de son être. De plus, en conjuguant l’emploi du « Je » avec la mémoire, l’homme peut rapporter les expériences qu’il a éprouvées par le passé à la première personne au moment présent où il se pense aussi à la première personne. La conscience présente de ce qu’il avait conscience d’être auparavant peut l’aider à comprendre la signification de ce qu’il est aujourd’hui, pour voir dans son existence une évolution. L’emploi de la première personne accompagne alors les expériences de l’homme et en rassemble les représentations pour qu’il n’en fasse plus des expériences désunies. L’homme dispose d’une pleine conscience de ce qu’il est et de ce qu’il a été, cette conscience constitue son identité.
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