Le progès social

La technique peut être vue comme construction du monde, comme construction d’un monde spécifiquement humain. Bergson reprend cette idée du mythe de Prométhée qui fait de la technique le propre de l’humanité. Il fait de cette intelligence fabricatrice, la spécificité de l’humanité et propose de penser la technique comme une des manières possible de l’auto-déploiement de la nature rationnelle de l’humanité. L’homme est un homo faber avant d’être un homo sapiens, dans la mesure où son intelligence se trouve dans « la faculté de fabriquer des objets artificiels, en particulier des outils à faire des outils ». C’est donc cette technique qui fait son humanité puisqu’elle lui permet de s’élever et de dominer cette nature qui l’entoure.

Le progrès social est inévitablement lié au progrès technique. Dans l’évolution créatrice, Bergson ajoute que « les inventions qui jalonnent la route du progrès ont aussi tracé la direction de la vie sociale ». En effet, Les réorganisations sociales naissent en partie de l’adaptation à l’outil technologique. Il faut donc voir la technique comme la cause des modifications des relations sociales, culturelles, dûe à l’usage des technologies. Bergson pense donc la technique en tant qu’ d’ « élan vital », puisqu’elle est une des manifestations de la vie.

Selon Hannah Arendt, la technique représente la construction d’un monde pour l’homme dans la mesure où elle se caractérise par sa durabilité. Elle dispose autour de l’homme un monde stable qui deviendra le modèle de l’objectivité du monde. Elle imite ou prolonge les phénomènes naturels, comme le dit Bergson, la technique est « un prolongement de l’organisme naturel ». L’invention de ces prolongements de son corps que sont les outils techniques fait bien plus qu’assurer sa survie, elle contribue à le rendre, comme le dit Descartes, « maître et possesseur de la nature ».

Elle a permis à l'homme de maîtriser la nature, cependant l’homme subit les assauts de ce nouveau monde technique, auquel il doit s’adapter. La technique, selon Jacques Ellul, constitue un système, c'est-à-dire un ensemble d’éléments en relation les uns avec les autres de façon telle que toute évolution de l’un provoque une évolution de l’ensemble et que toute modification de l’ensemble se répercute sur chaque élément. Le premier caractère du système technicien est l'autonomie. En conséquence, c'est l'homme qui doit s'adapter à la technique et non l'inverse. La loi de Gaber affirme : « tout ce qui est possible techniquement sera réalisé ». Ce ne sont plus les machines qui s’automatisent pas rapport aux compétences artisanales et ouvrières, c’est le monde des machines lui-même qui semble imposer un destin. « La Technique ne se contente pas d'être le facteur principal ou déterminant, elle est devenue Système, et l'homme est au service de la technique plus qu'elle ne le sert». Ceci révèle une préoccupation majeure face aux progrès techniques : quelle est la place de l’homme ? L’homme peut-il devenir esclave de la technique ?

La modernité a franchi une limite ou le progrès est tel que la technique en vient à créer des phénomènes qui n’existent pas sur terre. La bombe d’Hiroshima inaugure une nouvelle ère. La possibilité d’entrevoir une fin

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