Economie du Nutella
Étude de cas : Economie du Nutella. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dissertation • 3 Février 2013 • Étude de cas • 2 096 Mots (9 Pages) • 1 206 Vues
L’economie du nutella
"Le Nutella ? C'est une drogue dure ! J'en ai donné à mon chien. Il était comme fou et m'a suivi pendant des heures !" Pierre Dukan, le médecin, auteur du fameux régime, n'y va pas avec le dos de la cuillère. Son chien n'est pas seul à avoir succombé. Le pot de Nutella atterrit dans le chariot de trois familles françaises sur quatre. Les "dealers" ont, il est vrai, pignon sur rue : 5 000 points de vente en France. Nutella détient 85 % du marché de la pâte à tartiner. Le pot est dans toutes les cuisines, toutes les crêperies. Une domination commerciale inédite dans un univers où la concurrence fait rage.
Internet est l'une des vitrines de cet extravagant succès. Saisir Nutella sur Google déclenche une avalanche de 31 millions de résultats. Sur Facebook, sa page compte près de 11 millions de fans. Gloire suprême : l'existence depuis quatre ans d'une journée internationale du Nutella, le 5 février, le Nutella Day. L'initiative d'un fan et non des communicants de Ferrero, qui s'en amusent : eux auraient choisi le 2 février, jour de la Chandeleur !
Le culte du secret ?
Y a-t-il dans le Nutella quelque ingrédient mystérieux qui nous rende accros ? La question se pose avec d'autant plus d'acuité que le secret fait partie de l'ADN de l'entreprise. Elle n'est pas cotée en Bourse, son capital étant détenu à 100 % par la famille. Pour conserver la main sur le process de fabrication, Michele Ferrero, le fils du fondateur, a créé sa propre filiale d'ingénierie, Ferrero Ingegneria, qui achète, installe, voire invente les machines destinées aux sites de production. Parano, Ferrero ? Dans la filiale française, on se veut accueillant. Le culte du secret ? "Ce n'est pas une politique, plutôt une tradition, assure Christophe Bordin, responsable des relations extérieures de Ferrero France. Elle est tellement ancrée que lorsqu'un de nos salariés est interviewé par un journaliste, nous sommes obligés de lui préciser qu'il doit surtout dire ce qu'il veut !" Résultat, après deux mois d'attente : la maison mère en Italie finit par donner au Point l'autorisation de visiter l'usine de Villers-Écalles, en Seine-Maritime, la plus grosse usine de production du monde. Elle ravitaille un tiers des aficionados de la planète !
La fameuse recette, la voici : d'abord les noisettes, broyées jusqu'à obtenir une pâte, le manteca. Ajoutez huile de palme, cacao, lait écrémé en poudre, lactosérum, sucre, vanille, et mixez le tout pour obtenir de la "farine de Nutella". Encore de l'huile de palme et une pincée de lécithine de soja. Laissez reposer trois jours. Servez à température ambiante sur du pain. À croire qu'on pourrait le faire chez soi..."Il n'y a aucune substance secrète, c'est un mythe !" jure Jean-Marc Da Cunha, responsable qualité et environnement chez Ferrero France.
Classée top secret
Pas d'additif caché, mais une montagne de détails à toutes les étapes de production : choix des matières premières, dosage, température, réglage au millimètre des machines... De quoi faire s'arracher les cheveux aux fabricants de marques de distributeurs, qui désespèrent d'égaler la recette un jour. Mais ces fameux détails qui font la différence, on n'aura pas le droit de les connaître. "Si on ne vous montre pas cette partie, c'est juste qu'il n'y a rien à voir. Des cuves en Inox, des tuyaux, c'est sans intérêt", se défend Christophe Bordin. En fait, c'est la maison mère en Italie qui s'est opposée à ce que l'on accède à cette partie de l'usine, classée top secret.
On se contentera donc des cinq gigantesques silos scellés, remplis chacun de 60 tonnes de pâte prête à se déverser dans des pots défilant dans un tintamarre de verres entrechoqués. Chaque jour, à Villers-Écalles, près d'un million de pots sont remplis avant d'être stockés trois jours pour cristallisation, ce qui donne à "la Nutella", comme on l'appelle ici et en Italie, son onctuosité. En attente de livraison, une cathédrale de Nutella : 8 000 palettes. Sur la production annuelle de 100 000 tonnes, 70 % resteront en France. Car les Français sont les premiers accros, devant les Allemands et les Italiens : 26 % de la production mondiale, soit 300 000 tonnes, finissent sur nos tartines et nos crêpes. Depuis quarante ans, Nutella est ici le roi du goûter !
Du gras et du sucre
Et ce n'est pas fini ! "Il y a sept ans, nous avons réussi à l'introduire dans une consommation quotidienne au petit déjeuner", se félicite Frédéric Thil, directeur général de Ferrero France. À grand renfort de publicité, car Ferrero détient le plus gros budget publicitaire du secteur alimentaire : près de 207 millions d'euros, dont 44 millions rien que pour Nutella. Ses slogans "De l'énergie pour penser et se dépenser", "Chaque jour du bonheur à tartiner" ou "Il en faut de l'énergie pour être un enfant" sont destinés à faire du pot patatoïde l'aliment indispensable à la croissance des petits et à la bonne humeur des grands.
Nutella n'a pourtant pas que des supporters. La pâte à tartiner, malgré les noisettes et le verre de lait qui ornent son étiquette, ne contient que 13 % des premières et 6 % du second. Nutella, c'est du gras et du sucre, à 60 % ! En février, une mère de famille californienne s'en émeut et dépose plainte contre Ferrero pour "publicité mensongère". Elle réclame l'interdiction des allégations "bonne pour la santé", "équilibrée"...
Royaume des calories
De ce côté de l'Atlantique, nul ne songe à porter plainte. Question de moeurs. Mais, à l'heure du "mangez moins gras, moins sucré" du Plan national nutrition santé, le Nutella est dans le collimateur. "Il est devenu un produit symbolique, pour comprendre en particulier l'obésité infantile, contre laquelle on cherche souvent un bouc émissaire", explique le docteur Frédéric Saldmann, cardiologue et nutritionniste à l'hôpital Georges-Pompidou. De fait, au royaume des calories, le Nutella est indétrônable : 530 kilocalories pour 100 grammes. "L'obésité infantile n'est pas du tout maîtrisée, au mieux elle stagne. Environ 14 % des enfants sont obèses ou en surpoids, s'emporte Olivier Andrault, responsable de l'alimentation,
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