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L'enterrement de Goriot

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Par   •  1 Novembre 2014  •  1 423 Mots (6 Pages)  •  1 862 Vues

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Balzac - Le père Goriot

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Le père Goriot est mort. Ses filles, qu'il a mariées richement, qu'il aime passionnément, Anastasie de Restaud et Delphine de Nucingen, prévenues de ce décès, refusent qu'on les dérange. L'étudiant Eugène de Rastignac, qui a veillé son voisin de pension Goriot dans son agonie, doit régler seul les frais de l'enterrement.

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Quand le corbillard vint, Eugène fit remonter la bière, la décloua, et plaça religieusement sur la poitrine du bonhomme une image qui se rapportait à un temps où Delphine et Anastasie étaient jeunes, vierges et pures, et ne raisonnaient pas, comme il l'avait dit dans ses cris d'agonisant. Rastignac et Christophe accompagnèrent seuls, avec deux croque-morts, le char qui menait le pauvre homme à Saint-Etienne-du-Mont, église peu distante de la rue Neuve-Sainte-Geneviève. Arrivé là, le corps fut présenté à une petite chapelle basse et sombre, autour de laquelle l'étudiant chercha vainement les deux filles du père Goriot ou leurs maris. Il fut seul avec Christophe, qui se croyait obligé de rendre les derniers devoirs à un homme qui lui avait fait gagner quelques bons pourboires. En attendant les deux prêtres, l'enfant de choeur et le bedeau, Rastignac serra la main de Christophe, sans pouvoir prononcer une parole.

- Oui, monsieur Eugène, dit Christophe, c'était un brave et honnête homme, qui n'a jamais dit une parole plus haut que l'autre, qui ne nuisait à personne et n'a jamais fait de mal.

Les deux prêtres, l'enfant de choeur et le bedeau vinrent et donnèrent tout ce qu'on peut avoir pour soixante-dix francs dans une époque où la religion n'est pas assez riche pour prier gratis. Les gens du clergé chantèrent un psaume, le Libera, le De profundis. Le service dura vingt minutes. Il n'y avait qu'une seule voiture de deuil pour un prêtre et un enfant de choeur, qui consentirent à recevoir avec eux Eugène et Christophe.

- Il n'y a point de suite, dit le prêtre, nous pourrons aller vite, afin de ne pas nous attarder, il est cinq heures et demie.

Cependant au moment où le corps fut placé dans le corbillard, deux voitures armoriées, mais vides, celle du comte de Restaud et celle du baron de Nucingen, se présentèrent et suivirent le convoi jusqu'au Père-Lachaise. A six heures, le corps du père Goriot fut descendu dans sa fosse, autour de laquelle étaient les gens de ses filles, qui disparurent avec le clergé aussitôt que fut dite la courte prière due au bonhomme pour l'argent de l'étudiant. Quand les deux fossoyeurs eurent jeté quelques pelletées de terre sur la bière pour la cacher, ils se relevèrent et l'un d'eux, s'adressant à Rastignac, lui demanda leur pourboire. Eugène fouilla dans sa poche et n'y trouva rien ; il fut forcé d'emprunter vingt sous à Christophe. Ce fait, si léger en lui-même, détermina chez Rastignac un accès d'horrible tristesse. Le jour tombait, un humide crépuscule agaçait les nerfs, il regarda la tombe et y ensevelit sa dernière larme de jeune homme, cette larme arrachée par les saintes émotions d'un coeur pur, une de ces larmes qui, de la terre où elles tombent, rejaillissent jusque dans les cieux. Il se croisa les bras, contempla les nuages, et le voyant ainsi, Christophe le quitta.

Rastignac, resté seul, fit quelques pas vers le haut du cimetière et vit Paris tortueusement couché le long des deux rives de la Seine, où commençaient à briller les lumières. Ses yeux s'attachèrent presque avidement entre la colonne de la place Vendôme et le dôme des Invalides, là où vivait ce beau monde dans lequel il avait voulu pénétrer. Il lança sur cette ruche bourdonnant un regard qui semblait par avance en pomper le miel, et dit ces mots grandioses : - A nous deux maintenant !

Et pour premier acte du défi qu'il portait à la Société, Rastignac alla dîner chez Mme de Nucingen.

Introduction

Les enterrements ne seraient-ils qu'une mise en scène où chaque personnage s'efforce de tenir le rôle qui lui incombe, parfois avec hypocrisie ? Déjà La Fontaine, dans sa fable Le Curé et le Mort, ironisait :

Un mort s'en allait tristement

S'emparer de son dernier gîte ;

Un Curé s'en allait gaiement

Enterrer ce mort au plus vite.

Verlaine écrira par la suite un sonnet intitulé L'Enterrement où il fustige les héritiers resplendissants.

Dans le dénouement de son roman, Le Père Goriot, Balzac reprend cette vision réaliste et satirique de la société et de ses conventions. Mais l'inhumation du père Goriot, par ses circonstances, son déroulement, les rapprochements symboliques qu'elle suggère, clôt surtout l'éducation sentimentale et sociale de son jeune voisin de la pension Vauquer, Eugène de Rastignac.

1/ La volonté réaliste, satirique et symbolique

1.1. Balzac suit scrupuleusement le déroulement de l'enterrement ; il relate minutieusement

• la levée du corps,

• le convoi,

• l'office funèbre

• l'inhumation proprement dite.

Il use d'un vocabulaire réaliste, choisit les termes

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