Argent virtuel

Thème : L’argent Virtuel.

Problématique : Est-ce une fuite en avant ou une évolution inexorable vers un argent dématérialisé ?

L'argent ou la monnaie a une origine très ancienne qu'on ne peut déterminer avec précision. Mais nous savons grâces aux archéologues que toutes les grandes civilisations ont vu leurs essors s'accélérer avec la mise en place d'un système financier. En Mésopotamie chez les sumériens ou dans l’Égypte antique on a ainsi pu voir l'apparition de l'argent sous sa forme écrite. L'écriture cunéiforme a été inventé tout d'abord pour graver de manière persistante des inventaires comptables. Les unités de comptes basés sur des unités de poids (blé, or et argent) ont ainsi permis aux états de percevoir des impôts et de pouvoir entretenir des armées et des fonctionnaires. En Europe occidentale nous connaissons bien sûr chez les romains des unités d'échanges basés sur le bœuf (pécus en latin) ou sur le sel qui servait de salaire pour la solde des légionnaires. Mais la forme numismatique de l'argent a sans doute vu le jour dans la Grèce antique avec la création de pièces en électrum (alliage d'or et d'argent) dès le VIIème siècle av-JC. Avec ce type de monnaie basé sur des valeurs étalons de métal facilement échangeable.

Avec ce type de monnaie basé sur des valeurs étalons de métal facilement échangeable et non périssable, ce sont les échanges entre cités et civilisations qui ont pu se développer. A Athènes avec les progrès de la métallurgie, ce sont des pièces exclusivement en argent qui permettaient les échanges courants. L'or était alors dédié aux rituels religieux car si l'argent et la guerre vont souvent de pair, l'or et la religion forme également un vieux couple... Au moyen-âge les structures féodales et les guerres incessantes ralentissent l'utilisation de l'argent et de l'or comme monnaie. Celle-ci est réservé à une élite et le peuple retourne au système du troc pour commercer. De plus les différents taux de changes entre or et argent entre les pays et les continents rendent également plus compliqué ce système. Il faut attendre la renaissance et les grandes découvertes maritimes pour que l'argent sous sa forme métallique reprenne son essor.

Mais les instabilités politiques du XVIIème siècle vont rendre progressivement usuelles l'utilisation de l'argent sous sa forme papier. Les lettres de change et de dépôt auprès des orfèvres vont être à l'origine de la création du système bancaire. Cependant, le billet de banque va garder sa corrélation avec la valeur de l'or jusqu'au XXème siècle. Là aussi les guerres et les crises financières suivies d'hyperinflations vont creuser la tombe de ce système. C'est les idées de John Maynard Keynes et la volonté des états d'utiliser l'argent comme une arme économique qui va entraîner l'utilisation massive du crédit et de la dette publique. Les gouvernements vont faire tourner "la planche à billet" pour résoudre les crises successives et rendre intenable la conversion de l'argent sous sa forme fiduciaire en or. En 1971 le dollar, dernier bastion de la conversion en or achève ce système qui corrèle la valeur de l'argent avec l'étalon or. Depuis lors c'est le régime d'échange flottant entre chaque monnaie qui régule le système financier. Ce qui signifie concrètement que l'argent fiduciaire peut s'acheter et se vendre comme n'importe quel autre bien. L'argent n'est plus un outil pour favoriser le commerce mais c'est un bien commercialisable comme un autre et sur lequel on peut spéculer.

A la fin du XXème siècle la généralisation des cartes de crédit, des chèques et des virements bancaires voit encore une nouvelle transformation dans le rapport entre l'humanité et l'argent. L'argent devient invisible, intangible et on ne cherche plus à comprendre son origine. On est passé d'un système de confiance en l'argent à un système de croyance.

Le système bancaire et financier international tient tant qu'on y croit, mais au moindre petit vent de panique en provenance d'un pays affecte toute l'économie mondiale.

Enfin depuis le début du XXIème siècle des systèmes alternatifs tentent de contourner la mainmise des états et des banques sur le contrôle de l'argent. C'est l'apparition de l'argent électronique, du Bitcoin, du Le-coin et bien d'autres. Mais on voit bien aujourd'hui que ces systèmes sont dévoyés de leurs principes initiaux par les banques et le système financier qui y voient un danger pour leur emprise. Cet emprise est si grande et si complexe que le commun des mortels ne comprend plus vraiment à quoi correspond l'argent. L'argent est devenu quelque chose de virtuel que les ordinateurs et les réseaux bancaires s'échange à la vitesse de la lumière. L'argent est devenu invisible, intangible et incompréhensible pour le tout à chacun.

TEXTE 1 :

- ROBERT Denis, l’affaire des affaires : L’argent Invisible, Paris Barcelone Bruxelles : Dargaud, DL 2009, 1 vol. (206 p.) ISBN978-2-205-06188-8.

Dans le premier tome de l'affaire des affaires, l'argent invisible le journaliste Denis Robert dénonce en bande dessiné et de manière romancée les dérives actuelles du système politico-financier. Il se sert ainsi de son implication dans l'affaire Clearstream pour mettre en évidence les mécanismes mafieux qui permettent de blanchir "l'argent sale" et contre lesquels les systèmes judiciaires sont impuissants. Pour rappel Clearstream est une banque d'affaire luxembourgeoise ayant servi d'intermédiaires dans la vente d'arme (frégates) entre la France et Taïwan et par où aurait passé d'importantes rétro-commissions servant à corrompre les multiples personnages clé de cet affaire dans les années 90.

 A partir de paradis fiscaux, y compris en Europe, et à travers des sociétés offshores il montre la responsabilité à grande échelle des élites économiques et politique dans le détournement d'argent public et dans leur corruption, Mais ce qui m'a particulièrement intéressé dans cet ouvrage c'est l'illustration pratique des nouvelles technologies qui révolutionnent ce nouveau banditisme.

 On a tendance à rester sur l'image des mallettes d'argent liquide qui circulent de pays en pays pour matérialiser ce qu'ai l'argent sale, mais cela ne correspond plus du tout à la réalité. Celles-ci ne représentent qu’une toute partie des transactions ; tout se passe par ordinateur entre virement de banque à banque en passant par des sociétés fantômes. Le tout forme une boucle complexe d'intermédiaires véreux, de politiques et de fonctionnaires corrompus ou complaisants et qui se font sous le couvert de respectabilité des grandes banques internationales.

...