Réflexions sur l'ingénu de Voltaire
Commentaire d'oeuvre : Réflexions sur l'ingénu de Voltaire. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar VILLEDEY • 4 Mai 2023 • Commentaire d'oeuvre • 2 498 Mots (10 Pages) • 186 Vues
L’Ingénu
De Voltaire[pic 1]
I. Le Titre
1) Selon le dictionnaire, le nom et adjectif « ingénu » désigne une personne naïve, innocente, simple et franche qui laisse entrevoir de manière ostentatoire ses sentiments et ses secrets. De plus, ce terme peut qualifier un individu manquant d’éducation. En outre, un ingénu est aussi une personne qui dit et fait tout ce qu’elle pense. Ce mot vient de ingénuus, utilisé sous l’empire romain, et qui désigne un homme libre qui n’a jamais été soumis. L’ingénu est donc un nom qui décrit un homme qui refuse de se soumettre à des principes fixés.
Ainsi le titre nous renseigne dès le début sur le caractère et la personnalité du personnage principal « On m’a toujours appelé l’ingénu […] parce que je dis toujours naïvement ce que je pense ». Le personnage de Voltaire est donc un personnage éponyme.
Après avoir lu cet ouvrage, nous validons avec grandiose cette hypothèse puisque l’ingénu est bien quelqu’un de naïf i croit tout ce qu’on lui dit. Il applique mot par mot la Bible : par exemple l’ingénu souhaite se faire baptiser dans le ruisseau parce qu'il a lu dans la Bible que Jésus s'était fait baptisé de la même manière. De même, dès le début de l'œuvre, le Huron avouera à ses proches : “On m’a toujours appelé l’ingénu (…) parce que je dis toujours naïvement ce que je pense” (l.91 à 93-chapitre 1). Mais au fur et à mesure de l'œuvre, l'Ingénu va acquérir une véritable philosophie et pourra adopter un comportement totalement autonome ; l’éducation lui faisant défaut sera acquise au contact de Gordon, et la fusion de qualités innées et de connaissances acquises feront de lui « un guerrier et philosophe intrépide ». En plus de toutes ces définitions, ingénu a une autre définition venant du latin qui signifie de parents libres. En effet, le huron est un homme livre n’ayant aucune servitude. Au cours de l’œuvre, le personnage principal fait donc une nette évolution et devient au fil du temps de moins en moins ingénu. Même si l’ingénu est un peu comme un enfant et son nom apporte plutôt quelque chose de négatif sur lui, il incarne le philosophe rêvé par les Lumières, libre et détaché de la société. Ainsi avant même d’avoir commencé à lire, le lecteur connaît en partie la nature du héros. Ce nom rappelle son synonyme : Candide, nom d’un autre roman philosophique de Voltaire.
2) Ce récit n’est pas comme l’affirme le sous-titre une « histoire véritable tirée des manuscrits du Père Quesnel ». En effet, l'Ingénu n'est ni «une histoire véritable » (C’est un récit purement imaginaire et utopique.) ni « tirée des manuscrits du Père Quesnel » (Voltaire n’a pas repris cette histoire. C’est bien son esprit qui ‘la façonnée.).
Ces précisions jouent un rôle vitale dans la publication de cette œuvre. En effet une grande partie des œuvres s’attaquant à la religion et au pouvoir royal sont censurées à l’époque. Le sous-titre lui permet ainsi de faire une critique des mœurs françaises, sous couvert de faire un simple récit basé sur des « manuscrits » à caractère historique. L’écrivain utilise ici un procédé très courant à l’époque qui était une manière de tromper la censure Ces précisions ont donc pour but de renforcer la crédibilité, la vraisemblance et l’authenticité du récit en tant que publication légale. Cette volonté de traduire la réalité se retrouve tout au long du texte par l’utilisation de lieux réels : « La baie de St Malo » , d’une époque réelle « En l'année 1689, le 15 juillet au soir » ou encore de personnages réels « Louvois » « le Père Lachaise ».
II. le Genre et les Registres
3) L’ingénu est un mélange de genres. En effet ce récit est à la fois un roman, un conte philosophique mais aussi une satire :
· Tout d’abord, L’ingénu est un roman. Le roman est pour rappel un long récit en prose dans lequel des personnages imaginaires (parfois réels) vivent des aventures. Ces dernières nous sont présentées par un narrateur. L’ingénu est bien ce récit composé de cette multitude de personnages qui vivent des aventures. De même, c’est bien un récit présenté par un narrateur : « Un jour saint Dustan » (premières lignes du récit).
· Mais L’ingénu est aussi une satire. La satire est pour rappel une forme littéraire qui critique en se moquant, en faisant rire aux dépens de ce que l’on critique. L’ingénu est une satire aux cibles multiples : Voltaire en écrivant son livre profite pour critiquer :
- le clergé catholique,
- la province et les provinciaux,
- les médecins qui ne savent pas soigner Mlle de Saint-Yves,
- l’arbitraire des décisions royales,
- l’intolérance religieuse,
- les courtisans et l’hypocrisie,
- le « mythe de l’état nature » : tous ces thèmes que Voltaire critique fait de ce récit une satire.
· Ou encore un conte philosophique. Le conte est une fiction narrative, courte, illustrant ou défendant des thèses de nature polémique. Le personnage principal est une fiction d’homme naturel. Voltaire n’en donne pas une image réaliste ou vraisemblable. La progression du récit ne s’explique pas par un impératif de vraisemblance mais par ses enjeux philosophiques :
- Rencontre du Huron avec les Kerkabon : premiers traits de la satire dans l’opposition entre un homme à l’esprit libre et des personnages caractérisés par leurs préjugés.
- L’épisode de Saumur : occasion de dénoncer la révocation de l’Édit de Nantes.
- La présence de Gordon : nécessaire pour montrer l’évolution intellectuelle de l’Ingénu.
4) Le registre utilisé dans les quatre premiers chapitres de L’ingénu est le comique.
En effet, lorsque le Huron arrive en Basse-Bretagne, il y a un énorme décalage entre son mode de vie et celui des autres personnages qui sont, contrairement à lui, civilisés et non sauvages. Le comique repose donc dans les quatre premiers chapitres sur ce décalage entre la sauvagerie du Huron et la civilisation de son oncle et de sa tante. Mais ce comique repose
aussi sur les questions que pose l’Ingénu qui montrent que les dogmes de l’église actuelle du XVIIème siècle ont changé. L’homme s’est écarté de la parole de Dieu et a dénaturé le message biblique. Ainsi, le Huron prend ce qui est écrit dans la Bible au pied de la lettre. Il souhaite se faire baptiser dans un ruisseau parce qu'il a lu dans la Bible que Jésus s'était fait baptisé de la même manière. De même, on peut citer : « j’avais toujours cru que le français était la plus belle de toutes les langues après le bas-breton ».
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