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Le Jeu de l'amour et du hasard - La leçon sociale et sentimentale

Dissertation : Le Jeu de l'amour et du hasard - La leçon sociale et sentimentale. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  16 Novembre 2023  •  Dissertation  •  3 110 Mots (13 Pages)  •  207 Vues

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INTRODUCTION :

« Marivaudage : Style et langage raffinés et précieux à la manière des personnages de Marivaux. » Utilisé en abondance dans la comédie du Jeu de l’amour et du hasard, le marivaudage caractérise l’écriture de Marivaux, écrivain français du XVIIIe siècle. Ce style se caractérise par la recherche dans le langage et le contexte amoureux. Ainsi, les sentiments qu’éprouvent les jeunes gens de la comédie sont exprimés à travers le marivaudage qui traduit la complexité de l’amour. Le marivaudage est également représentatif de l’instant où les personnages découvrent l’amour, où ils en apprennent plus sur leurs sentiments. On peut donc parler de leçon amoureuse.

Cependant, un autre aspect du théâtre de Marivaux est traité par Catherine Naugrette-Christophe : la leçon sociale. En effet, cette critique littéraire « répond », dans la préface à l’édition Gallimard de 1994, à la question implicite de la morale que peuvent tirer les héros de la comédie du Jeu de l’amour et du hasard, avec l’énoncé suivant : « A travers les épreuves de la comédie, les jeunes gens (…) reçoivent une double leçon : sociale et sentimentale. »

Avant de s’attarder plus en détail sur l’énoncé, il se doit d’évoquer brièvement l’intrigue de cette comédie. Il s’agit, comme dans bien d’autres pièces de Marivaux, de gens à marier. Pourtant cela ne cesse de se compliquer, par le biais de déguisements grâce auxquels les maîtres jouent au domestique, et vice-versa. Promise à Dorante sans le connaître, Silvia a imaginé avec l’accord de son père, Monsieur Orgon, de se déguiser en soubrette pour voir un peu quel est le mari qu’on lui destine. Ce dernier de son côté a conçu le même subterfuge et paraît devant sa fiancée sous un habit de valet. Dès lors, plus rien n’est simple et les jeux de l’amour sont soumis aux caprices du hasard.

Pour ce qui est trait aux aspects formels de l’énoncé, on peut relever que Naugrette-Christophe utilise le présent de vérité générale pour exprimer son point de vue. Ce temps verbal permet de souligner le fait que c’est une affirmation forte. On peut également relever l’expression « double leçon », qui peut être définie comme une métaphore de la pédagogie.

Leçon sociale et sentimentale : pour Naugrette-Christophe, ces deux termes résument la morale que les héros du Jeu de l’amour et du hasard tirent de la comédie. Le Dictionnaire Le Robert définit ces deux mots de la manière suivante : « Social : Relatif aux rapports entre les classes de la société. », « Sentimental : Relatif à la vie affective et, spécialement, l'amour. »

Pour mieux comprendre cet énoncé, on peut le reformuler de cette façon : A travers l’éducation marivaudienne, les personnages de la comédie découvrent l’amour ainsi que ses effets sur eux et prennent conscience de la complexité des statuts sociaux.

Nous nous demanderons tout d’abord en quoi les personnages du Jeu de l’amour et du hasard reçoivent une leçon sociale, mais en quoi peut-on la relativiser. Puis, nous verrons en quoi le personnage de Silvia reçoit une leçon sentimentale. Enfin, nous monterons en quoi l’on peut mettre en relation la leçon sociale et la leçon sentimentale, et en quoi l’on voit que Le Jeu de l’amour et du hasard est une comédie, mais avec un fond sérieux et critique sur la société du XVIIIe siècle.

DÉVELOPPEMENT :

La première idée que je vais développer, qui s’appuie sur la thèse de Naugrette-Christophe, est l’idée qui soutient que les personnages du Jeu de l’amour et du hasard reçoivent une leçon sociale.

Le Jeu de l’amour et du hasard est certes une pièce qui traite surtout d’amour et de sentiments. Pourtant, le travestissement des valets et des maîtres conduit à une inversion de la hiérarchie sociale, qui oblige à réfléchir à cet aspect de la pièce et qui donne au « Jeu » une dimension sociale. Le déguisement éclaire les identités sociales d’un jour nouveau. En se déguisant, les jeunes gens de la comédie expérimentent un rôle social totalement nouveau et opposé à celui qu'ils ont joué jusque-là. Ainsi, Dorante et Silvia, à travers des situations parfois peu agréables, éprouvent les contraintes et les humiliations de la condition domestique. Dorante, par exemple, est mis deux fois à la porte sans ménagements par M. Orgon et Mario (à la scène 10, acte 2 et à la scène 3, acte 3).

De leur côté, le valet Arlequin et la soubrette Lisette goûtent la liberté d'action et de parole, et les pouvoirs liés à la condition des maîtres. Ainsi, ils profitent de leur costume, et de l'impunité qu'ils y voient associée symboliquement, pour prendre une revanche sur leurs maîtres, et se jouer de l'ordre social.

Lisette n'est pas fâchée de mettre sa maîtresse en colère. Arlequin se montre de plus en plus insolent vis-à-vis de Dorante, notamment lorsqu’il lui répond (scène 4, acte 2) : « Non : maudite soit la valetaille qui ne saurait nous laisser en repos ! » En le contrefaisant, en caricaturant son langage et ses tics, il met au jour, sur le mode comique, ce qu’est un maître.

Si leur langage sert à caractériser rapidement les personnages, l'échange des rôles sociaux amène les maîtres et les serviteurs à prononcer d'étranges paroles équivoques, au regard de leur véritable condition. Ainsi, Arlequin et Lisette, déguisés en maîtres, utilisent les termes « nos gens », « soubrette », « valetaille » dans des emplois péjoratifs, comme pour mieux affirmer leur nouveau pouvoir, exprimer leur ressentiment. Ces scènes de comédie, où les rapports entre les personnages reposent sur des données truquées, permettent de faire entendre, de la manière la plus crue, le langage que les maîtres tenaient vis-à-vis de leurs domestiques.

La pièce révèle également qu'il est difficile de fuir son rôle social. Chez Arlequin, le valet persiste sous le costume du maître et chez Lisette, la suivante persiste sous le costume de la maîtresse. Silvia et Dorante sont loin d’oublier complètement les normes de leur classe. Silvia et Dorante, même en acceptant de renoncer pour quelque temps seulement à leur costume et à leurs prérogatives de maîtres, restent toujours, par leurs manières, leur langage, leur sensibilité, des aristocrates. C’est Mario, qui pour amuser son père et se divertir, se charge de faire la remarque sur les façons de parler des deux maîtres déguisés (scène 5, acte 1) : « (…) mais il me semble que ce nom de Mademoiselle qu’il te donne est bien sérieux, entre gens comme vous (…) », ou

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