Apollinaire, Alcools, Nuit rhénane
Commentaire de texte : Apollinaire, Alcools, Nuit rhénane. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar clemmmy • 25 Avril 2023 • Commentaire de texte • 1 580 Mots (7 Pages) • 216 Vues
Nuit rhénane
Le recueil Alcools, publié en 1913 par Guillaume Apollinaire, est un recueil qui joue sur la surprise, les contrastes, l’inventivité lexicale et syntaxique. Le poème « Nuit rhénane » ouvre le cycle des 9 poèmes de la section Rhénanes, inspirés par le voyage d’Apollinaire en Allemagne et le souvenir de son amour malheureux avec Annie Playden. Il leur donne finalement une place privilégiée dans le recueil Alcools, véritable recueil dans le recueil. Dans cette section, Apollinaire se réapproprie les mythes germaniques et fait entrer dans sa poésie les figures surnaturelles des fées du Rhin, comme pour créer un parallélisme avec Annie Playden, dont il se sent ensorcelé.
De la sorte, nous étudierons le passage en mettant en avant la transition d’une réalité à une rêverie fantasmatique ainsi que le double visage de l’Allemagne incantée ici.
Nous verrons que le premier quatrain de « Nuit rhénane » insiste sur le tournant du poète passant de la réalité à la rêverie. Dans la suite du poème, Apollinaire revient dans la réalité puis se replonge dans la fantasmagorie.
I – De la réalité à la rêverie (v.1-4)
Le poème « Nuit rhénane », qui commence par un quatrain composé d’alexandrins aux rimes croisées, à tout l’apparence d’un sonnet élisabéthain (ABAB BCBC CDCD EE), sans doute en hommage à Annie Playden, la jeune anglaise dont Apollinaire était amoureux.
La rêverie a pour support un objet très réel et prosaïque qui est le premier terme: un « verre » (v.1). Ce verre est “trembleur” animé d’une force étrange. Ce vin, comme Alcools semble être une métaphore du feu brûlant de la poésie. De plus, Apollinaire joue surtout sur l’homophonie entre « verre » et « vers », qui éclaire le titre du recueil Alcools. Ce vin est le support d’une évasion immobile et représente aussi l’énergie créatrice qui symbolise l’inspiration poétique. La musicalité du premier vers avec l’allitération en [v] et l’assonance en [in] : « Mon verre est plein d’un vin trembleur comme une flamme » peut faire songer au lyrisme.
Apollinaire au vers 2, convie les buveurs à écouter ce que lui seul entend “la chanson lente des bateliers” ce qui intensifie le lyrisme. Cette chanson rappelle la légende de la Lorelei, la Circé locale, une pécheresse qui, par sa beauté et ses chants magiques, attirait contre des rochers les bateliers fascinés et provoquait ainsi leurs morts. Le verbe « Écoutez » à l’impératif engage le lecteur à prêter attention à ce chant lyrique qui puise dans la tradition et la mythologie. Le champ lexical de la musique et du chant, très présent dans les deux premiers quatrains, souligne que ce poème a pour véritable sujet le lyrisme : « Écoutez », « chanson », « lente », « raconte », « chantez », « dansant ».
Le début de l'envoûtement, du malaise et de l’ivresse s’initie sur un ton lent et un peu mélancolique grâce au rythme du tétramètre ainsi que par l’enjambement qui augmente cette langueur du rythme. De plus, le cadre spatial nocturne avec la lune (v. 3) et nuits ( v.10) est favorable au fantasme et à la fantasmagorie. Cela renforce le lyrisme avec un décor typiquement romantique, comme dans un tableau du peintre romantique Caspar David Friedrich (image fin ). La perception du monde semble changeante du fait de la boisson ce qui transforme le monde nocturne des bords du Rhin en un univers étrange. Cela permet d’étirer la vision fantastique de la mythologie germanique des “sept femmes” “sous la lune”. L'adjectif numéral cardinal “sept” est un chiffre mystique, magique et infernal faisant référence à l’Apocalypse dans la Bible. Il renvoie aux 7 dons de l’Esprit Saint et aux 7 dons de l'intelligence humaine dans la religion islamique. Ce chiffre confère donc à ces femmes une dimension surnaturelle, divine et inquiétante. De plus, les “cheveux verts et longs” (v.4 ) font entrer le poème dans le surnaturel. Cette couleur représente l’eau mais aussi l’espérance, la dissimulation. Les sept femmes pourraient faire référence aux filles du Rhin, ondines (génie des eaux) de la mythologie nordique, chargées de veiller sur l’or du Rhin comme le suggère dans le troisième quatrain « l’or des nuits ».
II – Retour à la réalité ( v.5-8)
Le poète veut s’arracher à cette vision maléfique et à ce chant obsédant. Il veut donc retrouver son équilibre menacé par cet aspect ténébreux. Le rythme est très vif, heurté exprimant cette volonté de briser l’évasion avec l’impératif à la deuxième personne du pluriel ainsi que des coupes. Le poète opère un retour à la taverne rassurante, aux sages bretchen Allemagne, symbole solaire ( blondes) et régime diurne, différentes des cheveux verts qui sont maléfiques. Ce sont des symboles d’une vie réglée,
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