Étude de l'œuvre poétique d'Aimé Césaire: Cahier D'un Retour Au Pays Natal
Dissertation : Étude de l'œuvre poétique d'Aimé Césaire: Cahier D'un Retour Au Pays Natal. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar sokhasweety • 9 Mai 2013 • 570 Mots (3 Pages) • 2 451 Vues
Au bout du petit matin ...
Va-t-en, lui disais-je, gueule de flic, gueule de vache, va-t-en je déteste les larbins de l'ordre et les
hannetons de l'espérance. Va-t-en mauvais gris-gris, punaise de moinillon. Puis je me tournai vers de
paradis pour lui et les siens perdus, plus calme que la face d'une femme qui ment, et là, bercé par les
effluves d'une pensée jamais lasse je nourrissais le vent, je délaçais les monstres et j'entendais monter
de l'autre côté du désastre, un fleuve de tourterelles et de trèfles de la savane que je porte toujours dans
mes profondeurs à hauteur inverse du vingtième étage des maisons les plus insolentes et par précaution
contre la force putréfiante des ambiances crépusculaires, arpentée nuit et jour d'un sacré soleil vénérien.
Au bout du petit matin bourgeonnant d'anses frêles les Antilles qui ont faim, les Antilles grêlées de petite
vérole, les Antilles dynamitées d'alcool, échouées dans la boue de cette baie, dans la poussière de cette
ville sinistrement échouées.
Au bout du petit matin, l'extrême, trompeuse désolée eschare sur la blessure des eaux ; les martyrs qui
ne témoignent pas ; les fleurs du sang qui se fanent et s'éparpillent dans le vent inutile comme des cries
de perroquets babillards ; une vieille vie menteusement souriante, ses lèvres ouvertes d'angoisses
désaffectées ; une vieille misère pourrissant sous le soleil, silencieusement ; un vieux silence crevant de
pustules tièdes,
l'affreuse inanité de notre raison d'être.
Au bout du petit matin, sur cette plus fragile épaisseur de terre que dépasse de façon humiliant son
grandiose avenir les volcans éclateront, l'eau nue emportera les taches mûres de soleil et il ne restera
plus qu'un bouillonnement tiède picoré d'oiseaux marins la plage de songes et l'insensé réveil.
Au bout du petit matin, cette ville plate étalée, trébuchée de son bon sens, inerte, essoufflée sous son
fardeau géométrique de croix éternellement recommençante, indocile à son sort, muette, contrariée de
toutes façons, incapable de croître selon le suc de cette terre, embarrassée, rognée, réduite, en rupture
de faune et de flore.
Au bout du petit matin, cette ville plate étalée ...
Et dans cette ville inerte, cette foule criarde si étonnamment passée à côté de son cri comme cette ville à
côté de son mouvement, de son sens, sans inquiétude,
...