Le Berg extravagant, Thomas Corneille
Commentaire de texte : Le Berg extravagant, Thomas Corneille. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar ninon.hatzig2410 • 8 Mars 2024 • Commentaire de texte • 2 434 Mots (10 Pages) • 113 Vues
Le Berger extravagant est une pièce de théâtre écrite en 1653 par Thomas Corneille, durant le mouvement littéraire du classicisme. Le classicisme, a été influencé par les idées de l’Antiquité gréco-romaine et aborde souvent des thèmes tels que l’amour, la nature humaine ainsi que des réflexions philosophiques. Le Berger extravagant est une comédie qui s’inscrit dans un registre pastoral et burlesque et reprend des caractéristiques du classicisme. L’acte IV, scène 6 qui nous occupe est un dialogue entre Lysis et Montenore, au sujet de la rupture de Lysis avec sa maitresse Charité. Ce dialogue se termine brutalement par la métamorphose de Lysis en arbre. Après lecture de ce dialogue, nous nous demanderons en quoi cette rupture amoureuse et les réactions qu’elle engendre, accentuent le ridicule dont fait preuve Lysis. Pour ce faire, nous analyserons la pièce selon un plan en trois parties. Dans un premier temps, nous examinerons comment Thomas Corneille exagère la rupture amoureuse vécue par Lysis. Ensuite, dans la deuxième partie de notre analyse, nous nous pencherons sur le discours ambigu tenu à l'égard de Charité. Enfin, nous explorerons la solution que Lysis croit avoir trouvée pour résoudre sa détresse amoureuse, une solution qui, en réalité, cache une malédiction.
Bien que la maîtresse de Lysis l’ait laissé tomber, sa réaction est on peut plus démesurée. Il vit cette rupture comme la destruction de son monde, il ressent la peur, le désespoir et l’ensemble des émotions qu’une fin du monde peut procurer. A peine cherche-t-il à transmettre ses émotions que la peur se ressent, dès sa première phrase (« Ah ! Berger, tremble,tremble, », ligne 1507), il utilise le vocabulaire de l’angoisse avec la répétition du verbe trembler dans un rythme ternaire. La répétition de ce verbe, accompagnée du mot Berger, crée une allitération en r, qui transmet un sentiment de violence intense. La rupture a été violente, elle a déclenché en Lysis une avalanche de sentiments négatifs. Ces sentiments négatifs ont assombri le monde de Lysis, son monde a perdu toute lumière, toute couleur, son univers s’est vidé de tout bonheur. Cette perte de lumières et de couleurs se transmet sous forme d’une métaphore, on nous parle d’un « soleil pour jamais se coucher » et de « près perdre leurs fleurs »( ligne 1509/1511), le soleil ayant le rôle d’éclairer et les fleurs de colorer, la vie sur terre. L’abandon de sa maîtresse, est pour Lysis une punition des Dieux qui équivaut à condamner l’Univers à sa destruction. Sans Charité dans sa vie, pour lui plus rien ne peut fonctionner de manière normale et cette pensée que le monde va partir en vrille est accentuée par l’utilisation d’antithèses. Ligne 1510 « les rivières sécher » et ligne 1511 « la Nymphe Echo se taire », sont des termes qui n’ont pas lieu d’être assemblés de la sorte. Les rivières, en temps normal, sont l’un des endroits le moins sec et la Nymphe écho est la dernière divinité qui est prête à se taire. La destruction et la discordance, sont pour Lysis le résultat qu’aura cet abandon, et il en sera la principale victime. En plus, de comparer sa séparation à une sorte d’apocalypse, Lysis se place en tant que persécuté et ne fais que de s’apitoyer sur son sort. Une recherche de pitié d’autrui, qui ne rend pas Montenor dupe. A peine Montenor aperçoit Lysis qu’il sait, que tout cela n’est qu’absurdité, « De quoi se plaint Lysis » est la première phrase qu’il prononce. L’utilisation de la troisième personne du singulier, alors qu’il s’adresse directement à Lysis accentue l’artificiel de la chose. Une impression d’habitude se ressent, comme si Montenor est habitué à voir Lysis agir de la sorte, et qu’il sait qu’au fond tout cela n’est que bêtises et exagération. Lysis n’améliore pas cette impression car tout au long de ses paroles il ne fait que dramatiser. Dès la ligne 1512, il utilise une hyperbole (« Enfin, tout est perdu […]) en désignant la perte de Charité comme la perte de tout. Cette hyperbole a pour but d’appuyer sur l’ampleur de sa souffrance, sur l’ampleur de la gravité qu’est cette situation pour lui. Lysis ne s’arrête pas là, il associe sa situation à une « grande injustice » (ligne 1519). En disant, cela il amplifie son rôle de martyr et fait comprendre qu’il ne mérite pas cela, de plus l’utilisation de « grande » est une hyperbole. Une hyperbole, à son tour encore utilisée dans un seul et même but, augmenter la gravité de la rupture, ainsi que la grandeur de sa souffrance. Lysis se représente en victime, et ne fait que s’apitoyer sur son sort. Il se lamente de son désespoir dont l’origine est Charité, sa maîtresse.
Quand l’amante de Lysis est évoquée, les différents propos à son sujet donnent un discours plutôt ambigu. Lysis voit Charité comme l’une des plus belles femmes, on va le reprendre à plusieurs reprises à faire son éloge. Il décrit sa beauté, tel qu’on décrit une œuvre d’art. Quand il parle de son regard, il cite des « yeux étincelants » (ligne 1515), seul un homme amoureux peut décrire avec tant de passion de simples yeux. Lysis est tellement épris de cette femme qu’il la place sur un piédestal. Il utilise le mot « palais » (1532), pour décrire le lieu où elle réside. Un palais n’est pas le domicile de n’importe qui, dans un palais vit une reine. Lysis idolâtre son amante et il renforce ce fait en la comparant à une reine. Pour admettre auprès de Montenor qu’il trouve Charité magnifique, il utilise le verbe « confesser ». Or l’action de se confesser, est une action destinée aux Dieux. Le choix de ce verbe n’est pas anodin de la part de Lysis, car pour lui, Charité est à l’égal des Dieux. Cette comparaison s’amplifie avec ces paroles : « Par un dernier hommage honorer sa beauté » (ligne 1534). Cette phrase prononcée par Lysis, confirme que Charité n’est finalement pour lui pas qu’une simple reine, elle est bien plus. Elle est une Déesse dont la beauté doit être honorée. Lysis intensifie ce fait avec une hyperbole, formée à l’aide d’une négation partielle : « Que je ne vis jamais de si belle tigresse » (ligne 1517). Pour lui sa bien-aimée est magnifique et aucune des personnes qu’il a pu voir dans sa vie n’égalent sa beauté. Cela revient à réaffirmer ses propos une seconde fois. Charité étant une Déesse, sa splendeur ne peut être égalée. La splendeur de Charité ne peut être égalée et la peur qu’elle provoque, elle aussi, est inégalable. A peine la phrase « Charite est en colère » (ligne 1512) a été prononcée par Lysis que Montenor ressent de l’angoisse. On peut voir cette angoisse dans sa réponse exclamative en rythme binaire, qui fais appel aux Dieux (« O Dieux ! »). Cet appel aux Dieux montre son désespoir de subir la colère de Charité, il supplie d’être épargné. Lysis compare les émotions de Charité à des « transports violents » (ligne 1514). Cette notion de violence dont fait preuve Charité, est accentuée par la métaphore filée de la tigresse. Une tigresse étant un félin dangereux et brutal, l’utilisation de cet animal par Lysis, pour décrire sa maîtresse ne fait que confirmer la crainte qu’il ressent à son égard. La rime entre le mot « agrément » et le mot « bannissement » (ligne 1518-1519) forme un paradoxe. En temps normal, personne ne prend du plaisir à bannir quelqu’un, pourtant dans le cas de Charité c’est tout l’inverse. Ce paradoxe souligne la monstruosité dont fait preuve Charité, elle prend du plaisir à faire souffrir autrui, tel un ferait un monstre. Lysis insiste sur la dangerosité de son amante avec cette question rhétorique :« veux-tu que je l’irrite ? » (ligne1532) . Il dit cela dans le but de rappeler, qu’avec Charité il faut faire attention à la moindre action, car elle peut passer d’une Déesse à une tigresse.
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