Néo-fonctionnalisme
Dissertation : Néo-fonctionnalisme. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Calie_a • 4 Février 2017 • Dissertation • 2 636 Mots (11 Pages) • 2 389 Vues
Depuis les débuts de la construction européenne, différentes théories se sont développées afin de conceptualiser le système politique de cet objet naissant et original qu'a été la Communauté puis l'Union Européenne.
Le néo-fonctionnaliste, avec son rival l'intergouvernementalisme, ont longtemps constitué les deux paradigmes dominants de l'étude de l'intégration européenne. Elles forment des théories de causalité cherchant à expliquer les raisons pour lesquelles les Etats, devenus incompétents voire obsolètes, seraient prompts à abandonner une partie, ou la totalité, de leur souveraineté pour construire un nouvel organisme, plus particulièrement une structure supranationale dans le cadre néo-fonctionnalisme. Elles se concentrent donc plus particulièrement sur les raisons et la finalité de l'intégration européenne et sont conçues comme des approches scientifiques qui « sur une base empirique, l'étude systématique des phénomènes observables, essaie de découvrir les principales variables, d'expliquer le comportement, de révéler les types de relations caractéristiques entre des unités nationales »1. Il s'agit de comprendre les relations entre unités et phénomènes politiques, économiques et sociaux issus de l'intégration européenne.
Le néo-fonctionnalisme est ainsi une théorie des Relations Internationales émergeant dans les années 1960 cherchant à décrire, expliquer et prédire le processus d'intégration européenne. Elle fut représentée notamment par Ernst B. Haas, chercheur américano-allemand en sciences politiques, à travers son livre The Rule of Law in European Integration and Beyond the Nation State publié en 1958. Il est nécessaire de remettre ce paradigme dans le contexte universitaire et socio-historique l'ayant influencé, ici la prédominance du scientisme et du behavioralisme dans l'étude des sciences politiques, notamment aux Etats-Unis, cherchant à rendre l'étude des phénomènes sociaux plus scientifiques en offrant des hypothèses empiriquement vérifiables, et offrant une approche libérée de la valeur.
Loin d'être détaché de la réalité politico-historique, ce paradigme a émergé sous forme de synthèse entre la théorie fonctionnaliste de Mitrany et de l'approche pragmatique de Jean Monnet, premier président de la CECA et père fondateur de la construction européenne. On relève ainsi des liens, une tension entre acteurs et observateurs, entre une méthode d'action et un paradigme scientifique. Sur la base de la vision de Monnet, le néo-fonctionnalisme a introduit une dimension politique au fonctionnalisme et l'a réformé pour l'adapter au contexte européen et aux défis de son intégration défini par Haas comme un : « processus par lequel les acteurs politiques dans plusieurs ensembles nationaux sont persuadés de modifier leurs loyautés, leurs attentes et leurs activités politiques vers un nouveau centre, dont les institutions possèdent ou demandent autorité sur les Etats nationaux préexistants »2.
L'enjeu est ici d'évaluer les différents apports du néo-fonctionnalisme, entre théorie et pratique, méthode d'action et paradigme scientifique, dans l'étude de l'intégration européenne, et cela malgré sa remise en cause au regard des évolutions de la construction européenne, ayant démontré ses limites et faiblesses.
Le paradigme néo-fonctionnaliste s'oppose ainsi aux approches stato-centrées de la construction européenne en la décrivant comme un processus incrémental alimenté par des acteurs avant tout non-étatiques, cherchant à dépasser de la structure obsolète qu'est l'Etat-Nation (I). Cette approche sera cependant remise en cause aux vues des évolutions empiriques de la construction européenne, avec la réaffirmation du rôle des Etats, ce qui démontrera une dissociation entre la théorie et la pratique et l'affaiblissement d'un paradigme néo-fonctionnaliste amèrement critiqué (II).
I. Entre théorie et pratique : le néo-fonctionnaliste de Haas, une théorie de l'intégration européenne comme processus incrémental pour le dépassement des Etats.
Le néo-fonctionnalisme, théorie fondatrice de l'intégration européenne et dominante dans les années 1950 et 1960, se nourrit à la fois de l'approche fonctionnaliste non stato-centrée de Mitrany, en la réformant, tout en cherchant à rationaliser la méthode d'action des acteurs politiques de l'époque, dont Monnet et Schuman (1), pour former une théorie basée sur l'idée originale de spillover, d'intégration fonctionnelle, voyant l'intégration européenne comme un processus se faisant par engrenages, par intégration sectorielle, via des acteurs non-étatiques en premier lieu (2).
1) Le néo-fonctionnalisme, une synthèse entre la théorie fonctionnaliste libérale de Mitrany et la méthode pragmatique de Jean Monnet. Une théorisation de la méthode d'action des pères fondateurs de l'intégration européenne.
• Le néo-fonctionnalisme : un fonctionnalisme réformé cherchant à répondre aux nouveaux défis de l'intégration européenne.
Les liens entre néo-fonctionnalisme et fonctionnalisme sont très nets. Le fonctionnalisme de Mitrany, figurant aux fondements des théories libérales de l'intégration régionale, est précurseur de l'approche néo-fonctionnaliste. L'approche fonctionnaliste refuse la vision stato-centrée de l'intégration européenne et s'oppose ainsi au fédéralisme et à l'intergouvernementalisme.
Pour Mitrany, l'ordre mondial, et ce que doit être l'objectif de tout Etat, doivent être pensés, non pas en termes de répartition des pouvoirs, mais en termes de satisfaction des besoins des citoyens. Or, comme ces besoins tendent à dépasser le simple cadre territorial national, l'Etat-Nation n'est plus l'entité adaptée et adaptable pour répondre aux besoins des citoyens, notamment aux vues du jeu politique et idéologique. Il s'agit d'un constat pragmatique : l'activité économique déborde des frontières nationales. Ainsi, des institutions supranationales doivent être mises en place pour répondre aux nécessités techniques (et non politiques) facilitant donc la dynamique coopérative. Mitrany est défenseur d'un technocratisme non dogmatique. Il prône la mis en place d'une méthode d'action efficace, une méthode d'action par ailleurs reprise par les acteurs politiques de l'époque, notamment les pères fondateurs du projet européen, Robert Schuman et Jean Monnet.
• Théorisation et rationalisation de la méthode pragmatique
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