L'identité Franque Et La Royauté mérovingienne

« Pour moi, l'histoire de France commence avec Clovis, choisi comme roi de France par la tribu des Francs, qui donnèrent leur nom à la France. Avant Clovis, nous avons la préhistoire gallo-romaine et gauloise. L’élément décisif pour moi, c’est que Clovis fut le premier roi à être baptisé chrétien » dit Charles de Gaulle fidèle à la tradition républicaine de “l’histoire de France”. Ce récit nationaliste est le plus commun et le plus souvent utilisé pour désigné la naissance, sous forme de monarchie, de la nation française. Par contre, il est très critiqué par les historiens médiévistes puisqu’ils insistent sur le fait que l’adoption d’une identité nationale est un processus évolutif, comme le fait remarquer Magali Courmet en disant “La France a cependant acquis, entre Ve et XVIe siècle, son nom, sa cohésion, sa conscience nationale”.

L’identité d’un sujet est la reconnaissance de ce qu’il est, par lui même et par les autres, c’est-à-dire que quand un groupe ou un peuple se construit une identité commune, elle doit être assimilée par eux-mêmes et par ceux qui les entourent. L’identité collective apparaît donc au détour des problématiques concernant, par exemple, l’ethnicité et l’ascendance. Cela a pour conséquence que les facteurs spécifiques nécessaires à la création d’une identité nationale restent ambigus. Ce qui reste certain est que le processus de construction d’une identité commune par un groupe, mène souvent à la création d’une nation, c’est-à-dire, d’une communauté d’hommes ayant conscience de son unité (historique, culturelle, etc.) et constituant une entité politique. Afin de s’organiser, une nation doit se soumettre à un système politique possédant un gouvernement et des lois. Pour cela, durant le Moyen Âge, les nations se constituaient, en leur grande majorité, en monarchies. Le terme monarchie provient du grec mono et arke signifiant “seul” et “pouvoir”. Étymologiquement, la monarchie est donc le commandement d’un seul : le roi. Cependant, le roi peut-il devenir le responsable du maintient de la cohésion de son peuple ? Comment est-il choisit ? D’où vient la légitimité de son pouvoir ? Est-il possible de gouverner une nation tout seul ? Ou a-t-il besoin de collaborateurs ?

Il s’agit ici d’étudier la construction progressive de l’identité franque après la disparition de l’Empire romain de l’Ouest, et le rôle des rois mérovingiens dans la construction d’une nation pour ce peuple, de 481 à 751. D’un point de vue chronologique, 481 est l’année où Clovis Ier devient le roi des Francs saliens de Tournai, à la mort de son père, Childéric Ier, permettant le début de la construction du Royaume des Francs. De plus, c’est l’année de la fondation de la dynastie mérovingienne qui finira en 751 par la déposition du dernier roi mérovingien Childéric III et l’onction royale de Pépin III, premier roi carolingien.

Nous nous demanderons donc, comment les francs sont parvenus à se forger une identité commune qui donnera lieu à la naissance du Royaume des Francs sous l’autorité mérovingienne.

Pour y répondre, nous analyserons, tout d’abord, le regroupement des différentes tribus franques conduisant à la création d’une unité sous la direction de Clovis. Une fois la création d’une unité franque explicitée, il est bon d’étudier l’organisation de cette unité en État, c’est-à-dire en la mise en place du Royaume des Francs ainsi que l’originalité de celui-ci sous le commandement des mérovingiens. Finalement, il s'agit de s’intéresser aux difficultés que subissent les rois mérovingiens pour maintenir la cohésion du Royaume.

Avant Clovis, les francs étaient divisés en différents royaumes, c’est à dire qu’il n’existait pas d’unité, pas de gouvernement central. Comment parvient-il à les unir ? Est-ce qu’il existait déjà une identité commune parmi les francs ? Clovis a pu se construire un royaume grâce au peuple qui l’a suivit. De plus, il a dû se construire une espace pour gouverner à travers des conquêtes. En effet, l’adhésion de nouveaux territoires conduit à l’adhésion de nouvelles populations, ce qui pose une nouvelle problématique : garantir la permanence de l’unité entre les populations.

Le terme identité est souvent associé à la conscience, puisqu’elle renvoie à la conscience de ce qu’on est, par nous mêmes et par les autres. L’identité franque est d’abord était reconnue par les romains puis adopté progressivement par les francs mêmes.

Nombreux philosophes au cours des années ont défendue qu’on devient conscient de soi qu’à travers les yeux d’autrui. En clair, on se reconnait quelque chose qu’à travers le regard des autres, comme le dit Sartre au sujet de la conscience “on me voit donc je suis”. En effet, l’identification des francs par les romains comme une unité a été essentielle lors de la construction de l’identité franque. Autrement dit, les romains sont ceux qui ont assigné cette identité qui a été assimilé ultérieurement par les francs.

De plus, les francs étaient les seules, parmi les barbares, à ne jamais perdre contact avec leur patrie d’origine, au contraire de tous les autres, déracinés par leur contact avec les romains. Ils étaient divisés en quelques royautés tribales, par exemple, les Francs « saliens » occupaient un territoire situé entre l'embouchure du Rhin et celle de la Somme. Les Francs ripuaires avaient réussi à occuper, la rive gauche du Rhin, à l'est de la Meuse, et la vallée inférieure de la Moselle. Ils possédaient les mêmes origines et parlaient des langues similaires, mais pour la première fois ils étaient tous soumis au même pouvoir lors de la création du Royaume des francs par Clovis. Même s’ils n’avaient pas entièrement conscience de son unité, les francs se sont unis et constituaient le peuple du royaume de Clovis.

D’autre part, la première étape pour construire un royaume est la conquête du territoire à gouverner. En effet, pour garantir la continuité de l’Etat le chef doit protéger son territoire. De plus, le succès militaire d’un chef d’Etat contribue, de même, à la légitimation de son pouvoir.

Clovis, roi de Francs “saliens” supprime les roitelets francs par la ruse, unifiant ainsi son peuple. En 486, Clovis attaque Syagrius, chef de l'armée de campagne de Gaule, le vainc, le chasse et lui enlève Soissons. Cette victoire lui livra sans doute d'un seul coup tout le pays au nord de la Loire, par conquête directe ou par capitulation.

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