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L'encadrement des fidèles catholiques

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Par   •  13 Mars 2019  •  Commentaire de texte  •  11 893 Mots (48 Pages)  •  610 Vues

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L’encadrement des fidèles catholiques France et ouverture européenne : milieu XVIe – milieu XVIIe siècle

Les mots du vocabulaire historique et religieux ne seront pas définis ici. Ce sera pour l’étudiant le moment de se référer au lexique du manuel d’histoire religieuse conseillé dans les séances de TD précédentes.         

 1 )

L’Église entend donner un cadre global à toute la vie des fidèles afin que le passage ici-bas leur permette d’obtenir la vie éternelle. La vie des fidèles dans son ensemble doit être chrétienne : les moments de leur vie, du plus court au plus long, du plus commun au plus solennel ; l’espace de vie ; les pratiques, mots et gestes ; les pensées. Cet objectif de l’Église n’est pas nouveau et ne touche pas l’institution dans son ensemble de la même manière. Au contact des fidèles ne se trouve que le clergé séculier – qui vit avec eux dans le siècle, et quelques religieux. La plus grande partie du clergé régulier, suivant sa règle, vie et prie à part pour le salut des hommes, dans des monastères. Ce clergé séculier est bien sûr le plus nombreux ; parmi eux ce sont les prêtres de paroisse que l’on trouve en masse, dirigés par un évêque, dont le diocèse compte plusieurs paroisses. Ce souci d’encadrer apparaît dans l’étymologie même d’évêque : episcopos, episcopoï, le « berger », le « surveillant » en grec ancien. Le Psaume 23 dit : « l’Éternel est mon berger : je ne manquerai de rien. […] Quand je marche

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dans la vallée de la mort je ne crains aucun mal, car tu es avec moi : ta houlette et ton bâton me rassure ». Les évêques possèdent un bâton de berger, c’est leur crosse, tournée vers l’extérieur – à l’inverse de celle des abbés, qui regarde la vie des moines. L’encadrement du troupeau n’est pas une volonté récente. Cette dernière date au moins des Épitres, au premier siècle chrétien. De cette date à aujourd’hui, l’Église a toujours souhaité encadrer les fidèles dans l’orthodoxie, vers le salut. La défense de cette bonne pratique s’est toujours heurtée à différentes forces. Il y a d’abord le souhait des populations dans leur contexte quotidien, de travail, mental. Les ouailles vivent en majorité à la campagne, même si les villes connaissent un développement. Les fidèles sont ballotés par la vie : la moitié des enfants nés ne parviennent pas à l’âge adulte ; le travail de la terre est ingrat, apportant son lot de misère, les champs donnent peu et certaines années presque rien. Les villes sont dans l’imaginaire collectif, à tort ou à raison, le lieu des débauches, que l’Église ne peut ignorer. Dans un contexte très religieux et ritualisé, la demande d’un bon pasteur est importante. Au-delà, les superstitions – si on peut forcément les prendre pour des béquilles sur le chemin de la mort et pour supporter la vie – existent. Au XVIe siècle, le défi est de taille pour l’Église. En plus des forces millénaires qui partagent le monde entre la bonne et la mauvaise croyance – partage classique dans les cultures juives ou chrétiennes – Rome doit faire face à la Réforme. Si au milieu du siècle les frontières confessionnelles se cristallisent, les réformateurs, Luther d’abord, mais aussi d’autres, n’ont pas d’abord conçu leur action et leur pensée en rupture avec l’Église, toutefois les combats séculiers séparent de Rome une partie de l’Europe. Face aux critiques de la Réforme, conscient du souhait des fidèles et des volontés réformatrices au sein même de l’Église, le haut clergé se réunit au concile de Trente entre 1545 et 1563. Il y a là un tournant, au moins théorique. Un autre tournant intervient au milieu du XVIIe siècle. A partir de ce moment là, les frontières religieuses sont fixées avec la paix de Westphalie en 1648 ; les minorités religieuses s’effacent en partie, par exemple avec l’étranglement à petit goulée des protestants en France, jusqu’à la révocation de l’édit de Nantes de 1685 ; ailleurs, il y a cette mesure méditée puis prise, en 1680, par le parlement de Paris d’évoquer devant lui les accusation de sorcellerie pour éviter aux condamnés le bûcher, y substituant des peines de bannissement. Ce long siècle peut prendre le nom de temps des confessions : les Églises, Église catholique ici, se constituent alors en des systèmes dogmatiques et institutionnels qui s’harmonisent et se referment. Sur la lancée du concile, l’Église entend proposer un modèle rénové d’encadrement. Que signifie cette (re)prise en main ? C’est alors une analyse du haut vers le bas, mais sans perdre de vue les ratés, mais aussi la réception et ses limites ; d’abord dans la volonté de l’Église de proposer un modèle de vie, au sein de la paroisse comme cadre, en soutenant et contrôlant les dévotions populaires.

I. Volonté de l’Église de proposer un modèle A. Discours sur l’encadrement

1. Au concile de Trente Le concile est très attaché à un passage des Lamentations de Jérémie (4, 4) : « Les enfants ont demandé du pain, et il n’y avait personne pour leur en donner », ou encore Luc (4, 4 et 24, 19). Lors de la Ve session est pris un décret sur la prédiction, principal devoir des évêques : « Évêques, archevêques, primats et autres préposés à la conduite des églises, seront tenus et obligés de prêcher eux-mêmes le saint Évangile de Jésus-Christ. En cas de légitime empêchement, ils mettront en leur place des personnes capables de s’acquitter utilement, pour le salut des âmes,  de cet emploi de prédication. Si quelqu’un méprise cette obligation, qu’il soit soumis à un châtiment rigoureux »

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« Les archiprêtres aussi, les curés et tous ceux qui ont obtenu, de quelque manière que ce soit, des églises paroissiales ou autres ayant charge d’âmes, auront soin, au moins les dimanches et fêtes solennelles, de pourvoir, par eux-mêmes ou par d’autres personnes capables, s’ils en sont légitimement empêchés, à la nourriture spirituelle des peuples qui leur sont commis, selon leur statut et la capacité de leurs auditeurs. » Assurément un tel souhait n’est pas neuf dans l’Église : le canon 10 du concile de Latran IV – déjà ! – rappelait cette obligation. La nouveauté au milieu du XVIe siècle est la présence d’Églises concurrentes, dont le souci de répandre la Parole est tout aussi important.  Seul un clergé rénové est capable de mener à bien une telle entreprise, en commençant par le haut clergé, c’est-à-dire les évêques. Afin de conduire convenablement l’Église, les évêques doivent être consciencieux, nés de mariages légitimes, menant une bonne vie et doctrinalement en accord avec Rome. A ce propos, la principale question tient à la résidence des évêques dans leur diocèse, et non plus à la cour pontificale ou dans quelque cour royale, bien loin de leur troupeau, de leur devoir d’administrer et de guider leur clergé. Sans être catégorique, le concile insiste sur l’importance de la résidence. Mais, mêmes présents les évêques n’ont plus guère d’autorité sur leur diocèse depuis le milieu du Moyen-Âge. Il est rare les évêques et archevêques choisissent plus de 10% des curés de paroisse de leur diocèse (7% pour l’archevêques de Bourges, 6% à Évreux etc.). Chaque fois, l’ordinaire doit s’incliner devant le patronage des laïcs ou des monastères sur telle et telle paroisse. Les chanoines, les religieux, possèdent, eux, de nombreuses exemptions, parfois millénaires, qui les soustraient à la juridiction et au contrôle de l’ordinaire. Comment donc mener une réforme du clergé ? Le concile entend rétablir l’autorité de l’évêque dans son diocèse, en lui conférant le statut de « délégué du Siège Apostolique ». Par quelques mesures concrètes le pouvoir épiscopal reprend de la vigueur. Un religieux ne peut prêcher dans une église sans l’accord de l’évêque ; l’évêque peut faire la visite des abbayes ; pareillement, chaque paroisse du diocèse doit être régulièrement visitée, même celles qui sont « exemptes ». Quant à l’ordination des prêtres, l’évêque doit examiner les candidats et n’ordonner que les plus « capables ».

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