La Verite
Analyse sectorielle : La Verite. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar loth • 1 Mai 2015 • Analyse sectorielle • 4 376 Mots (18 Pages) • 607 Vues
La vérité
Les enjeux de la notion – une première définition
Approcher le problème de la vérité suppose en premier lieu de briser l’identification « non philosophique » entre vérité et réalité. Nous avons tendance à juger que ce qui est vrai est ce qui est réel. Pourtant, on ne peut qu’admettre la différence suivante : supposons que je regarde le soleil, je dirai sans hésitation qu’il est réel ; mais quel sens y aurait-il à dire que le soleil est vrai ? Lorsque j’affirme que quelque chose est réel, je ne fais rien d’autre que reconnaître son existence. La vérité semble exiger autre chose qu’une telle reconnaissance. Dans notre exemple, ce n’est pas le soleil lui-même qui peut être dit vrai ou faux mais notre représentation ou notre jugement : si je dis « cela est le soleil » en désignant la lune, alors mon affirmation sera fausse tandis que si je désigne le soleil elle sera vraie. La distinction de la vérité et de la réalité se dévoile encore si l’on reprend un exemple de Descartes : en effet, nous pouvons avoir en notre esprit des représentations qui ne sont qu’imaginaires (ex : la représentation d’une Chimère) donc fausses car ne renvoyant à rien d’existant en dehors d’elles, et qui pourtant ont une certaine réalité en tant qu’elles sont bien des choses dans notre esprit. Ayant ainsi explicité la différence de la vérité et de la réalité, il n’en faut pas pour autant conclure que ces deux concepts sont sans rapports aucun. C’est même autour de la question de ces rapports que s’affrontent les différentes conceptions de la vérité. On peut en effet prendre comme critère de vérité d’un jugement sa conformité avec la réalité. C’est la thèse de la vérité-correspondance. Inversement, on peut penser que la vérité se définit avant tout par la cohérence de la pensée avec elle-même, l’accord qu’elle manifeste entre ses différentes assertions. Étant donné notamment l’abîme ontologique qui sépare une idée d’une chose, la conformité du rapport de la pensée à la réalité ne peut être évalué immédiatement. C’est la thèse de la vérité-cohérence. Les différentes théories de la vérité que nous allons à présent exposer se distribuent assez bien autour de ces deux pôles sans toutefois s’y réduire dans la mesure où elles fournissent chacune des contributions originales qui ne se laisse enfermer dans aucun modèle prédéfini.
La vérité métaphysique
« il est absolument nécessaire que Dieu ait en lui-même les idées de tous les êtres qu’il a créés, puisque autrement il n’aurait pas pu les produire, et qu’ainsi il voit tous ces êtres en considérant les perfections qu’il renferme auxquelles ils ont rapport (…) il est certain que l’esprit peut voir en Dieu les ouvrages de Dieu, supposé que Dieu veuille bien lui découvrir ce qu’il y a dans lui qui les représente. » Malebranche, De la recherche de la vérité.
Débutons en exposant la conception métaphysique (dogmatique) de la vérité, dont il faut reconnaître qu’elle n’est pas étrangère à la diffusion de la confusion de la vérité et de la réalité. En effet, Platon pense la vérité comme indépendante de la pensée et du discours. Il y a selon lui une réalité vraie qui ne s’oppose pas tant à une « réalité fausse » qu’à une réalité dégradée et aux apparences qui la constituent. Le monde sensible, auquel nous sommes attachés en raison de notre corporéité, est un monde ayant un faible degré de réalité en ce sens qu’il est peuplé de copies des Idées intelligibles. Or ce sont bien ces dernières qui constituent la vérité et cette vérité n’est pas une propriété de la pensée mais bien un autre être, un autre monde, le monde des Idées. Chez Platon, la vérité ne s’accorde pas simplement avec la réalité, c’est elle-même qui est érigée en réalité, absolue, immuable, éternelle. La pensée grecque du logos, en tant que désignant simultanément le discours vrai et l’être ou réalité révélé dans le discours, est à la source d’une telle identification de la vérité et de la réalité chez Platon.
On retrouve une conception analogue dans le christianisme dans lequel est posée l’identité de Dieu et de la vérité (plus encore le dogme même de la Création semble indiquer que toutes les choses sensibles reflètent l’archétype divin). Les réflexions de Descartes et Malebranche sur la nature des idées ne sont pas étrangères à cette conception. Pour Descartes, les idées claires et distinctes, vraies (idées qui sont des créations de Dieu), représentent immédiatement des natures simples, autrement dit des réalités : c’est le cas par exemple de l’idée d’étendue (l’étendue étant constitutive de la réalité matérielle) et de l’idée de pensée (la pensée étant constitutive de la réalité spirituelle). Malebranchequant à lui pense que puisque les idées sont éternelles et immuables, elles ne peuvent résider que dans un être qui possède lui aussi ces prédicats, c’est-à-dire Dieu. L’esprit humain est incapable de faire naître de telles idées par lui-même (seul un orgueil démesuré peut le faire même) ; il ne possède donc pas ces idées ; chaque fois qu’il s’y rapporte, c’est en réalité qu’il les contemple en Dieu ; c’est la célèbre thèse de la vision en Dieu.
Idées, propositions, réalité
« La première signification donc de Vrai et de Faux semble avoir tiré son origine des récits ; et l’on a dit vrai un récit quand le fait raconté était réellement arrivé ; faux, quand le fait raconté n’était arrivé nulle part. Plus tard, les Philosophes ont employé le mot pour désigner l’accord d’une idée avec son objet ; ainsi, l’on appelle idée vraie celle qui montre une chose comme elle est en elle-même ; fausse celle qui montre une chose autrement qu’elle n’est en réalité. » Spinoza, Pensées métaphysiques.
La nature de l’idée, en tant que représentant formellement une chose qu’elle n’est pas, rattache cependant Descartes et Malebranche à une pensée qui n’est plus celle de l’identité entre vérité et réalité mais celle de la conformité de l’idée à la chose : « aedequatio rei et intellectus » écrit Saint-Thomas. Cette formule a l’avantage de souligner l’écart qui sépare la représentation ou la proposition de la réalité,
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