Les Historiens Et Les Memoire De La 2nde Guerre Mondial
Mémoire : Les Historiens Et Les Memoire De La 2nde Guerre Mondial. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dougie12 • 12 Mai 2013 • 2 420 Mots (10 Pages) • 959 Vues
Alors que l’histoire entretient avec le passé un rapport qui se veut objectif, la mémoire peut être définie comme le rapport subjectif qu’un individu ou groupe (catégorie de victimes, parti politique, nation…) entretient avec le passé ; tandis que le récit historique est fondé sur la recherche de la vérité, la mémoire produit un discours subjectif (officiel ou partisan) et elle est sélective (oubli ou occultation de certains faits). Les mémoires de la Seconde guerre mondiale sont influencées par le traumatisme qui en a résulté pour les Français avec la défaite totale de 1940, l’armistice, la collaboration, les persécutions politiques et raciales. Malgré l’épuration (jugement des collaborateurs) à la fois douteuse dans la violence des premières semaines et partielle dans les mois et années qui suivirent, la blessure est restée douloureuse pour les générations qui avaient vécu la guerre. Comment évoluent les mémoires de la Seconde guerre mondiale en France ? Le point de vue sur les années 1940-1944 est d’abord dominé par la mémoire de la Résistance. Il se transforme dans les années 1970 avec le réveil de la mémoire juive et un nouveau regard sur le régime de Vichy. Depuis les années 1990, la responsabilité de l’Etat français dans la déportation des juifs fait l’objet d’un « devoir de mémoire » envers lequel les historiens prennent leurs distances.
I) Le mythe résistancialiste (1944-1969)
Le résistancialisme, concept forgé par l’historien Henri Rousso, désigne le mythe politique selon lequel la France aurait été, hormis quelques traîtres, unanimement résistante sous l’Occupation. Ce
mythe est diffusé à la fois par les gaullistes et par les communistes. Il conduit à occulter le régime de Vichy et la collaboration.
1) Le mythe de la France résistante
Le général de Gaulle, chef de la Résistance, est en grande partie à l’origine de ce mythe. Dans son discours du 25 août 1944, (Discours du 25 août 1944, 0 à 1min15) il affirme que Paris s’est « libéré par son peuple avec le concours de la France tout entière » alors que 2% seulement des Français ont participé activement à la Résistance. Pour lui, cette « France qui se bat » (Résistance) est la « seule France, la vraie France, la France éternelle » ; donc le régime de Vichy ne serait qu’une « parenthèse » dans l’histoire de la France alors que la France libre aurait incarné la continuité républicaine entre 1940 et 1944. La première décision du GPRF en 1944 est d’ailleurs de déclarer « nulles et sans effet » toutes les lois de Vichy. Pour de Gaulle, c’est un moyen d’affirmer sa légitimité à gouverner au lendemain de la Libération. Il s’agit également de rétablir l’unité nationale en mettant un terme à la « guerre franco-française » entre les forces qui ont soutenu Vichy et celles qui ont soutenu la Résistance. Cette vision est acceptée par une grande partie de l’opinion qui souhaite oublier les « années noires », surtout que la participation des FFL à l’invasion de l’Allemagne en 1945 fait de la France résistante un pays victorieux.
Le mythe résistancialiste est également entretenu par le parti communiste qui se présente dans l’après-guerre comme « le parti des 75 000 fusillés », allusion aux résistants exécutés par les nazis ou la Milice de Vichy, dont le nombre s’élève en réalité à 30 000 et ne comprend pas que des communistes. Il s’agit pour le PCF d’affirmer son rôle-clé dans la Résistance intérieure, tandis que les gaullistes valorisent l’action militaire de la France libre dirigée par de Gaulle. Les deux mémoires sont d’ailleurs rivales : les gaullistes
dénoncent le fait que le PCF n’est entré en résistance qu’à partir du moment où l’URSS a été attaquée par Hitler en 1941 alors que de Gaulle était un résistant de la première heure.
Le résistancialisme gaulliste triomphe avec le retour au pouvoir de de Gaulle en 1958. Le souvenir de la Résistance est alors réactivé en vue de raffermir l’unité nationale mise à mal par la guerre d’Algérie. L’héroïsation de la Résistance culmine en 1964 avec le transfert au Panthéon des cendres de Jean Moulin.
Etude critique d’un document – Discours d’André Malraux, avec notices sur Panthéon, Jean Moulin, André Malraux + fiche-méthode
2) L’occultation des responsabilités du régime de Vichy
La volonté de réconciliation et le retour sur la scène politique des partis de droite, discrédités dans l’immédiat après-guerre pour avoir soutenu Vichy, entraînent le vote de lois d’amnistie annulant les inculpations de certains collaborateurs. (graphique prisonniers) La loi de 1947 réduit de 40 000 à 13 000 le nombre de personnes emprisonnées pour collaboration, et celles votées en 1951 et 1953 mettent fin à l’épuration en libérant les derniers prisonniers.
Parallèlement, certains tentent de réhabiliter la mémoire de Vichy (brochure Pétain). A la mort de Pétain en 1951, l’Association pour défendre la mémoire du maréchal Pétain (ADMP) réclame la révision de son procès de 1945 (condamnation à mort commuée en prison à vie par de Gaulle) et le transfert de ses cendres à l’ossuaire de Douaumont, monument commémoratif de la bataille de Verdun. En 1954, l’historien Robert Aron publie une Histoire de Vichy dans laquelle il reprend la « thèse du glaive et du bouclier ». C’est sur cette thèse que Pétain avait fondé sa défense en 1945 : tandis que de Gaulle aurait été l’épée de la France en poursuivant la lutte depuis l’étranger, Pétain aurait été le bouclier des Français en signant l’armistice pour éviter un désastre total. Il n’aurait
accepté la collaboration qu’avec un « poignard sur la gorge ». Cette histoire de Vichy restera une référence jusque vers 1970.
II) La fin du mythe (années 1970-1980)
Une génération après la fin de la Seconde guerre mondiale, la vision des années noires se transforme : le mythe d’une France résistante s’effondre et la mémoire du génocide juif s’affirme.
1) La remise en cause du résistancialisme
Cette remise en question se produit dans un contexte nouveau : la génération du baby-boom, qui n’a pas connu la guerre, arrive à l’âge adulte ; le climat politique et intellectuel est imprégné de l’esprit contestataire de mai 1968 ; de Gaulle démissionne en 1969 et meurt en 1970.
Le mythe résistancialiste est d’abord brisé par la sortie en 1971 du film de Marcel Ophuls sur l’Occupation,
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