Qu'est-ce que l'islamisme d'Al-Qaïda ?
Cours : Qu'est-ce que l'islamisme d'Al-Qaïda ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Aélys Jesset • 15 Octobre 2023 • Cours • 2 924 Mots (12 Pages) • 242 Vues
HGGSP Lebrat Jules, Briard Mina, Jesset Aélys
Jalon 2 : Les guerres irrégulières au XXIᵉ siècle, une nouvelle forme de conflictualité dans un monde nouveau.
Sujet : Qu’est-ce que l’islamisme d’Al-Qaïda ?
Al-Qaïda est un mouvement djihadiste qui place le terrorisme au centre de sa stratégie de guerre. Le mot « terrorisme » a une longue histoire tout comme le terrorisme lui-même. Au XIXᵉ siècle il désigne un usage de la violence par des mouvements politiques contestataires. Ces actes terroristes s’inscrivent pour Al-Qaïda dans le courant d’une doctrine que l’on appelle l’islamisme, prônant l’islam comme une idéologie politique et visant à rassembler l’ensemble des musulmans autour d’un projet socio-politique fondé sur les normes et lois religieuses que constitue la charia. L’organisation terroriste a été créée en 1987 par le cheikh Abdullah Yusuf Azzam et son élève Oussama Ben Laden dans la banlieue de la ville pakistanaise de Peshawar. Après la première guerre d’Afghanistan, la chute du régime prosoviétique dans les années 1990 entraîne de fortes tensions entre moudjahidines afghans, talibans soutenus par le Pakistan et volontaires islamistes étrangers. C’est dans ce contexte de guerre civile que naît « La Base », terre d’entraînement pour mener la guerre sainte contre l’Occident.
Mais alors qu’est-ce qu’est vraiment l’islamisme d’Al-Qaïda ?
Dans un premier temps nous traiterons de ce qu’est l’islamisme, nous nous pencherons ensuite sur la vision qu’Al-Qaïda en a, enfin nous verrons les évolutions dans sa conception et sa pratique.
I. L’islamisme : une complexe pluralité
Avant de se pencher sur le cas complexe d’Al-Qaïda, il est essentiel de maîtriser la notion d’islamisme et les différentes formes qu’il peut prendre.
L’islamisme est une idéologie qui part du constat du recul de la place de l’islam dans les sociétés musulmanes. Cela correspond à une volonté de rendre la société et l’État conforme à la charia, la loi coranique. Le contenu précis de la charia et les moyens utilisés pour la mettre en œuvre peuvent prendre des formes différentes à travers le monde musulman. Outre la scission entre sunnisme et chiisme, on distingue deux « niveaux » de pratique de l’islamisme : l’islamisme modéré, dit aussi conservateur et l’islamisme radical dont les idéologies, les réinterprétations politico-religieuses et les stratégies de conquête divergent.
L’islamisme modéré privilégie une réislamisation des mœurs et de la législation, mais peut accepter des compromis, certains aspects démocratiques et reconnaître la légitimité des pouvoirs en place. L’islamisme radical prône une rupture violente avec l’ordre établi et un endoctrinement autoritaire et intolérant. Les régimes institués et les « valeurs occidentales » qui les ont « contaminés » sont condamnés à disparaître et l’ennemi à combattre n’est pas seulement le « croisé » ou l’« infidèle » mais également le musulman jugé trop tiède. Les bases sociales sur lesquelles s’appuient islamisme modéré et radical ne sont pas non plus identiques. Tandis que l'islamisme modéré parvient à s’implanter dans les milieux défavorisés par ses œuvres caritatives et séduire les classes moyennes, l'islamisme radical tend davantage à trouver un écho favorable auprès d’une jeunesse urbanisée, souvent marginalisée, même si certains de ses cadres peuvent être diplômés. L’islamisme n’est donc pas unique, il se décline en de nombreux mouvements, plus ou moins radicaux.
En Arabie Saoudite et au Qatar par exemple, les monarchies au pouvoir s’appuient sur une première mouvance particulièrement rigoriste et puritaine de l’islam : le wahhabisme. Développé au XVIIIᵉ siècle dans le désert du Nejd par Mohammed ben Abdelwahhab, le wahhabisme est un courant fondamentaliste dérivé du Hanbalisme l’une des quatre écoles juridiques de l’islam sunnite. Il exclut toute innovation et interprétation du Coran et exige du souverain en place une application littérale de la charia. Même si les États tentent aujourd’hui de desserrer l’étau des religieux sur la société, les wahhabites restent majoritaires dans ces pays et cela s’étend même largement au-delà des frontières nationales notamment à travers l’action de la Ligue Islamique Mondiale. Créée en 1962 à La Mecque, elle encourage la mission de conversion sur tout le continent et à travers le monde entier.
Hors de la péninsule arabique, le wahhabisme saoudien se confond souvent avec un autre courant islamiste : le salafisme. Comme le précédent, ce courant prône l’imitation des « Salaf », les pieux ancêtres, c’est-à-dire les premiers compagnons du prophète et les quatre premiers califes qu’on appelle alors « Rachidun », les « biens guidés ». Le projet politique des salafistes vise d’ailleurs au rétablissement du califat, c’est-à-dire la réunion de tous les musulmans dans un seul et grand état islamique, mais là encore plusieurs voix peuvent être distinguées. Certains salafistes d’abord, s’appuient sur la prédication et sont ainsi qualifiés de quiétistes ; d’autres à l’inverse privilégient l’action politique et la participation au pouvoir ; d’autres enfin rêvent d’une révolution armée et valorisent le Djihad, la « guerre sainte », souvent assimilé au terrorisme le plus brutal. C’était le cas notamment de Sayyid Qtub un idéologue égyptien et théoricien du djihad armé, violemment antisémite, anti occidental et anti moderniste, condamné à mort au Caire en 1966. Le salafisme djihadiste de ce dernier a notamment inspiré le saoudien Oussama Ben Laden, qui a créé Al-Qaïda dans les camps de Peshawar au Pakistan, pendant la guerre d’Afghanistan.
Si l’ambition d’un rétablissement du califat se fait clairement ressentir chez les partisans du salafisme, il reste aussi la principale réclamation d’un autre mouvement islamiste : le panislamisme. Il s’agit d’une islamisation du panarabisme, mouvement particulièrement séculier d’ordre politique, culturel et idéologique qui vise à unifier les peuples arabes en les réunissant pour revendiquer l’identité arabe. Le panislamisme, c’est donc la réclamation d’une union de toutes les communautés musulmanes dans le monde, ainsi que des territoires dit « musulmans », sous la direction d’un seul et unique calife. Cette idéologie née à la fin du XIXᵉ siècle appelle donc à l’harmonie entre les différentes cultures et États musulmans. Il est perçu comme un mouvement de « libération et de restauration » des musulmans face à la colonisation et à la domination occidentale.
L’islamisme serait né en Égypte avec les Frères Musulmans, à une période où le Proche et le Moyen-orient étaient sous domination européenne. Il s’agissait en premier lieu d’une réaction à l’occupation britannique. Puis, progressivement, les Frères musulmans ont réclamé l’application de la charia, la loi islamique. La société des Frères musulmans a été créée en 1928 en Égypte par Hassan al-Banna qui est rapidement devenu un acteur incontournable de la vie politique. Son objectif initial était de promouvoir le retour à l’islam « vrai » au sein de la société. La confrérie était d’abord sociale avant de devenir politique, elle développait et développe toujours une importante présence associative sur le terrain afin de promouvoir la renaissance islamique. Son développement passe par une « islamisation par le bas », c’est-à-dire par des actions sociales qui touchent l’ensemble de la population. Cette organisation bénéficie aujourd’hui de succursales dans presque tous les pays arabo-musulmans devenus des acteurs importants de la scène politique à partir des années 1990 (création du Hamas, mouvement de la Sahwa en Arabie saoudite, parti politique au Yemen et au Koweït, etc.) et lors des Printemps arabes qui leur ont permis d’accéder au pouvoir notamment en Tunisie et en Égypte. L’objectif ultime des Frères Musulmans repose sur un projet d’expansion. En Europe, ils défendent des positions politiques et sociales qui doivent transcender les appartenances nationales d’origine. Les Frères musulmans, véritable société islamiste terroriste, est l’exemple le plus parlant de ce qu’est le panislamisme. L’organisation a pour principal objectif l’instauration de républiques islamiques dans les États musulmans en s’opposant fermement aux courants laïques de ces nations à majorité musulmane. Il préconise également un retour strict aux préceptes du Coran, ce qui implique un rejet systématique des influences occidentales.
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