L'image.

Le pouvoir de l’image est terrible car il influence directement nos choix et nos prises de décision. En architecture, comme dans d’autres disciplines, l’image est omniprésente. Plus un rendu de concours sans représentations 3D, plus une agence d’architecture sans infographistes. Notre vieux crayon a fait son temps. Au Maroc, encore plus qu’en France, l’architecture se

construit par l’image. Jamais au cours de mon année de mise en situation professionnelle je n’ai vu une maîtrise d’ouvrage s’attarder sur un plan, une coupe ou une façade. Sans doute trop complexes, pas assez lisibles, pas assez compréhensibles. L’image, au contraire, est accessible à tous. Elle fait réagir, suscite des émotions, transcende parfois. Un maître d’ouvrage, avec qui nous travaillons, m’avouait un jour : «je n’ai jamais appris à lire un plan mais j’ai appris à voir. Les images, ça me parle. Elles me permettent de juger de la qualité d’un projet et donc d’arbitrer».Je comprenais à cet instant pourquoi les patrons paissaient plus de temps derrière les infographistes qu’avec les chefs de projets à discuter des fondamentaux du projet. Par manque de temps. Mais cette course à la production d’images est dangereuse. D’une part, parce qu’elle se fait au détriment de la recherche conceptuelle et de la qualité architecturale du projet, d’autre part parce qu’elle devient le premier critère de sélection des projets. Quel architecte n’a pas perdu un jour un concours, non pas parce que son projet n’était pas le meilleur, mais que l’image du projet de son concurrent était plus séduisante aux yeux du client ?

Cette image est pourtant trompeuse. L’infographiste le sait trop bien, parce qu’elle n’est en fait qu’une vision idéalisée d’un projet, souvent très loin de la réalité. Et l’exposer comme une représentation exacte du projet ressort en fait de la manipulation et du mensonge. Est-il alors possible de réfléchir à la production de documents plus clairs accessibles au plus grand nombre ? Le défi est lancé aux agences audacieuses.

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