Le Design
Compte Rendu : Le Design. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar ravelofarah • 16 Février 2015 • 5 722 Mots (23 Pages) • 654 Vues
Le Design : Comme toute chose : tout ce qui a été construit et fabriqué en série depuis deux siècles, ce qui forme les configurations spatiales que nous nommons environnements industriels : le territoire national, la ville, le foyer, la télévision, les jeux vidéo, Internet. Ces mondes, ces espaces de référence où la conscience réside et s’identifie, sont pensés le plus souvent comme dépendants des intérêts humains, comme issus d’une technique qui nous dépasse ; il n’en est rien : les intérêts humains sont une constante historique, et si les révolutions techniques sont des évènements historiques majeurs, la technologie, discours sur la technique, n’est jamais que son argument de vente. Le Design est l’art de l’information de l’espace, l’art qui a défini l’ère industrielle, dans laquelle nous vivons depuis deux siècles, l’art par lequel se réalise la liberté civique, l’épanouissement du citoyen, mais aussi la détermination sociale et technique qui contraint nos vies quotidiennes. Le monde industriel, et les mondes virtuels qui en sont issus n’ont d’autre finalité que de libérer l’Homme des contraintes matérielles qui pèsent sur son existence, et ce sont les formes, la configuration que ces mondes adoptent, qui déterminent leur efficace. L’Histoire industrielle est l’Histoire du Design, l’Histoire de l’évolution de la forme de la production industrielle, l’Histoire de son esthétique. L’emploi courant du terme de « Design » est généralement ambigu. S’agit-il d’un style ? De ce qui sert { meubler en général, le discours que l’on porte sur les objets qui nous entourent ? Habituellement, c’est { cela qu’il se résume : au style technologique et au discours que l’on porte sur les objets utilitaires. La trivialité de ces objets, qui servent, 5 qui sont donc serviles n’en fait pas a priori un sujet de philosophie, mais un argument de vente. Or ce que nous entendons en français par Design, l’esthétique industrielle ou utilitaire, est effectivement un sujet que la philosophie doit aborder, puisque celle-ci décrit le rapport du sujet pensant à son monde, et que ce rapport ne saurait se comprendre sans le Design. Le sophiste grec Protagoras (480-408 avant J.C.), prétendait que l’homme est la mesure de tous les biens1 . Si nous ne nous adonnons pas ici { autre chose qu’{ une chrématistique, une évaluation de la valeur des biens pour l’homme, il est évident que le rapport souligné par le sophiste s’est renversé : ce sont ses biens qui définissent l’homme dans la société industrielle. Cependant le Design, entendu ici comme l’ensembles des biens { caractère utilitaire, s’il tient une place assurément importante dans la vie du consommateur, puisqu’il est le moyen par lequel il se détermine socialement, a une existence en propre, qu’il s’agit de définir. Le Design est d’abord ubique, il est tout notre environnement matériel, tout ce qui nous entoure. Dans les pays dits « industrialisés », nous ne vivons plus au contact de la nature, et même les derniers agriculteurs travaillent avec des machines, qui soulignent le rapport de rationalisation et de mise { profit de l’espace naturel. Le Design est l’environnement industriel, et les seuls endroits sur terre qui n’en sont pas, sont les forêts, les réserves naturelles, les terres incultes, les pôles inaccessibles, la mer, l’espace : endroits déserts, où l’habitat n’est pas, d’une façon ou d’une autre, souhaitable. Les champs, les villes, les zones industrielles, l’espace virtuel de la télévision et des ordinateurs personnels, sont des environnements industriels, conçus par et pour l’homme : ce sont les horizons, les mondes que l’homme s’est créé grâce { la production industrielle, et dans lesquels il a vocation à se déterminer, à décider de ce qu’il est et de ce qu’il désire. Ce que nous appelons alors Design est la forme de ces environnements, ce par quoi ils se définissent ; mais avant tout, il nous faut comprendre un fait essentiel. La forme que nous donnons à notre monde par le moyen de la production industrielle, ce qu’est le Design, est ce que nous décidons de ce que le monde est pour nous. Et cela 1 Les penseurs grecs avant Socrate, par Jean Voilquin, Garnier, Paris, 1964, p. 203.6 ne date pas simplement de l’institution de la « société de consommation », d’un ordre social fondé sur la démocratisation du crédit, l’omniprésence de la publicité et l’équipement des masses. Depuis que la production industrielle est apparue, qu’elle est devenue historiquement pertinente, en permettant aux citoyens américains puis français de gagner et de conserver leur citoyenneté en s’équipant de fusils et de canons, elle n’a cessé de donner forme au monde réel, de l’informer. Elle a produit la ville industrielle, accueillant une population croissante, ce qui fut un premier environnement industriel, un premier monde. Vint ensuite la télévision, premier espace virtuel, puis la démultiplication des espaces virtuels avec les jeux vidéo et l’internet. Nous définissons ces environnements comme mondes, car ils constituent les horizons de la conscience, le tout à partir de laquelle elle se définit. Cette capacité de la production industrielle à produire des mondes pour la conscience individuelle, est une démiurgie, à la fois création de monde au sens courant, et travail pour le peuple au sens étymologique. Cette démiurgie est dépendante de la forme qui lui est imprimée, qui est son essence, sa véritable nature par-delà les vicissitudes : le Design. Dès lors, si l’Histoire du monde depuis 1789, date de l’indépendance américaine et de la prise de la Bastille, est l’Histoire de la production industrielle, l’Histoire industrielle, elle est directement l’Histoire de la forme que prend cette production : l’Histoire industrielle est l’Histoire du Design. Les termes de « Design » En France, nous employons le terme anglophone de « Design » pour signifier esthétique industrielle ou utilitaire. Design ne signifie rien d’autre que « dessein », par opposition à « drawing », le dessin, le fait de tirer des traits, « to draw ». « Design » implique donc de signifier, de désigner, et d’autre part de projeter. La distinction entre « Design » et « drawing », se situe en fait entre sens propre et figuré, de la même façon que l’homophonie française entre dessein et dessin, mais il est nécessaire de souligner que cette distinction recèle une unité de sens : il faut concevoir matériellement pour projeter et réciproquement. Les objets du Design sont des objets conçus par le dessin 7 et réalisés matériellement, par et pour l’humanité ; il y a là une dialectique de la projection : l’objet est conçu, puis produit et enfin diffusé ; il y a là aussi une dialectique historique : l’ensemble
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