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L'article de Benveniste

Dissertation : L'article de Benveniste. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  16 Mai 2013  •  Dissertation  •  4 416 Mots (18 Pages)  •  906 Vues

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L'article de Benveniste qui pose la distinction entre les deux registres d'énonciation de l'histoire (souvent rebaptisée récit, non sans quelques conséquences fâcheuses) et du discours est l'un de ceux qui ont suscité le plus de commentaires et de critiques. Par le caractère absolument tranchant de la distinction - tout ce qui n’est pas discours est histoire, et inversement - il se prête effectivement à des interrogations. Le but de l'auteur est de répondre notamment à trois questions :

1) Comment Benveniste conçoit-il le « présent historique », contre-exemple traditionnel des opposants à la distinction de l'histoire et du discours ? La réponse tient dans la notion, à vrai dire implicite chez Benveniste, de « métaphore énonciative ».

2) Qu'en est-il au juste du statut aspectuel de l'aoriste, forme simple qui, à ce titre, relève en principe du non accompli, alors que beaucoup de ses emplois semblent relever de l'accompli ? Il faut ici, pour expliquer les effets de sens d'accompli, faire intervenir deux autres couples aspectuels (Iimitativité/non limitativité, perfectivité/imperfectivité).

3) La distinction des deux registres est-elle valable simplement pour le français contemporain ? Ou a-t-elle une portée universelle ? Il convient ici de se garder de confondre l'opposition elle-même avec les phénomènes morphologiques, nécessairement divers, auxquels elle donne lieu selon les langues et même les états successifs d'une même langue.

Plan

Le problème du présent historique

Le problème de l'aoriste comme forme de non-accompli

Une distinction universelle ?

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Texte intégral

• 1 L'article a été originellement publié dans le Bulletin de la Société de linguistique de Paris, t. L (...)

• 2 Le responsable — on remarquera que je ne dis pas le coupable — de cette substitution semble bien êt (...)

1L'article de Benveniste sur « Les relations de temps dans le verbe français » (19591,1966) est, à n'en pas douter, l'un de ceux qui ont pris le plus d'importance non seulement dans le champ de la lin¬guistique mais encore dans celui des études littéraires. La célèbre distinction entre les deux « plans d'énonciation » que sont le discours et l'histoire (celle-ci est souvent rebaptisée récit par les commenta¬teurs et utilisateurs2) est passée dans la pratique quotidienne de très nombreux ensei¬gnants, linguistes et peut-être plus encore littéraires. Au point qu'il faut souvent en venir à mettre en garde les étudiants, par exemple au niveau de l'agrégation, contre une utilisation trop constante et trop simpliste de la distinction. On sait par ail¬leurs qu'elle a souvent donné lieu, sur le plan scientifique, à des cri¬tiques plus ou moins virulentes. Je pense notamment — sans les mettre sur le même plan — à celles de Weinrich dans Le Temps (1973)et à celles de Cervoni dans son petit ouvrage sur L'énonciation (1987).

2C'est un fait que l'article de Benveniste, en dépit d'une transpa¬rence apparente absolue, pose de nombreuses difficultés. Pour in¬troduire le problème, j'en signalerai une : le caractère catégorique, absolument tranchant de la distinction entre l'histoire et le discours. L'énoncia¬tion comporte deux « plans », et deux plans seulement. Tout ce qui n'est pas histoire est discours, tout ce qui n'est pas discours est his¬toire — sur le modèle de la prose et des vers dans le Bourgeois gen¬tilhomme (et ailleurs…). Ici, je ne cite pas, je com¬mente, mais d'une façon, je crois, fidèle. En effet, Benveniste écrit, après avoir défini le plan his¬torique de l'énonciation :

« Nous avons, par contraste, situé d'avance le plan du discours » (1966, p. 241).

3On ne saurait mieux formuler l'idée que l'histoire et le discours se définissent par leur opposition réciproque, de façon absolument tranchée. Certains commentateurs, comme Cervoni (1987, p. 53-54), font de ce caractère catégorique de l'opposition un objet de critique. Il y aurait lieu de s'interroger sur les fondements théoriques d'une critique de ce genre : est-il évident qu'une distinction est discutable parce qu'elle est tranchante ? Je me contenterai de poser le problème. Non toutefois sans ajouter que la distinction, effectivement dépour¬vue de « sous-systèmes intermédiaires », n'a cependant pas pour effet de répartir les réalisations linguistiques — les discours, en quelque sorte, puisque le mot, chacun l'a remarqué, a deux sens chez Benveniste — en deux classes absolument étanches. Benveniste en effet prévoit de façon absolument explicite deux types de relations entre les deux plans d'énonciation de l'histoire et du discours :

1.

o 3 Précisément 6, si on se fie à l'enquête publiée, en juillet 1963, par Henri Yvon, sous le titre «Le (...)

Le premier type est décrit par une phrase d'une brièveté la¬pidaire : « Dans la pratique, on passe de l'un à l'autre [comprendre : de l'un des deux plans à l'autre] instantanément » (p. 242). C'est cette « instantanéité » du passage de l'un à l'autre qui en explique la facilité et, par là, rend compte du fait qu'il est, somme toute, assez rare qu'un texte relève longuement et continûment du discours ou de l'histoire. Benveniste fait allusion, très brièvement (p. 244), au texte de L'étranger de Camus. On se souvient que, de façon délibérée, Camus a pris le parti de rester constamment dans le registre du dis¬cours : on sait l'effet insolite — la présence constante du sujet d'énonciation — qui est ainsi produit. On sait aussi que Camus n'a pas réussi à tenir le pari du passé composé de façon absolument constante : il a laissé échapper quelques passés simples3, traces in¬contestables d'énonciation historique. Quelle meilleure preuve de l'instantanéité du passage d'un registre énonciatif à l'autre ? — S'il est possible, à ce sujet, de formuler une critique à l'égard de Benveniste, c'est tout au plus d'avoir traité ce problème important en une ligne, susceptible de passer inaperçue à un lecteur trop rapide.

2. Le second type de relation entre histoire et discours n'est autre

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