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Charles Rougon, un portrait complexe

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Par   •  13 Septembre 2021  •  Commentaire de texte  •  1 599 Mots (7 Pages)  •  1 121 Vues

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Charles Rougon, un portrait complexe

Émile Zola, un des écrivains français les plus connus du XIXème siècle a cherché à dépeindre fidèlement la société de la deuxième moitié de ce siècle, s’inscrivant ainsi dans le courant littéraire du naturalisme dont il est l’un des chefs de fil. Cette volonté de montrer la société dans son intégralité, et notamment les basses classes peu représentées en littérature jusque-là, l’a poussé à entreprendre l’écriture de son œuvre-vie : Les Rougon-Macquart : une saga romanesque de vingt romans dont le dernier, publié en 1893 est Le docteur Pascal. Ce roman, marquant la fin de plus de 20 ans de travail est « un de [ceux] auquel [il] tient le plus » car c’est « le résumé et la conclusion de son œuvre », Émile Zola. Cela tient surement aussi du fait qu’il s’est inséré dans le livre, car de nombreux parallèles peuvent être faits entre Pascal Rougon et Émile Zola. L’un étudie sa famille alors que l’autre étudie la société.

C’est dans le chapitre 3 de ce roman que se trouve l’extrait que nous nous proposons d’étudier. Cet extrait est un portrait très atypique d’un des personnages secondaires du roman : Charles Rougon. Bien qu’il ait peu d’importance dans le livre, sa mort au chapitre neuf permettra à Zola de montrer la fin de la famille, son épuisement dû à une lésion originelle. Tout comme Le docteur Pascal est le dénouement de la saga des Rougon-Macquart, Charles est montré comme le dernier de cette famille. Ce parallèle donne à ce personnage une importance qu’il n’aurait sans doute pas eu sans lui.

Ce portrait complexe est à la fois singulier et pluriel. Nous tenterons de le démontrer en faisant ressortir ses caractéristiques propres puis, dans une deuxième partie, nous verrons que ce portrait en fait celui de la famille en entier.

Cet extrait présente un portrait hors du commun.

Premièrement, le portrait est très exhaustif. En effet, ce texte à une dominante descriptive : il dresse un portrait complet et précis du personnage au niveau moral et physique. Au niveau moral, Charles est décrit comme un attardé mental. D’entrée, par une gradation inversée, l’auteur montre ce retard mental. On apprend donc qu’à « quinze ans » (l.1) il en « paraissait douze » (l.1) et avait « l’intelligence balbutiante d’un enfant de cinq ans » (l.1). Cette dernière métaphore, « intelligence balbutiante » (l.1), le place même en dessous d’un enfant de cinq ans, car les balbutiements sont propres aux bébés. Le personnage est donc dégradé, mais cela va plus loin. L’auteur va même jusqu’à lui enlever ses caractéristiques humaines par une animalisation : « un petit chien vicieux » (l.6) et en disant de lui qu’il n’a « ni cerveau ni cœur » (l.5), l’intelligence et l’empathie étant les caractéristiques qui nous rendent humains, il n’est pas considéré comme tel. De plus, il est montré comme étant un cas désespéré et irrécupérable par une nouvelle gradation : « il ne voulait, il ne pouvait rien apprendre, […] il pourrissait tout ». Le verbe pourrir employer ici, nous fait comprendre que Charles est le fruit pourri de la famille. Finalement, une analepse aux lignes 6 à 13 fait basculer le texte d’un type descriptif à un type narratif. On le voit notamment avec l’emploi du plus-que-parfait, « avait changé » (l.9), utilisé pour raconter des faits antérieurs dans un récit au passé. Si cette analepse permet de raconter le passé de Charles et ainsi de le contextualiser, il permet surtout de comprendre le présent du personnage. Cette partie du texte a donc aussi une dimension explicative. On y apprend qu’il a enchainé les « renvoi[s] honteux » (l.9) des divers pensionnats dans lesquels Félicité l’avait placé. Tout cela était dû à des « vices inavouables » (l.8), lesquels sont associés implicitement à un autre trait de Charles que nous découvrons : son homosexualité. On peut donc parler d’un portrait moral livré sur un ton très péjoratif. À l’inverse, son portrait physique est mélioratif. Dans sa description, l’image de Charles apparaît hors du commun. En effet, si l’intérieur est « pourri », l’extérieur, lui, est pourvu d’une grande « beauté » (l.7). Cette beauté est elle-même unique, car le lexique de la féminité est très présent bien que Charles soit un garçon. L’auteur parle de sa « grâce élancée et fine » (l.2-3) et de ses « longs cheveux pâles, légers comme de la soie » (l.3-4). On a donc l’image d’un beau garçon « efféminé » (l.13) paraissant plus jeune qu’il ne l’est en réalité. Il est aussi intéressant de noter une grande variété de types de texte dans cet extrait. Elle contribue à rendre ce portrait complexe.

Deuxièmement, ce portrait exhaustif comporte aussi des éléments contradictoires qui créent un paradoxe chez le personnage. Dans le paragraphe précédent, nous avons fait ressortir des éléments péjoratifs et mélioratifs du portrait : la cohabitation d’une beauté physique importante et d’un retard mental couplé à une nature vicieuse, le tout au sein d’un même être, crée une dichotomie entre les dimensions physique et morale. Le paradoxe découle du fait que l’apparence ne reflète pas la personnalité du personnage. Cette contradiction est renforcée par divers oxymores : « sa beauté inquiétante qui [a] une ombre de mort » (l.5) et « ses grands yeux clairs […] vides » (l.5). Il est montré ici que l’extérieur laisse tout de même transparaître l’intérieur. Le paradoxe se trouve aussi dans « l’extraordinaire ressemblance » (l.2) que Charles possède avec sa « Tante Dide » (l.2). En effet, l’auteur compare ici un jeune garçon de quinze ans qui en à l’air douze à une vielle femme de cent-cinq ans. Le paradoxe du garçon ayant l’air d’une femme est aussi très présent au travers des champs lexicaux de la féminité. Les éléments contradictoires sont ici très évidents.

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