CE Ass 28 mars 1997
Dissertation : CE Ass 28 mars 1997. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Laurent GB • 17 Novembre 2015 • Dissertation • 1 906 Mots (8 Pages) • 1 146 Vues
Commentaire d’arrêt CE Ass. 28 mars 1997
L’expropriation est certainement une atteinte des plus graves à la garantie constitutionnelle de la propriété. Par conséquent, si le besoin de la communauté exige l’expropriation d’un bien pour un but d’utilité publique, l’administration est tenue de montre la plus grande prudence pour ne pas dépasser les limites du nécessaire.
Le 28 mars 1997 le Conseil d'Etat, étant garant de la bonne application des règles administratives, était tenu de trancher une affaire dans laquelle se voyait contesté le décret déclarant d’utilité public et urgent la construction de l’autoroute A 400 dans le département de la Haute-Savoie.
Ce projet avait pour objectif d’assurer une liaison internationale en raccordant le réseau autoroutier français à celui de la Suisse et indirectement à celui de l’Italie et de désenclaver les villes d’Annemasse et de Thonon-les-Bains. Les études de faisabilité de cette autoroute ont mise en évidence de très graves difficultés tant géologiques que topographiques mais tenant également à la protection de l’environnement. Dans le même temps il est apparue que la Suisse n’était pas disposée à construire sur son territoire ni une autoroute ni une voie rapide qui pourrait prolonger l’A 400 au-delà des frontières françaises. On a donc retenu un projet de 35 km d’autoroute située à égale distance de deux liaisons routières permettant déjà la jonction Annemasse-Thonon.
Le trafic était estimé par l’administration à 10000 véhicules par jour et le coût de construction évalué à près de 80 millions de francs par kilomètre soit un coût totale de 2,6 milliards de francs.
Malgré un avis unanimement défavorable de la commission d’enquête, l’utilité publique du projet et son urgence ont été déclaré le 6 mai 1995.
Les requérants ont demandé l’annulation du décret, le sursis à l’exécution et des dommages-intérêts.
Le Conseil d'Etat était donc tenu de répondre à la question selon laquelle un projet d’expropriation peut elle être déclarée d’utilité publique si elle présente un coût excessif ?
Pour répondre à la question le Conseil d'Etat a utilisé la théorie du bilan en comparant les avantages et inconvénients du projet pour aboutir à la solution que le projet représentait seulement un intérêt limité et que le coût financier était à lui seule excédant ce que retire le projet de son caractère d’utilité publique. C’est ainsi que le Conseil d'Etat annule pour le premier fois dans son histoire un décret déclarant d’utilité publique concernant un projet de construction d’une autoroute.
On peut déduire que les questions environnementales, dans des circonstances où le déséquilibre financier ne serait pas aussi important, seraient susceptibles de déterminer la décision (charte de l’environnement dans la constitution). Par ailleurs, c’est le premier projet d’ampleur nationale annulé du fait de l’application de la théorie du bilan.
Pour examiner la technique par laquelle le Conseil d'Etat à fait preuve dans sa décision du 28 mars 1997 il sera d’abord utile de s’intéresser quant à la théorie du bilan (I) pour parler ensuite de la portée de l’opportunité et de la politique dans cette théorie jurisprudentielle (II).
- La théorie du bilan, un moyen efficace de contrôle…
Bien que la théorie du bilan se trouve confirmé dans la décision du 28 mars 1997 (A), le Conseil d'Etat lui consacre un changement considérable (B).
- La confirmation du déjà vu
Traditionnellement le contrôle du juge dans les cas d’une expropriation en raison de l’utilité publique du bien était très faible. Il suffisait au juge que le but final invoqué par l’administration soit d’utilité publique. L’appréciation était donc largement abstraite ce qui a mené à aucune annulation de déclaration d’utilité publique.
La théorie du bilan apparaît pour la première fois en 1971 dans l’affaire de la Ville nouvelle est. Bien qu’en l’espèce l’utilité publique du but, recherché par la création d’un agglomération de 20 000 habitants et un complexe pour 25 000 étudiants, apparaît facilement, le Conseil d'Etat a néanmoins procédé à un examen concret des avantages et inconvénients de l’opération envisagée.
C’est ainsi que le juge a développé la formule qu’on retrouve aussi dans la décision à commenter : Une opération ne peut légalement être déclarée d’utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, éventuellement, les inconvénients d’ordre social (y compris l’environnement) et les atteintes à d’autres intérêts publics qu’elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente. Il s’agit donc d’un principe de proportionnalité. Par conséquent l’administration, sans être totalement privée de son pouvoir d’appréciation, elle n’a plus toute la liberté d’apprécier l’opportunité d’exproprier comme le juge vérifiera s’il convient ou non d’exproprier, compte tenu des circonstances de chaque espèce. Le juge examinera donc le projet selon trois questions donnant le fil directeur: Est-ce que l’expropriation est justifié par l’intérêt public ? est-ce que l’expropriation envisagé est nécessaire ou peut-on réaliser l’opération sans elle ? et est-ce la réalisation ne va pas entraîner des inconvénients excessif par rapport à l’utilité qu’elle présente ?
Bien qu’en espèce de l’arrêt de principe « Ville nouvelle est » le bilan était considéré positif, cette notion a permis l’annulation de certains décret de déclarations d’utilité public en raison d’un mauvais bilan, sans que nécessairement le but rechercher en lui-même faisait défaut d’utilité public. Aussi dans l’arrêt à commenter le Conseil d'Etat a du considérer que le bilan apporte un résultat négatif. Malgré le constat d’un intérêt déjà limité du projet en soi, ce résultat est surtout du au coût financier de l’autoroute, apprécier comme excédant.
- Le coût financier comme élément décisif
Le coût financier paraît au Conseil d'Etat excédant « à lui seul ». On aurait pu penser, a priori, que le Conseil d'Etat jugera le coût financier comme excédant à l’égard de l’observation que la construction de l’A 400 présente un intérêt limité, mais par la formulation choisi on doit constater que même en présence d’un intérêt d’utilité publique le coût du projet aurait amené le Conseil d'Etat a denier la légalité interne du décret par défaut d’utilité public.
Le plus surprenant n’est pas le constat en soi, car 80 francs millions par kilomètres paraît en absence de travaux spéciaux pour sa construction relativement élevé par rapport au coût moyen d’un kilomètre d’autoroute en plaine qui est de 35 millions francs. Ce qui surprend c’est que, d’un coté le coût de l’autoroute serait amortit par l’exploitation sous concession de sociétés privées, et d’autre coté que la décision, en laissant à coté les inconvénients pour l’environnement, semble établir une hiérarchie entre les aspects à examiner en faveur des arguments financiers.
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