La disparition de l'acte administratif unilatéral
Dissertation : La disparition de l'acte administratif unilatéral. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Alegot Arana • 21 Février 2018 • Dissertation • 1 943 Mots (8 Pages) • 9 314 Vues
LA DISPARITION DE L’ACTE ADMINISTRATIF UNILATERAL
« En principe, dans l’intérêt de la sécurité juridique, on doit tenir pour définitif les actes ayant conféré des droits. Il est cependant souhaitable que l’administration puisse annuler elle-même les décisions qu’elle a prises. » Ainsi s’exprimait Georges Vedel, professeur de droit public français, évoquant la fin de l’acte administratif unilatéral.
La disparition d’un acte peut arriver dans deux grandes séries de situations bien distincte entre elles: l’acte va disparaître en dehors de toute manifestation de volonté de la part de l’autorité administrative ou l’acte peut disparaître car l’administration a exprimé sa volonté en ce sens.
La disparition d’un acte administratif unilatéral se fait ainsi par le biais d’une abrogation ou d’un retrait. Se sont deux procédures entraînant la disparition des actes administratifs unilatéraux concernés, en dehors du cas où l’acte est affecté d’un terme (c’est-à-dire dans le cas du terme ici, d’une date) à l’échéance duquel il disparaît ou de celui où l’acte fait l’objet d’une annulation devant le juge. Ces deux procédures sont donc à approfondir. Les actes administratifs unilatéraux, par opposition aux actes administratifs contractuels, manifestent l’expression de la volonté unilatérale de l’administration. Il s’agit dans notre développement d’évoquer uniquement les actes administratifs unilatéraux et non les contrats.
L’acte administratif unilatéral est adopté par une autorité administrative portant sur l’ordonnancement juridique et affectant les droits et obligations des personnes visées sans leur consentement. L’acte administratif est exécutoire par nature, en effet le juge administratif va qualifier le caractère exécutoire des décisions administratives de règle fondamentale du droit public comme l’affirme l’arrêt du Conseil d’Etat « Huglo » de 1982.
Pour qu’un acte administratif produise ses effets, il doit être opposable (il s’agit de la force d’un acte administratif ne pouvant être méconnue par les tiers). Cela suppose que des conditions de publicité soient respectées par les autorités. Ces conditions ont été modifiés par l’ordonnance du 20 février 2004 qui prévoit que pour les décrets, ceux-ci seront opposables à la date qu’ils fixent ou un jour après leur publication au journal officiel sous forme papier ou électronique.
Ce sujet est relativement intéressant: en effet, le débat sur l’abrogation et le retrait des actes administratifs unilatéraux est essentiel car il pose une question majeure au droit administratif dans le sens où on doit se demander si il faut privilégier la légalité ou la sécurité juridique, puisque le retrait et l’abrogation sont deux systèmes opposés.
Ainsi nous allons nous demander tout au long de ce développement, comment un acte administratif unilatéral peut-il disparaître de notre ordonnancement juridique par le juge ou l’administration?
L’acte administratif unilatéral peut disparaître de deux façons: soit le juge administratif va annuler l’acte administratif (I) soit l’administration le supprime (II)
- L’annulation de l’acte administratif par le rôle monopole du juge administratif
Lorsqu’un juge annule un acte administratif unilatéral, en principe cela signifie que cet acte est censé n’avoir jamais existé. Cette annulation a des effets (A) et entraîne des conséquences en droit administratif. (B)
- L’effet absolu de l’annulation par le juge d’un acte administratif unilatéral
Le principe traditionnel en la matière est la disparition de l’acte dès l’origine, donc il faut reconstituer la situation juridique telle qu’elle aurait été si l’acte n’avait jamais existé. Par exemple, si un fonctionnaire est révoqué, qu’il fait un recours contre cette révocation et que celle-ci est annulée, il faudra réintégrer ce fonctionnaire et reconstituer sa carrière. L’arrêt du Conseil d’Etat « Rodière » de 1925 précise que lorsqu’il y a annulation d’une révocation, il appartient à l’administration de procéder à un examen d’ensemble du personnel touché directement ou indirectement par l’arrêt du Conseil d’Etat et de prononcer tout reclassement utile pour reconstituer la carrière du fonctionnaire. En l’espèce, Le sieur Rodière avait déféré au Conseil d’Etat le tableau d’avancement pour 1921 du ministère des régions libérées. Le Conseil d’Etat lui donna satisfaction et annula le tableau. Le ministre, prenant acte, ne se borna pas à remettre les personnes rayées du tableau dans leur état de 1921: il reconstitua leur carrière à ce qu’elle aurait dû être sans irrégularités. Ainsi, c’est au juge administratif d’admettre l’annulation ou non d’un acte administratif unilatéral, c’est lui qui a le monopole de la sortie de vigueur des actes administratifs unilatéraux. L’acte peut donc disparaître en dehors de toute manifestation de volonté de la part de l’autorité administrative et cette situation peut se rencontrer lorsque l’acte va être annulé par le juge de l’excès de pouvoir. Une règlementation aura fixé un terme à la durée de l’acte et c’est le cas des ordonnances de l’article 38 de la Constitution car si elles ne sont pas ratifiées par le Parlement, les ordonnances deviennent caduques. Un acte administratif peut donc disparaître grâce au juge mais ce n’est pas seulement par ce moyen qu’un acte puis être annulé.
B. Les conséquences d’un principe traditionnel atténué
Ainsi, si la révocation d’un individu est annulée, cela veut dire que son poste n’était pas libre et donc son successeur a obtenu un poste non disponible. Le successeur devait donc abandonner ce poste, mais ce n’est pas de sa faute si l’administration a commis une erreur. Le Conseil d’Etat répond à ce problème dans l’arrêt « Monsieur Verron-Réville » en 1949. Il précise que l’administration a obligation de réintégrer, donc la mise à la retraite a été annulé même si la réintégration implique l’éviction de son successeur. Cette jurisprudence va être atténuée par la suite, le Conseil d’Etat va dire qu’il faut réintégrer le fonctionnaire à un poste équivalent pour ne pas évincer le successeur. Mais il existe des hypothèses où il n’existe pas de poste équivalent. Dans l’arrêt « Bréart de Boisanger » en 1961, le Conseil d’Etat précise que lorsque le poste est unique, le successeur doit être évincé (ici il s’agissait de l’administrateur de la Comédie Française). Ensuite, on peut se demander si l’annulation du premier acte administratif entraîne le retrait des autres par effet de dominos? La jurisprudence hésite, mais en général le juge administratif estime que l’annulation par exemple d’un concours n’entraîne pas l’annulation de décisions individuelles qui suivent. En réalité tout dépend du lien entre l’acte attaqué et ceux qui suivent mais c’est souvent du cas par cas. Souvent une loi de validation interviendra avant que le Conseil d’Etat ne tranche. Enfin, l’exécution des décisions de justice peut être incertaine. En principe, les annulations ont un effet absolu, mais cet effet absolu est modéré par la relative incertitude de l’exécution des décisions de justice. Ainsi, on pourrait affirmer que le juge administratif fait parti intégrante de cet acte administratif car celui-ci a le pouvoir de l’annuler.
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