Le personnage de Sophroniska dans les Faux Monnayeurs de André GIDE
Commentaire de texte : Le personnage de Sophroniska dans les Faux Monnayeurs de André GIDE. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Millou Poutou • 18 Novembre 2020 • Commentaire de texte • 1 356 Mots (6 Pages) • 820 Vues
En Terminale L.
Le 8 Décembre 2016
Composition de Littérature
Les Faux-monnayeurs ;
Le Journal des faux-monnayeurs ;
D’André Gide
- Le personnage de Sophroniska dans les Faux-monnayeurs
Arborant un nom aux tonalités slaves (-iska-), Sophroniska est nommé pour la première fois dans le roman, Les Faux-monnayeurs, écrit par André Gide, dans le premier chapitre de la seconde partie sous le qualificatif de « doctoresse Polonaise ». Les racines étymologiques de son nom converge avec son activité : du Grec, -sos- veut dire ‘exempt de maladie, équilibre, harmonie’ ; et –phren- signifie ‘esprit, conscience’. Nous la rencontrons donc à Saas-Fée, en Suisse, où elle passe des vacances avec sa fille, Bronja ainsi que Boris, le petit fils du Père La Pérouse qui envoya Edouard, accompagné de Laura et Bernard ramener l’enfant au plus près de son grand père. Se présentant comme une grande admiratrice d’Edouard, mais surtout comme la psychothérapeute de Boris, ses discours et discussions seront, à plusieurs reprises, rapportés dans le journal d’Edouard. S’occupent du bien être psychique du jeune garçon qui finalement va se trouver comme le personnage principal autour duquel converge un grande partie de l’intrigue du roman, Sophroniska nous expliquera sa méthode qui aura sans aucun doute des répercussions sur le petit malade. Mais notre question se porte plus sur le choix de l’écrivain, comprendre pourquoi Gide a eu besoin de créer le personnage du Docteur Sophroniska dans son œuvre.
Aux premiers abords, Edouard dira de Sophroniska lors de leur première discussion, au sujet du dernier roman d’Edouard, qu’elle a un
- jugement, une critique (qui lui parut) plus intelligent que (ce qu’il avait coutume d’entendre » (chap. 2, part.2). Ils s’entendent tous deux sur la complexité psychologique d’un personnage en admettant qu’elle est
beaucoup plus intéressante et mérite d’être exploitée plutôt que ces
- psychologies toutes faites » (chap.2, part.2) qui, dans un soupir d’Edouard plaisent malheureusement le plus aux lecteurs (// Passavant ?). Sophroniska entre bien dans son rôle de psychothérapeute dans le sens où elle ne s’attache principalement qu’à tout ce qui touche les mentalités, ce qui est en lien avec la psychologie. Au fur et à mesure de leurs entretiens, rapportés dans son journal, Edouard se rendra bien vite compte que le docteur n’en sait pas plus que le malade lui-même sur sa maladie. Ne sachant même pas nommer le mal, elle se donnera des apparences de « savante » en donnant une définition très flou et imprécise de la maladie. Elle dira qu’ « il souffre d’une quantité de petites troubles, de tics de manies », parlant du déve loppement de ce type de maladie qui sera favorisé par la « débilité ». Elle dira que son remède est la parole et sa tâche de ramener aux yeux de l’enfant les coins sombres de son esprit, guérissant ainsi le mal en partie. Se rangeant du côté de la psychanalyse de Freud, visant à élucider les significations inconscientes des faits et paroles de l’individu, Sophroniska le montrera notamment lorsqu’elle parlera du mensonge, affirmant qu’en elle-même la dissimulation
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- l’invention d’une imagination maladive est révélatrice » (chap2.part.2). Sous chaque mot prononcé par Boris, la doctoresse cherchera en vain une signification. Un sens d’ailleurs qui parait absurde de chercher car elle dira elle même que le jeune homme est tellement pur (dans le sens de la transparence) qu’elle peut tout lire en lui (chap.2, part.2). Paradoxalement, elle affirme tout de même que l’enfant cache au plus profond de lui « un gros secret honteux » (page 197). Sa démarche dans cet appel au « complet abandon » (page 195) peut se rapprocher de celle qu’entreprend l’auteur, Gide lui-même, dans son journal qu’il tient en parallèle à son ouvrage. Il dit ne « jamais profiter de l’élan acquis » (J.F-M ; page 78). De même Sophroniska dira « qu’on peut parfois se lancer une de fausses pistes ; l’important (étant) de ne pas s’y obstiner » (page 196). Enfin, une autre attitude de Sophroniska qui mettra fin a la réelle science dont elle se gratifie est son ouverte appartenance au mysticisme (page 213). Cette attitude philosophique mais plutôt religieuse (de par son attachement aux propos de Bossuet (prêtre)) est fondée sur le sentiment d’intuition plus que sur la connaissance rationnelle. Gide s’y rattachera une fois de plus lors de l’explication de son rêve (J.F-M, page 72) et des nombreuses fois où il parle d’intuition de l’écrivain, ou de divinations, d’idée subite (J.F-M, page 38, 42, 75, 78 et 94). Enfin, ce qui appuiera le plus sur le fait que nous, lecteurs trouvons que Sophroniska est une psychothérapeute ratée, inaccompli, ou incompétente est sa remise en question assez fréquente qui se manifeste suite aux questions pourtant simple que pose Edouard. Il la dérangera et plusieurs fois elle préfèrera esquiver la réponse ou se lancer dans des théories pour ainsi dire ‘fumeuses’. Notamment à la fin du chapitre deux lorsque Edouard remarquera que « ce secret honteux se retrouve en chacun de nous (…) A ce moment, madame Sophroniska se leva » (page 197) marquant littéralement le trouble de cette dernière.
Dans un seconde temps, nous savons que les motivations dans ce roman sont plus importantes aux yeux de Gide que les actions en elle-même. Pour arriver au point d’orgue du roman, l’intrigue en elle-même : le suicide de Boris, il faut comprendre tous les faits, la construction, l’élaboration du crime et des mouvements des personnages. Sophroniska est tout de même celle qui éleva pour un certain temps le petit Boris, celui-ci étant écarté de sa mère pour une meilleure application du traitement, de la cure (page 194). C’est elle aussi qui décidera du départ de Boris pour la pension Vedel qui sera finalement l’annonce de la fin, se faisant plus proche. C’est elle qui assurera la stabilité de Boris, alors même qu’elle ne le connait pas. Edouard remarquera lui-même qu’il n’est pas convaincu de cette guérison. C’est Sophroniska aussi qui a contribué grandement sans trop réfléchir à la condamnation de Boris au suicide. En donnant le talisman ‘magique ‘du garçon, auquel il tenait beaucoup, a un étranger, qui se trouvera être depuis le départ le grand manipulateur de la confrérie des hommes forts à laquelle souhaite adhérer Boris ; Sophroniska signe, sans s’en douter l’arrêt de mort de son patient. Comme Gide s’intéressera à Boris, Sophroniska s’intéressera aussi à lui comme à un personnage de roman (rencontre avec Edouard cité plus haut, page 194). Elle lui créera des complexes, le forcera à se dévoiler. Tout ce que retiendra Sophroniska de ses paroles sera sa grande transparence, sa sincérité sa simplicité, toutes ses qualités ; pourtant remarquables, seront suite au passage à la pension Vedel vu comme des faiblesses, elles seront tournées en dérision (27 juillet, page 87 J.F-M). Le rapport à la tonnelle gondolé réfléchissant la lumière du jour noue rappellera cette perversion, cette pourriture qui ronge chaque être passant par cette pension dont l’ambiance nous apparait comme étouffée et lugubre. C’est d’elle
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