L’Adversaire et Les Mémoires d’Hadrien
Fiche de lecture : L’Adversaire et Les Mémoires d’Hadrien. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar michaellen • 3 Avril 2021 • Fiche de lecture • 3 686 Mots (15 Pages) • 914 Vues
Devoir Maison de Français sur le roman
L’Adversaire et Les Mémoires d’Hadrien
1. Points communs et différences
Commençons par analyser les points communs entre L’Adversaire et des Mémoires d’Hadrien.
Tout d’abord, L’Adversaire et les Mémoires d’Hadrien appartiennent au registre de la non fiction. En effet, Emmanuel Carrère et Marguerite Yourcenar retracent le plus fidèlement possible à la réalité, la vie de personnes ayant véritablement existé : Jean-Claude Romand et l'empereur Hadrien. Ce sont des récits réalistes, bien qu’ils ne puissent échapper entièrement à la subjectivité de l’auteur comme le souligne Marguerite Yourcenar à travers les mots d’Hadrien : les livres “mentent, et même les plus sincères ». En effet, Marguerite Yourcenar reconstitue la vie d’Hadrien, morts depuis plusieurs siècles, à partir de ses écrits qu’elle interprète avec son schéma de pensée de femme du vingtieme siècle. Puis, elle se projette dans le corps d’Hadrien qui fait alors le récit de sa vie réinterprété par Marguerite Yourcenar qui n’hésite pas à modifier certains faits historiques, comme elle le soulignera à la fin du livre. Dans L’adversaire, l’auteur Emmanuel Carrère s'insère directement dans le récit qu’il fait à la première personne du singulier. Il nous donne ainsi sa propre vision de l’affaire, et nous fait part de sa correspondance avec le criminel Jean-Claude Romand.
De plus, ce sont des récits qui s’articulent autour de la vie, de l’évolution des personnages/personnes, à l'image du roman d’apprentissage. D’une part, Hadrien nous révèle les quatre parties centrales de sa vie à la forme pyramidale; sa jeunesse et son ascension vers le pouvoir (Varius multiplex multiformis), la mise en ordre de sa vie et de l’empire (Tellus stabilita), l’apogée (Saeculum Aureum), et le déclin (Disciplina Augusta). On le voit ainsi grandir, s’affirmer, évoluer, gagner en sagesse, face à la douleur, et face à la mort. D’autre part, Emmanuel Carrer évoque médiculeursement les origines de Romand, sa jeunesse, sa vie d’étudiant en médecine qui poursuit ses études malgré son échec en deuxième année, sa vie familiale, sa vie de couple, ses actes criminels, son procès et ses années en prison. Là aussi, on voit évoluer cet homme qui petit à petit s’enfonce dans son mensonge, dérive vers l’enfer et se raccroche à la foi.
Cependant, avant d'entamer un récit chronologique, nos deux auteurs dans l’incipit nous présentent l’enjeux de leur roman. En effet, dans le préambule des Mémoires d’Hadrien intitulé : Animula vagula blandula, l’empereur annonce à Marc-Aurèle, son petit fils adoptif et successeur, qu’il est atteint “d’hydropisie du coeur”, et que cette longue lettre qui lui adresse est l'occasion de partager son expérience, de retracer son existence pour mieux se comprendre et pouvoir affronter la mort. Emmanuel carrere, nous présente en premier lieu les faits : “Le matin du samedi 9 janvier 1993, [...] Jean-Claude Romand tuait sa femme et ses enfants”. Puis, il revient sur le passé de Romand pour tenter de comprendre ce qui l’a poussé à tuer ses proches.
A travers le récit de ces vies, nos deux auteurs soulèvent l’aspect ambivalent de la religion. Les Mémoires d’Hadrien sont emplies de références à la mythologie grecque, des mythes fondateurs, omniprésents dans la pensée et le langage d’ Hadrien comme lorsqu'il nous décrit son voyage avec Antinoüs : il se promène "au bord d'une source consacrée à Pan" , il apprécie "la fraîcheur des grottes consacrées aux Nymphes", "nous fîmes halte au bord de la source de Narcisse". Hadrien voit partout dans les contrées qu'il traverse des traces de la légende. Ce dernier leur attribue une valeur morale et une sagesse dont les hommes devraient se nourrir selon lui : "Depuis longtemps déjà, je préférais les fables concernant les amours et les querelles des dieux aux commentaires maladroits des philosophes sur la nature divine". Hadrien se veut tolérant et ouvert aux croyances des peuples barbares qu’il rencontre à la guerre. Il reçoit et assiste à plusieurs rituels barbares, et il touche de près à l'ésotérisme en s’initiant notamment aux mystères d’Eleusis, en Grèce (p. 161). On découvre ainsi la religion dans toute sa beauté, son étrangeté à travers l'œil fasciné d’Hadrien, mais aussi dans sa violence, car la religion est aussi à l’origine de nombreuses guerres dont la guerre de Judée, qui marquera profondément l'empereur. Emmanuel Carrère, quant à lui, retrace les années de prison de Romand durant lesquelles ce dernier se tourne vers Dieu pour se repentir de ses actes. Romand fait preuve d’une dévotion absolue en acceptant de prier entre deux heure et quatre heure du matin pour entretenir “la chaîne des prières”, un mouvement catholique mené par Bernard et devient “un prisonnier exemplaire”. Le côté excessif et “aveugle” de la religion est représenté à travers les personnages/personnes de Bernard et Marie-Christine qui ont construit une véritable amitié avec le criminel, et sont prêts à lui faire totalement confiance. Pourtant, s’il s’agit d’une réelle transformation de Romand ou d’un nouveau personnage, personne ne peut le dire. Carrère nous fait donc part de son scepticisme à ce sujet : « Au personnage du chercheur respecté se substitue celui, non moins gratifiant, du grand criminel sur le chemin de la rédemption mystique.»
De surcroît, on retrouve dans ces deux récits une réflexion sur l’homme et son désir de grandeur qui le pousse parfois à tout détruire. En effet, à quarante cinq ans, Hadrien est empereur du plus vaste empire connu à cette période, il est adoré, idolâtré par son amant Antinoüs, et se croit ainsi durant cet “âge d'or”, l’égal des dieux. Cependant, son orgueil démesuré sera profondément affecté à la mort d'Antinoüs, qu’il délaissait ces derniers temps. On le voit désarmé, il culpabilise : “je n’avais pas assez aimé pour obliger cet enfant à vivre”, et il pleure lui qui n’est qu’homme, impuissant devant la mort. Puis, après cette prise de conscience douloureuse, “les larmes [ayant pris] fin”, il retrouve une certaine humilité. Dans l’Adversaire, on assiste impuissant aux conséquences de l’orgueil de Jean-Claude Romand qui refuse l’échec et le déshonneur après l’examen de second année auquel il n’assiste pas. Il ment donc à ses proches, mais aussi à lui-même,
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