Honoré De Balzac, une forte personnalité
Mémoires Gratuits : Honoré De Balzac, une forte personnalité. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar lilitruc • 11 Juin 2013 • 2 856 Mots (12 Pages) • 1 389 Vues
Doté d'une forte personnalité, aussi génial que vaniteux, épris d'absolu, Honoré de Balzac a eu une vie dont les bas sont aussi vertigineux que les hauts. Le créateur de La comédie humaine a donné ses lettres de noblesse à la littérature populaire.
«C'était bien lui, la plus forte tête commerciale et littéraire du dix-neuvième siècle; lui, le cerveau poétique tapissé de chiffres comme le cabinet d'un financier; c'était bien lui, l'homme aux faillites mythologiques, aux entreprises hyperboliques et fantasmagoriques dont il oublie toujours d'allumer la lanterne; le grand pourchasseur de rêves, sans cesse à la recherche de l'absolu; lui, le personnage le plus curieux, le plus cocasse, le plus intéressant et le plus vaniteux des personnages de La comédie humaine, lui, cet original aussi insupportable dans la vie que délicieux dans ses écrits, ce gros enfant bouffi de génie et de vanité, qui a tant de qualités et tant de travers que l'on hésite à retrancher les uns de peur de perdre les autres, et de gâter ainsi cette incorrigible et fatale monstruosité!» Le jeune poète émacié, le critique désargenté à l'humour sardonique qui, dans le Corsaire Satan du 24 novembre 1845, croque sous couvert d'anonymat un Balzac alors au sommet de sa carrière n'est autre que Charles Baudelaire.
Donner un sens moins pur aux mots de la tribu!
A propos de Balzac, difficile d'éviter l'exagération et les raccourcis: il est excessif en tout, surtout dans le travail. Enorme, puissant, jovial, prométhéen, herculéen, truculent, rabelaisien, etc. Ce dernier qualificatif est répété à l'envi depuis le Balzac de Théophile Gautier (1859). Ce rapprochement ne lui aurait pas déplu, lui qui tenait Rabelais, son «digne compatriote», pour «l'esternel honneur de Tourayne». Balzac a même écrit des Contes drolatiques (1832-1833-1837) en hommage au maître des pantagruéliens. Balzac, qui s'est gardé de les intégrer à La comédie humaine, les avait rédigés pour rompre avec la sinistrose affectée des romantiques, les existentialistes de l'époque, pour répondre aussi à l'épidémie de choléra qui fit treize mille victimes à Paris en avril 1832: «Le rire est un besoin de la France.» (1) Pour autant Balzac n'a pas été ce «gros indécent» que fustige une George Sand peu réceptive à ces ribauderies. Il est, au contraire, de ces rares écrivains qui ont réussi à combler le fossé entre la création littéraire et la littérature populaire.
«J'aurai porté une société entière dans ma tête»
Balzac ne cesse de se projeter à l'extérieur. Ainsi, il s'est décrit physiquement à diverses reprises, sous les traits de ses personnages: Albert Savarus dans le roman du même nom, David Séchard dans les Illusions perdues ou Wilfrid dans Séraphita. Louis Lambert dans une nouvelle philosophique du même nom et Raphaël de Valentin, héros principal de La peau de chagrin, ont entrepris, comme lui, de rédiger un «traité de la volonté». On trouve un peu de Balzac dans la figure de l'ambitieux Rastignac ou dans celle, plus inquiétante, de ce monstre de Vautrin: «Le romancier authentique crée ses personnages avec les directions infinies de sa vie possible» (2).
Lorsqu'en dehors de ses romans il parle de lui-même, Balzac incline à se comparer aux plus grands. Ce tour emphatique lui vient lorsqu'il veut épater une femme. Témoin, la lettre du 6 février 1844 à «l'Etrangère», la fameuse Mme Hanska, future Eveline de Balzac: «Quatre hommes auront eu une vie immense: Napoléon, Cuvier, O'Connell, et je veux être le quatrième. Le premier a vécu de la vie de l'Europe; il s'est inoculé des armées; le second a épousé le globe; le troisième s'est incarné un peuple; moi, j'aurai porté une société tout entière dans ma tête.» De fait, Balzac a su créer des personnages romanesques et leur conférer une existence si spécifique que certains sont devenus des archétypes. Le monde où évoluent ces figures romanesques devient celui de son Grand œuvre, qu'en 1842 il intitule, en hommage à Dante, l'auteur de La divine comédie, La comédie humaine. Les proscrits, le plus reculé dans le temps de ses récits et dont l'action se déroule dans le Paris de 1308, voient Dante devenir lui-même un personnage de La comédie humaine.
Qu'est-ce que la comédie humaine?
L'entreprise balzacienne avait sa nécessité externe: rembourser sa «dette flottante». En reprenant certaines œuvres déjà publiées et en établissant un programme œuvres à écrire, La comédie humaine était censée libérer Balzac de ses créanciers. Mais l'entreprise répond surtout à une nécessité interne: la découverte d'un principe d'écriture propre à Balzac, celui des «personnages reparaissants». D'un roman à l'autre, ils sont au service de l'idée générale qu'il existe des espèces sociales à l'instar des espèces zoologiques. «Les différences entre un soldat, un ouvrier, un administrateur, un avocat, un oisif, un savant, un homme d'Etat, un commerçant, un marin, un poète, un pauvre, un prêtre sont, quoique plus difficiles à saisir, aussi considérables que celles qui distinguent le loup, le lion, l'âne, le corbeau, le requin, le veau marin, la brebis.» C'est entre 1830 et 1842 que prennent corps les principes de l'œuvre, typiques du roman balzacien.
«Saluez-moi car je suis tout simplement en train de devenir un génie!»
L'idée du retour des personnages lui est venue un matin de 1833 3. Balzac se précipite chez sa sœur, Laure de Surville, et expose le plan d'ensemble de son œuvre à venir: «Saluez-moi car je suis tout simplement en train de devenir un génie!» Une longue lettre à l'Etrangère datée du 26 octobre 1834 détaille les intuitions fondamentales de l'écrivain. «Les Etudes de mœurs représenteront tous les effets sociaux sans que ni une situation de la vie, ni une physionomie, ni un caractère d'homme ou de femme, ni une manière de vivre ni une profession, ni une zone sociale, ni un pays français, ni quoi que ce soit de l'enfance, de la vieillesse, de l'âge mur, de la politique, de la justice ait été oublié.» Il s'agit de «reproduire toutes les figures et toutes les positions sociales» et de donner «une exacte représentation de la société dans tous ses effets». «Ces individualités typisées» doivent être complétées par «les
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