Extrait de mémoire
Mémoire : Extrait de mémoire. Recherche parmi 301 000+ dissertationsPar Romanemn • 24 Janvier 2025 • Mémoire • 1 447 Mots (6 Pages) • 15 Vues
- La dialectique chez Alexandre Kojève : un cadre conceptuel à la compréhension des rapports entre les sexes.
La compréhension des rapports entre les genres sous l’angle dialectique nécessitera de mettre en parallèle les concepts avec une observation factuelle et historique. Pour ce faire, il sera primordial de s’attacher à la compréhension conceptuelle de la conscience dans la dialectique. Nous chercherons à montrer que les rapports de pouvoirs sont instaurés au plus profond de la conscience, si ce n’est constitutifs de celle-ci. Afin de parvenir à une telle compréhension des rapports interpersonnels, il faudra donc comprendre le processus d’affirmation de chaque conscience de manière singulière, analyse que le système dialectique nous permet d’opérer. Nous choisissons plus particulièrement de nous appuyer sur les travaux de Kojève car ceux-ci représentent une base fiable englobant la compréhension de la dialectique selon son père fondateur, dans une saisie contemporaine. Plusieurs aspects de l’affirmation de la conscience dans l’analyse de Kojève seront particulièrement intéressants pour notre étude; nous proposons ici d’en étudier les plus fondamentaux.
I.1. Le désir et la reconnaissance comme sources de soumission dans les rapports entre les genres.
L’un des aspects primordiaux de l’affirmation de la conscience dans le système dialectique tel qu’il est compris par Kojève est le désir. Il le remarque comme une dynamique centrale des rapports entre deux consciences. Il ne s’agit pas ici d’un désir d’ordre passionnel mais de celui qui a lieu à un moment plus profond et plus antérieur, dans l’affirmation de l’existence humaine. Il est un moment crucial dans la naissance de la conscience. Dans sa préface, (Introduction à la lecture de Hegel, 1947, 10), il commence en effet par remarquer que c’est au désir que chaque conscience tend à parvenir pour parfaire son niveau d’existence. Le désir est un passage obligatoire sur le chemin d’une conscience vers son acheminement.
L’objet de ce désir, qui précisément rend celui-ci différent d’un désir passionnel qui porterait sur un corps ou un objet, est dans le cas d’une conscience celui d’une reconnaissance par une autre conscience. Il ne s’agit donc pas d’un objet physique mais plutôt spirituel. En ceci, le désir humain est donc vu comme profondément différent du désir animal, qui serait, lui, le désir d’un corps pour un autre et non pas comme un désir d’une conscience par une autre conscience. Bien qu’il puisse porter sur l’aspect corporel de l’autre, il ne saurait s’y confiner et se constitue comme humain précisément parce qu’il se déplace sur la conscience. Ce qui fait le propre du désir humain est donc, selon Kojève, l’objet de celui-ci : la reconnaissance par autrui. Le désir n’est humain que s’il porte sur le désir de l’autre et non pas sur son corps. Cette distinction est déterminante puisque si elle désir quelque chose de spirituel, la conscience désire une reconnaissance d’elle-même en tant que conscience et non en tant qu’objet. Pourtant, en asservissant une autre conscience par la lutte, comme nous allons le voir, elle assigne l’autre à une sorte d’objectification. Le rapport entre spiritualité et corporéité est un rapport ambivalent dans cette situation. Chaque conscience est aussi corps, et voit dans l’altérité son aspect corporel. Kojève le souligne dans sa préface (Introduction à la lecture de Hegel, 1947, 8) :
« La vie-animale est la position naturelle de la conscience, c’est-à-dire la négation privée de l’autonomie »
Chercher à se détacher de son aspect corporel pour se concentrer sur la spiritualité est donc la tâche primitive de la conscience pour accéder à son perfectionnement. Ce rapport à la corporéité exercera une grande influence sur les relations entre les genres dans les rapports interpersonnels comme nous le verrons plus loin. Cette place qu’occupe le désir est donc non seulement centrale pour la conscience en tant que telle mais elle est aussi fondatrice des relations interpersonnelles. En effet, le pas qu’opère Kojève dans sa compréhension de la dialectique consiste à affirmer que ce modèle est non seulement descriptif et théorique, mais qu’il est aussi une preuve de la mise en place des structures sociales. Parmi les commentateurs, Phillipe Sabot (Bataille, entre Kojève et Queneau : le désir et l’histoire, 2012, 2) décrit le désir comme anthropogène dans l’analyse de Kojève. Il comprend sa dialectique comme une dialectique des désirs, ces derniers arrachant l’être humain à sa naturalité. Une fois comprise la nature de l’objet du désir et la place centrale de celui-ci, se pose la question de la manière dont la conscience parvient ou non à satisfaire ce désir. Nous cherchons à montrer que dans ce processus un rapport de domination trouve ses racines.
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