André Breton et Alberto Giacometti / concept d’inquiétante étrangeté
Cours : André Breton et Alberto Giacometti / concept d’inquiétante étrangeté. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar latoukia • 5 Mai 2022 • Cours • 2 078 Mots (9 Pages) • 402 Vues
SÉQUENCE 2 : L'INQUIÉTANTE ÉTRANGETÉ
Découverte
Étape 1 - Séance 1
Introduction
Dans cette première étape, nous nous interrogerons sur le concept d’inquiétante étrangeté avec comme point de départ un objet « surréaliste » trouvé dans une brocante par André Breton et Alberto Giacometti.
À partir de la description qu’en fait André Breton dans L’Amour fou, vous aurez à imaginer et dessiner cet objet, avec différents outils, selon différents angles de vue… sans vous priver de faire évoluer votre idée initiale. L’objectif principal de ces différents temps de pratique exploratoire est de vous permettre de prendre conscience des liens entre vos choix plastiques et vos intentions, tout en commençant à penser votre définition du concept d’inquiétante étrangeté.
Décrire et imaginer
Dans L’amour fou, André Breton décrit un masque à la fois inquiétant et étrange, découvert avec son ami Alberto Giacometti, au cours d’un après-midi passé à chiner
« Le premier d’entre eux qui nous attira réellement, qui exerça sur nous l’attraction du jamais vu, fut un demi-masque de métal frappant de rigidité en même temps que de force d’adaptation à une nécessité de nous inconnue. La première idée, toute fantaisiste, était de se trouver en présence d’un descendant très évolué du heaume, qui se fût laissé entraîner à flirter avec le loup de velours. Nous pûmes, en l’essayant, nous convaincre que les œillères, striées de lamelles horizontales de même substance diversement inclinées, permettaient une visibilité parfaite tant au-dessus et au-dessous que droit devant soi. L’aplatissement de la face proprement dite en dehors du nez, qu’accentuait la fuite rapide et pourtant délicate vers les tempes, joint à un second cloisonnement de la vue par des lamelles perpendiculaires aux précédentes et allant en se resserrant graduellement à partir de la dite courbure, prêtait à ce haut du visage aveugle l’attitude altière, sûre d’elle, inébranlable qui nous avait d’abord retenus. »
André Breton, extrait de L’amour fou,
André Breton décrit un demi-masque dont la fonction est inconnue. Cet objet est en métal et se caractérise par la présence d’œillères striées de lamelles horizontales et d’un nez en relief. L’objet est étrange et inquiétant.
Analyse d’œuvre
Man Ray a choisi de photographier le masque en plongée et vu de trois quarts. Cela permet d’en apprécier la forme dans sa totalité et d’en montrer les détails.
On remarque que le masque utilise des formes épurées et géométriques ainsi que des angles aigus : rectangles pour les yeux, triangles pour le nez et les côtés du masque. La position du masque dans le cadre crée une diagonale qui renforce le caractère aigu de ces formes. Alliées au gris froid du métal, elles peuvent sembler inquiétantes. Ce masque est-il un masque guerrier ou un masque pour prisonnier ? Les lamelles qui strient l’emplacement des yeux et des joues ajoutent du mystère à l’inquiétant. Avec ce masque, on peut voir sans être vu. Ce sont sans doute ces qualités qui ont attirées André Breton et Alberto Giacometti. Man Ray a glissé une feuille blanche sous le masque pour le mettre en valeur par un jeu de contraste et de lumière. Il est présenté comme une œuvre d’art.
[pic 1] Man Ray, Un descendant très évolué du Heaume, illustration pour l’Amour fou d’André Breton, photographie argentique.
Culture artistique
Définition : Le surréalisme (1924-1969 env.) : Le surréalisme est un mouvement artistique et littéraire dont le chef de file est André Breton (écrivain).
Les surréalistes n’hésitent pas à associer des images hétéroclites parfois en faisant intervenir le hasard, pour nous faire basculer dans le monde du rêve. Ils s’intéressent à la psychanalyse et à l’inconscient pour utiliser l’absurde, l’incongru, l’humour, l’étrange…
Dans la forme, ils privilégient la pratique de l’assemblage (Meret Oppenheim), du cadavre exquis (œuvres collectives) et du photomontage (Man Ray) pour créer des associations étranges. Ils ne renoncent pas toujours à une facture réaliste (Salvador Dali, René Magritte). En effet, c’est la possibilité pour eux, de nous faire croire à l’impossible pour mieux susciter un sentiment d’inquiétante étrangeté.
Ce qui est surréaliste dans le demi-masque trouvé par André Breton c’est le fait qu’il le voit comme un croisement entre un heaume et un loup de velours. En effet, en décrivant le masque comme l’association entre deux objets a priori contradictoires dans leur fonction (le heaume sert au guerrier tandis que le loup de velours se porte au bal masqué), Breton met en évidence son étrangeté De la même façon, lorsque Man Ray décide de coller des clous sur un fer à repasser et de baptiser cet objet Le cadeau, il provoque le trouble du spectateur. En effet, en assemblant des clous et un fer à repasser, il détourne l’objet de sa fonction. Le titre ajoute une dimension humoristique à cet assemblage à la fois étrange et inquiétant. C’est à un cadeau empoisonné auquel on a affaire !
[pic 2] Man Ray, Le cadeau, 1963, assemblage
Bilan intermédiaire
Ce qu'il faut retenir sur le mouvement surréaliste
•Lorsque l’on représente quelque chose, on opère des choix plastiques : formes, lumière, cadrage, composition, couleur… Ces choix connotent ce qui est représenté.
•L’objet peut être un matériau artistique (objet détourné sous forme d’assemblage).
•Pour susciter le sentiment d’inquiétante étrangeté, les surréalistes ont beaucoup utilisé l’association entre des objets à priori banals qui une fois assemblés créent un trouble chez le spectateur.
...