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Le bonheur

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Par   •  21 Mars 2020  •  Chronologie  •  1 799 Mots (8 Pages)  •  843 Vues

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Première partie

La conscience de ce que nous sommes peut faire obstacle à notre bonheur

  1. Analyse de la thèse

        Dans cette thèse, deux choses peuvent finalement nous empêcher d’être heureux : ce que nous sommes et la conscience que nous en avons. Il faut donc montrer que l’homme est faible et incapable d’atteindre le bonheur. Et, comme il en a conscience, il ajoute le désespoir au malheur.

  1. Texte de Freud

Texte n°6 du dossier

Freud (1856-1939), Le malaise dans la culture

Les hommes aspirent au bonheur, ils veulent devenir heureux et le rester. Cette aspiration a deux faces, un but positif et un but négatif, elle veut d'une part que soient absents la douleur et le déplaisir, d'autre part que soient vécus de forts sentiments de plaisir. Au sens le plus étroit du mot, « bonheur » ne se rapporte qu'au dernier point. Conformément à cette bipartition des buts, l'activité des hommes se déploie dans deux directions, selon qu'elle cherche à réaliser l'un ou l'autre de ces buts – de façon prépondérante ou même exclusive.

[…]

Ainsi donc nos possibilités de bonheur sont limitées déjà par notre constitution. Il y a beaucoup moins de difficultés à faire l'expérience du malheur. La souffrance menace de trois côtés, en provenance du corps propre qui, voué à la déchéance et à la dissolution, ne peut même pas se passer de la douleur et de l'angoisse comme signaux d'alarme, en provenance du monde extérieur qui peut faire rage contre nous avec des forces surpuissantes, inexorables et destructrices, et finalement à partir des relations avec d'autres hommes. La souffrance issue de cette source, nous la ressentons peut-être plus douloureusement que toute autres ; nous sommes enclins à voir en elle un ingrédient en quelque sorte superflu, même si, en termes de destin, elle n'est peut-être bien pas moins inéluctable que la souffrance d'une autre provenance.

  • Le texte commence en rappelant que la quête de bonheur est une quête universelle – on peut toutefois discuter cette affirmation en rappelant que les hommes peuvent chercher plutôt la liberté ou l’excellence morale (cf. cours d’introduction générale sur La morale).
  • Ici, ce qui est important, c’est que si les hommes cherchent le bonheur et que cette quête est vaine, les hommes seront voués à la déception donc au malheur. Or c’est précisément ce que Freud va montrer.
  • Tout d’abord, le bonheur est un concept vague puisqu’il peut désigner deux réalités différentes : l’absence de souffrance (qui sera développée au §2) et la possibilité de vivre des plaisirs intenses.
  • Cette ambiguïté pose déjà un problème : si le bonheur existe sous deux formes, on ne sait pas laquelle chercher et on risque de ne pas trouver le bonheur.
  • En outre, il sera difficile de combiner l’absence de problèmes et des émotions intenses : en général, si on cherche les émotions intenses, on renonce au bonheur tranquille (cf. la fable de l’ouverture, « Le loup et le chien »).
  • Or l’homme est fait pour ressentir la souffrance. Elle est plus utile à la survie que son absence, donc se ressent mieux et plus intensément.
  • Il est remarquable que les gens heureux, surtout d’un bonheur calme, ne s’aperçoivent pas toujours qu’ils sont heureux, alors qu’on est toujours conscient de ses peines ou de ses souffrances.
  • Et la vie humaine est une source nécessaire de souffrances : ni sa vie, ni le monde, ni les autres ne sont voués à apporter une satisfaction durable à l’individu. Il est voué à la mort, généralement après avoir souffert. Le monde ne se soumet pas à ses caprices mais le broie et les autres sont souvent en conflit avec lui…
  • En outre, l’homme ne peut pas ignorer cette vocation au malheur. Il en fait l’expérience très jeune et l’expérience des autres devrait l’instruire des difficultés qui l’attendent… On peut donc dire que la conscience, le fait de savoir ce que nous sommes, c’est-à-dire des êtres incapables de définir rigoureusement le bonheur, et voués à la souffrance, peut faire et probablement fera obstacle à notre bonheur.

  1. Textes de Schopenhauer

Textes n°4 et 5 du dossier

Schopenhauer (1788-1860), Le monde comme volonté et comme représentation

Nous sentons la douleur, mais non l’absence de douleur ; le souci, mais non l’absence de souci ; la crainte, mais non la sécurité. Nous ressentons le désir, comme nous ressentons la faim et la soif ; mais le désir est-il rempli, aussitôt il en advient de lui comme de ces morceaux goûtés par nous et qui cessent d’exister pour notre sensibilité, dès le moment où nous les avalons. Nous remarquons douloureusement l’absence des jouissances et des joies, et nous les regrettons aussitôt ; au contraire, la disparition de la douleur, quand même elle ne nous quitte qu’après longtemps, n’est pas immédiatement sentie, mais tout au plus y pense-t-on parce qu’on veut y penser, par le moyen de la réflexion. Seules, en effet, la douleur et la privation peuvent produire une impression positive et par là se dénoncer d’elles-mêmes. Le bien-être, au contraire, n’est que pure négation.

Aussi n’apprécions-nous pas les trois plus grands biens de la vie, la santé, la jeunesse et la liberté, tant que nous les possédons ; pour en comprendre la valeur, il faut que nous les ayons perdus, car ils sont aussi négatifs. Que notre vie était heureuse, c’est ce dont nous ne nous apercevons qu’au moment où ces jours heureux ont fait place à des jours malheureux. Autant les jouissances augmentent, autant diminue l’aptitude à les goûter le plaisir devenu habitude n’est plus éprouvé comme tel. Mais par là même grandit la faculté de ressentir la souffrance ; car la disparition d’un plaisir habituel cause une impression douloureuse. Ainsi la possession accroît la mesure de nos besoins, et du même coup la capacité de ressentir la douleur.

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