Architecture art
Thèse : Architecture art. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Souly Naceur • 6 Janvier 2019 • Thèse • 3 794 Mots (16 Pages) • 607 Vues
L'ARCHITECTURE EST-ELLE ENCORE UN ART ? par M. Jean-Louis JOLIN, membre correspondant
Lorsque j'étais étudiant à l'école des Beaux-Arts, nous ignorions tout de la réalité des choses et nous voulions savoir comment naissait un édifice. Nous avons donc demandé à Paul Herbe, le patron de l'atelier, de nous raconter les péripéties d'une de ses réalisations.
Ses yeux s'étaient plissés et, avec son petit sourire, il s'était contenté de nous dire : "Ah, vous voulez savoir comment c'est devenu dégueulasse !
Sur le moment, je n'ai pas vraiment compris. Depuis, pour avoir beaucoup regardé et pas mal pratiqué, cette phrase me revient à l'esprit trop souvent.
Je suis en effet consterné par la médiocrité de l'architecture actuelle.
A part de brillantes exceptions le résultat global n'est pas vraiment "globalement positif. Si bien que j'en arrive à me demander si l'architec- ture est toujours un art.
Autrefois, en effet, l'architecture était considérée comme un Art.
Un art majeur, même.
C'est par l'architecture que les princes et les prêtres ont voulu laisser un témoignage de leur gloire ou de celle de Dieu. C'est par l'architecture que les peuples ont manifesté la preuve de leur génie.
L'architecture n'était pas le seul fait des puissants. Elle s'exprime, avec peut-être davantage de bonheur encore, dans les plus modestes constructions, certainement pas édifiées par les artistes les plus renommés.
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L'ARCHITECTURE EST-ELLE ENCORE UN ART ?
Il suffit de parcourir la campagne ou les vieilles villes de France et d'Europe pour être étonné par la qualité, l'invention en même temps que l'économie de moyens de l'architecture populaire.
Depuis peu de temps - environ l'après-guerre - il n'est plus rien de tout cela. Maintenant, l'architecture n'est plus un art. C'est une activité parfaitement banale, comme l'agro-alimentaire ou la construction mécanique, avec en plus une mauvaise odeur d'influences et d'argent. A vrai dire on ne conçoit plus d'ARCHITECTURE, on FAIT du BATIMENT. Il faut en convenir, on en est arrivé à l'heure actuelle à un niveau de médiocrité rarement atteint, et généralisé dans le monde.
Le phénomène est suffisamment grave pour qu'on l'examine avec attention.
D'abord comment se mêlent l'art et l'architecture ?
Contrairement aux autres disciplines artistiques l'architecture n'est pas un art "d'agrément", avec le côté futile qu'on pourrait y voir. Si le peintre et le musicien peuvent imaginer une œuvre "gratuite", sans autre rôle précis que d'émouvoir, l'architecte ne peut concevoir un édifice sans objet. Son œuvre répond toujours à une fonction et à un programme déterminé.
De plus cette discipline se manifeste par l'utilisation de matériaux déterminés répondant à des rôles précis, d'aspect et de coûts très divers et mis en œuvre suivant des techniques particulières.
L'architecture est donc - pour moi - un mélange complexe de divers ingrédients : la matérialisation d'un programme donné, la maîtrise d'une technique, un certain talent pour des assemblages de volumes et de proportions satisfaisants ainsi qu'une certaine dose d'aberration - un grain de folie - qui fait distinguer "l'architecture" du "bâtiment".
C'est du juste dosage de cette alchimie mystérieuse que résulte la beauté d'une construction. Qu'un seul composant manque, ou domine au contraire, et l'on court à la médiocrité, ou à la catastrophe.
Ce dosage, fait de savoir et d'intuition, a su se perpétuer pendant des millénaires.
Je constate qu'il s'est évaporé petit à petit depuis quelques décennies.
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L'ARCHITECTURE EST-ELLE ENCORE UN ART ?
Comment en est-on arrivé à la situation actuelle ? Qui, maintenant, est responsable de l'architecture contemporaine ?
Pour l'homme de la rue, relayé par les médias, ce sont évidemment les architectes.
Les architectes sont les chefs d'orchestre qui, faisant un TOUT des ingrédients évoqués plus haut, transforment un programme, une volonté, des matériaux, un espace et de l'argent en un volume bâti. Comme on ne connaît ni leur rôle ni leur responsabilité on les prend facilement pour les seuls responsables de ce qui se construit.
Ils sont plusieurs milliers. Jusqu'à ces dernières années, ils avaient tous du travail, certains beaucoup. Ce sont eux qui conçoivent les immeubles de logements collectifs, les écoles, les universités, les bureaux, les édifices publics qui devraient faire la fierté de notre civilisation moderne.
Pourtant, il n'en n'est rien, ou presque. On constate plus souvent dans leur œuvres l'indigence et la médiocrité que le talent et la sensibilité.
Quelles sont les causes de cette indigence ? Les architectes sont-ils incompétents ?
L'enseignement de l'architecture est probablement responsable d'un certain nombre d'échecs, surtout en France.
Quand j'étudiais l'architecture, l'Ecole des Beaux-Arts était une étonnante école d'autodidactes, où l'on ne nous apprenait rien sinon à savoir apprendre tout seul. Une moitié de l'enseignement était bonne et l'autre mauvaise. Après 1968, on a radicalement renversé la proportion. Maintenant je ne sais plus trop comment cela se passe, mais finalement - comme avant - l'enseignement est donné, et surtout reçu diversement. Au bout d'une longue initiation il distille un peu de tout : des artistes incapables de dépasser le stade de la belle image, des hommes d'affaires, des plagiaires, des théoriciens fumeux, des incapables et même - plus souvent qu'on ne croit - de véritables architectes.
Le reproche que je ferais aux architectes c'est leur immodestie. Elle résulte de ce qu'on leur a
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