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L'immédiateté

Dissertation : L'immédiateté. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  7 Décembre 2018  •  Dissertation  •  3 108 Mots (13 Pages)  •  1 363 Vues

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Comment donner à la lenteur ses lettres de noblesse dans un monde où l’immédiateté  prends de plus en plus de place  

Avant de répondre à la question du comment, essayons de comprendre (rapidement) ce qu’est l’immédiateté et quelle place a-t-elle pris dans notre société.  Quant à la lenteur, les dictionnaires la définissent comme étant le contraire de la rapidité ou le manque de rapidité.  C’est curieux de définir un terme par la négation !!!!  Comme si la lenteur était synonyme de paresse.  Maintenant, passons à l’immédiateté.

Disons qu’un enfant se passionne pour la vie des insectes. Selon Jack London, deux comportements bien différents s’offriraient à lui. Première option : il se consacre tout de suite aux diptères ; il guette leur bourdonnement, poursuit les mouches et les taons sans attendre, s’il faut à travers champs. Ou alors, option moins rapide et a priori plus confinée : il vise des études d’entomologie ; d’ici là, il prend le temps de comprendre les langues, les sciences et les nombres complexes requis pour entrer un jour à l’Université et que le maître s’obstine patiemment à lui « marteler ». D’un côté : le profit instantané d’assouvir un intérêt spontané. De l’autre : l’avantage différé de disposer d’un savoir plus lointain mais aussi plus élaboré. Entre user sans délai ou plus tard de sa liberté, entre estimer « immédiatement [ou] à long terme » la valeur d’un savoir, on peut difficilement tout s’octroyer : c’est pour cela que le temps d’apprendre à devenir compétent est généralement en tension avec celui d’agir à sa guise et sur le champ.

On comprend à travers cet exemple que l’immédiateté est la recherche d’un assouvissement rapide du plaisir superficiel, la recherche d’un résultat à court terme, sans la recherche de consolidation de la connaissance et de la construction de soi-même.  

Il faut dire que nous demandons toujours plus à nos enfants et nous exigeons de leur part un apprentissage toujours plus tôt dans leur développement.  Certains parents commencent même pendant la grossesse en faisant écouter du Mozart, du chinois, et cetera !!!  Il faut que nos enfants aient des têtes pleines avant d’avoir atteint l’âge adulte, et tant pis pour ceux qui ne peuvent pas suivre, même si ces derniers temps nous avons légèrement pris conscience de l’amplitude du décrochage scolaire.

Pour ce faire, nous avons développé une technologie qui tend à réduire les délais d’attente : le micro-processeur, qui, d’année en année, que dis-je, de jour en jour, réduit les délais d’attente.  Qui ne s’est pas impatienté devant la lenteur apparente d’un ordinateur en cours d’allumage, afin de pouvoir trouver rapidement une réponse à une question ?  Quel enfant a encore la patience d’aller feuilleter un dictionnaire afin de trouver une définition et prendre ainsi le temps de papillonner dans les pages du dictionnaire en s’arrêtant sur un dessin d’avion ou de corps humain et en découvrant par hasard l’existence d’un muscle au nom étrange et poétique qu’est le zygomatique ?  Anatole France disait : « ce n’est pas dans la connaissance qu’est le bonheur, mais dans l’acquisition de la connaissance ».  Cela mérite donc de prendre du temps.

Par ailleurs, l’image est venue renforcer cette immédiateté.  « Le poids des mots et le choc des photos» (slogan de Paris Match).  Nous le constatons à travers le développement des media qui se prétendent d’informations : BFMTV, CNN, LCI, etc (notez la ressemblance phonétique entre media et immédiat).    Nous avons constaté les limites de leur intérêt après chaque catastrophe : tsunami, tremblement de terre, attentat.  Les journalistes, afin d’être les premiers à donner l’information, ne prennent même pas le temps de vérifier leurs sources et se trompent, voir mettent en danger les forces de l’ordre pendant leur mission (rappelez-vous de l’attentat de l’Hyper Casher !!!!)  Mais nous continuons de regarder et d’écouter ces journalistes qui se contentent de raconter l’instant en éliminant la recherche d’analyse.  Pourquoi ?  Ils assouvissent notre besoin de plaisir instantané avant de passer au plaisir suivant en oubliant le précédent.  Un peu comme un drogué qui n’attend que le shoot suivant.  Nous nous promettons de ne plus regarder ce genre de media, de se désintoxiqué de l’immédiateté, et pourtant…

Nous vivons dans un monde où nous avons que des mots comme productivité, gestion de l’agenda.  Un monde dans lequel la formation continue consiste avant tout, à apprendre la gestion du temps afin d’être efficace.  Un monde dans lequel, il est has-been d’écrire une lettre sur papier (puisque le SMS existe).  Un monde dans lequel chacun réagit sur tweeter (tweet : gazouillis, message bref), plutôt que de prendre le temps de la réflexion et ainsi d’analyser l’évènement en le remettant dans le contexte.  Un monde dans lequel, le lecteur s’arrête sur une image plutôt que de prendre le temps de lire l’article au complet.  Ainsi pourquoi écrire un article ?  

Tout ceci a commencé avec la première guerre du Golfe.  Rappelez-vous des images qui circulaient en boucle sur CNN montrant toujours le même obus téléguidé tombant sur un objectif.  Chacun pouvait suivre en temps réel l’avancée des soldats américains sur le sol irakien.  Ou tout du moins, le téléspectateur avait l’impression de suivre.  Dans la réalité, il regardait une pièce de théâtre, savamment orchestrée par une poignée d’hommes.  Mais cela ne nous a pas servi de leçon, nous recommençons après chaque nouvel évènement (attentat, dérapage de langage, catastrophe naturelle).  

Enfin dans le monde de l’entreprise, nous entendons régulièrement les expressions suivantes : je suis surbooké.  Il faut gérer son temps.  Il faut optimiser son temps…  Les journalistes relayent en boucle l’information suivante émanant de nos dirigeants: la productivité est mauvaise par rapport aux coûts de production ; c’est la raison pour laquelle les entreprises délocalisent à l’étranger, etc.  

Alors que faire ?

Commençons par nos enfants.  A l’instar de la Maçonnerie dans laquelle un apprenti prends le temps nécessaire, dans le silence, pour devenir compagnon qui prendra, à son tour, le temps pour devenir Maître, donnons le temps à nos enfants de se développer, faisons confiance dans leur capacité d’apprentissage, de compréhension et de devenir des penseurs, des sages.  Dissocions l’espace temps de l’école de l’espace temps de la société.  Il ne s’agit pas d’apprendre pour apprendre.  Il s’agit de leur donner le goût de la curiosité, de leur transmettre la joie et le bonheur de la recherche de la connaissance.  C’est à ce prix que nous pourrons redonner les lettres de noblesse de la lenteur.  Il a fallu 10 ans pour construire l’aile du Midi et l’aile Nord du Château de Versailles, maintenant, il faudrait réaliser ces mêmes travaux en 6 mois, sans se soucier de leur durabilité dans le temps, tout en exigeant de la durabilité ! Quelle contradiction !!!

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