Kolle
Dissertation : Kolle. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar lololololita • 18 Novembre 2015 • Dissertation • 2 966 Mots (12 Pages) • 878 Vues
Dissertation philosophique
Prendre conscience de soi est ce devenir étranger à soi ?
La conscience vient du latin cum scienca qui peut se traduire par « être présent à son savoir ». Prendre conscience de quelque chose c’est réaliser, découvrir quelque chose. Ainsi prendre conscience de soi implique plusieurs degrés : la prise de conscience de son existence en tant que sujet pouvant interagir avec le monde ; la prise de conscience de soi en tant que conscience réfléchissant par soi-même ; ou la prise de conscience de soi en tant que personne unique, ce qui implique le caractère, les traits de sa personnalité, les sentiments, le savoir. Devenir implique une progression ; la conscience de soi n'est pas innée, on l'acquiert au cours de l'éducation. D'abord le nouveau né se rendra compte de son existence en tant que sujet avec l'influence qu'il possède sur le monde, qui se manifeste à travers les réactions d'autrui par rapport aux siennes. Puis il prendra ensuite conscience de son unicité, que l'on peut associer au moment où il commencera à dire « je » car il devient alors une personne.
Mais si le sujet prend automatiquement conscience de son existence en tant que sujet, il n'en va pas de même pour prendre conscience de soi dans son intégralité, c'est à dire se découvrir dans son caractère, sentiments, émotions, se connaître et se comprendre. La prise de conscience de soi ne s’arrête pas là, elle se réalise surtout avec une quête de soi réalisée avec un travail de recherche et d'analyse.
Alors si prendre conscience de soi c'est se découvrir en tant que sujet et se chercher pour se connaître, on peut se demander en quoi cela entraînerait un éloignement de soi. Ce qui est étranger est par définition ce qui n'est pas soi, ce qui ne ressemble pas au sujet ou qui n'as pas de rapport avec lui. Cela semble donc, au premier abord, paradoxal que de le mettre en corrélation avec la prise de conscience de soi. Mais cela n'a en vérité rien d'un paradoxe, car la prise de conscience de soi nécessite une extériorisation de soi, afin d'avoir un point de vue objectif. Pour cela on peut utiliser ce que nous retournent les autres sur soi, avoir un point de vue critique sur soi ou essayer la psychanalyse. C'est un travail laborieux qui nécessite une remise en question complète de soi. Mais si le sujet a besoin de s’extérioriser pour prendre conscience de soi on peut se demander alors ; le sujet reste t-il lui même en prenant conscience de soi ?
Cela implique plusieurs autres interrogations : Comment en prenant conscience de soi s’éloigne t-on de soi ? Dans quelle mesure nous restons nous même en prenant conscience de soi ? Peut on arriver à une conscience de soi totale ? C'est dans cet ordre que nous allons tenter de répondre.
Premièrement, prendre conscience de soi exige un éloignement de soi, afin de pouvoir se voir objectivement. Le sujet peut prendre conscience de soi en utilisant le retour d'autrui ; en passant d'une relation sujet sujet à une relation sujet objet ; ou en partant en quête de la part étrangère que nous possédons, l'inconscient. Nous allons maintenant analyser ces trois cas.
Le sujet prend tout d'abord conscience de ce qu'il est à travers ce que vont lui renvoyer les autres, C'est eux qui vont le juger en premier et qui vont lui retourner ce jugement et c'est à travers leurs réactions qu'il va se voir pour la première fois. Si les autres ne nous renvoient pas notre image, notre existence, nous ne pouvons pas prendre conscience de celle-ci. C’est quand nous interagissons avec les autres que nous existons et que nous nous rendons compte que nous vivons. Les premiers qui lui renverront son image seront ses parents quand l'enfant comprendra que ses actions à lui peuvent motiver des réactions chez eux. Il se rendra compte alors de son existence vis à vis des autres, en utilisant des étrangers à lui pour se découvrir. Il va prendre conscience de ce point de vue étranger à lui pour se connaître, ce qui le fera s'extraire de lui même, et lorsqu'il prend conscience de lui avec les regards des autres il utilise lui même un regard extérieur. Comme Jean Paul Sartre le montre dans son essai l'être et le néant où il écrit « autrui est le médiateur indispensable entre moi et moi même ». Car dans ce texte c'est la présence d'autrui qui va faire prendre conscience au sujet de la bassesse de son geste. S'il n'avait pas été là le sujet ne s'en serait pas aperçu. Il va se voir alors à travers le regard qu'autrui peut porter sur lui, et c'est ce regard qui va le définir « je reconnais que je suis comme autrui me voit ». C'est autrui également qui apprend le langage au sujet, et ce langage étranger va transformer et s'immiscer dans sa pensée. Ce sont ces mots partagés avec des millions d'autres qui s'exprimeront dans sa propre conscience et avec lesquels il réfléchira. Il va prendre conscience de lui avec ce « je » qui le désigne lui, sujet unique, et n'incluant personne d'autre quand il le prononce, qui pourtant est également utilisé par tout le reste de la population
Pour prendre conscience de soi, le sujet va également essayer d'avoir un retour intérieur sur ses pensées, il va se remettre en question et essayer d'analyser sa conscience. Or lui sujet, définit par Descartes comme « chose pensante » ne va plus alors se voir lui même comme un sujet, un être, mais il va s'analyser comme il analyserait un autre. En cherchant à prendre conscience de soi il va s'extirper de lui même, et s'examiner comme s'il était un sujet d'analyse. Son moi va essayer de comprendre son moi même, ce qui créera une séparation et une distance entre le moi qui observe et le moi observé. Cette distance critique que le sujet prendra vis à vis de lui même va le mettre alors dans la position d'un étranger. Sa relation de sujet à sujet va alors se transformer en relation de sujet à objet. Il s’extériorise en essayant de se comprendre, devenant étranger à une partie de lui.
Le sujet peut également essayer de prendre conscience de soi en partant à la découverte d'une partie de lui même qui lui est complètement inconnue mais qui le constitue pourtant ; son inconscient. L'inconscient d'un point de vue scientifique ce sont les toutes les décisions automatiques que prend notre cerveau sans que l'on y ait réfléchi consciemment. D'un point de vue psychologique ce sont les sentiments et idées du sujet refoulée par le conscience et la loi morale et donc qui ne s'exprime pas ouvertement dans la conscience. Dans les deux cas c'est une partie du sujet qu'il ignore. Or prendre conscience de soi implique aussi prendre conscience de cette partie là de nous que nous ne maîtrisons pas, qui peut effrayer ou intriguer. L'inconscient du point de vue psychologique se manifeste à travers les rêves, les lapsus, les mal-êtres du corps et les actes manqués. Sigmund Freud, psychanalyste ayant étudié cet inconscient a définit une nouvelle approche du sujet constitué par le ça, le moi et le surmoi. Le moi étant l'entente entre le ça et le surmoi, c'est à dire la conscience du sujet et ses pensées ; le ça étant l'inconscient ; et le surmoi étant les lois morales imposées par la vie en société, qui maîtrisent l'inconscient. Or quand le sujet prend conscience de soi cela implique la prise de conscience de ces trois parties dans sa conscience. Le sujet doit faire la part des choses entre ce qui est chez lui acquis et appris avec la société et son environnement : qui donc n'est pas ce que lui est mais ce que les normes lui imposent d'être, entre ce qui est naturel et instinctif chez lui : les décisions et actions mécaniques qu'il ne réfléchi pas, ces désirs inavoués dont il n'a pas habituellement conscience. Il se retrouve alors face à une part de lui complètement étrangère, qui pourtant possède une emprise et une importance immense chez lui. Cette découverte peut alors le troubler et l’interroger sur son identité et sa connaissance de soi. Car en prenant conscience de son inconscient il a trouvé en lui même un étranger.
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