Zola - L'aveu de Séverine
Commentaire de texte : Zola - L'aveu de Séverine. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar marielouise guillaume • 16 Mai 2021 • Commentaire de texte • 2 693 Mots (11 Pages) • 706 Vues
Chapitre 8 de "Chez Séverine, après la montée ardente..." à "...de la maison endormie." (p 284-285)
Introduction
La Bête humaine est un roman d'Emile Zola qui fut publié en 1890, dix-septième volume de la série Les Rougon-Macquart. Dans cet extrait du chapitre 8, dans la chambre de l’impasse d’Amsterdam, Jacques et Séverine passent la nuit ensemble et s’adonnent à leur passion. Séverine, entraînée par les souvenirs qui surgissent dans cette chambre, avoue à son amant les brutalités de Roubaud et lui raconte comment il l’a associée de force au crime de Grandmorin. Jacques, pris d’une curiosité morbide, l’interroge en détail sur le meurtre et les sensations qu’elle a éprouvées. Problématique : Comment le narrateur transforme-t-il l’aveu du crime en une scène où se révèlent les penchants bestiaux et mortifères des deux protagonistes ? Axes :
I. L’aveu fascinant et morbide :
Cet extrait s’inscrit à plus d’un titre dans la dynamique dramatique du récit. Il apparaît en effet comme une scène-catalyse, un moment émancipateur où l’intrigue progresse et où la bestialité des personnages se déploie, sans que toutefois aucun deux n’atteigne une réelle complétude.
Frustrée par l’astuce narrative de la rétrospection, la curiosité du lecteur est enfin satisfaite par l’aveu de Séverine qui offre un récit exhaustif de l’assassinat de Grandmorin. Trop longtemps contenue par Séverine, cette confession livrée à Jacques, son amant, résonne comme une révélation pour la jeune femme.
A. Un récit exhaustif et détaillé
1. la progression chronologique du récit du meurtre
Par ses nombreuses prises de parole, Jacques fait progresser le récit dans le détail → nombreux connecteurs logiques d’addition (« et », « et alors », « et ensuite » ...) qui marquent cette progression chronologique :
- « Et tu étais aplatie sur ses jambes, et tu l’as senti mourir ? » (a) - « Et alors, le couteau... ? » (b) - « Et ensuite, il a eu une secousse ... ? » (c) - « Et il est mort, et à toi qu’est-ce que ça t’a fait ... ? » (d)
▬► noter que ces quatre interrogations suivent le déroulement du meurtre : l’immobilisation de la victime (a), l’assassinat (b), les réactions physiques de la victime (c) et de la complice (d)
2. le récit sordide
Séverine évoque à Jacques l’exécution du crime en n’épargnant aucun détail sordide, poussée par la curiosité morbide de son amant : - cf vocabulaire du corps humain : Jacques : « aplatie sur ses jambes », « un coup sourd ... pas un déchirement ? », « des secousses qui le raidissaient » Séverine : « d’un bout à l’autre de son corps », « jusque dans ses pieds » - et champ lexical du crime violent : Jacques : « le couteau entrer », « un coup sourd », « une secousse » Séverine : « un coup sourd », « rien qu’un choc », « trois secousses »
▬► noter la reprise des mots de Jacques par Séverine, comme si c’était Jacques qui avait commis le crime par anticipation
3. les indices de la curiosité morbide de Jacques
- « Jacques ... la retint encore. Non, non, attends ... », « repris de la curiosité du meurtre » → verbes qui marquent de désir de savoir - accumulation de « et » → surenchère dans le besoin de savoir - marques de l’insistance : « tu es sûre ? », « hein ? », « n’est-ce pas ? » → interrogations redondantes - répétition du besoin de savoir : « dis-moi, dis-moi ... bien franchement » , « je t’en prie, dis-moi tout ... dis-moi ce qu’on éprouve » → noter la répétition du verbe « dire » à l’impératif et les marques d’intensité avec l’adverbe « bien », le pronom indéfini « tout »
B. La volupté macabre que suscite le récit chez les deux amants
1. La délectation progressive de Séverine
A mesure que Séverine évoque à Jacques la préméditation puis l’exécution du crime, n’épargnant aucun détail sordide, elle connaît une franche délectation :
- d’abord pudeur, honte : « A moi, oh ! je ne sais pas », « non, non, pas de la peine ! », « Du plaisir, ah ! non, pas du plaisir ! » → noter les nombreuses négations qui montrent qu’elle refuse dans un premier temps d’avouer ce plaisir - puis un plaisir sans mesure qui la rend suffocante et haletante, comme en témoigne ici le style saccadé avec ses interrogatives, ses exclamatives et ses points de suspension : "- Mon Dieu ! Est ce qu’on peut dire ça ? [...] ça vous emporte, oh ! si loin, si loin ! J’ai plus vécu dans cette minute-là que dans toute ma vie passée..." → noter l’expression hyperbolique du plaisir : verbe « emporter », « si loin, si loin » (répétition de l’intensif), « j’ai plus vécu dans cette minute-là que dans toute ma vie » (comparatif de supériorité) - vocabulaire du plaisir : « montée ardente de ce long récit », épanouissement de son besoin de joie », « Jacques ... qui brûlait comme elle »
→ Evacuant cette culpabilité abominable, le crime de Grandmorin, Séverine éprouve étrangement une volupté secrète et insoupçonnable, celle de la mort, qui est nécessaire à sa propre jouissance : "Jacques cette fois l’avait prise ; et Séverine aussi le prenait".
2. La subjugation de Jacques
Il apparaît que Séverine se révèle une véritable initiatrice, transmettant à Jacques, par un jeu d’écho, la sensualité macabre de son aveu. Littéralement subjugué par cette force envoûtante, Jacques
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