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Synthèse Albert Camus

Commentaire de texte : Synthèse Albert Camus. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  29 Janvier 2019  •  Commentaire de texte  •  2 222 Mots (9 Pages)  •  565 Vues

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        Introduction: L’État de siège est une pièce de théâtre écrite en 1948 par Albert Camus. Né en 1913 et mort en 1960, il est l’un des romanciers et dramaturges français les plus célèbres de son époque. Il est notamment l’auteur de L’Étranger en 1942 ou encore de La Peste en 1947. Dans cette pièce, il traite, métaphoriquement, du fléau de la peste, ayant ravagé l’Europe durant le XIVe siècle. Ici, l’épidémie personnifiée, incarne tout totalitarisme afin de mieux montrer son influence sur les hommes. L’extrait soumis à notre étude est issu de la deuxième partie de la pièce et présente le nouveau régime totalitaire de la peste en action ainsi qu’un début de révolte mené par Diego. Nous pouvons alors nous demander comment l’extrait rend visible la logique d’un régime totalitaire et d’un début de révolte.

I. Un régime totalitaire en action

1) Une confrontation pathétique

Tout d’abord, on remarque très distinctement dans cet extrait le régime mis en place par la Peste. En effet, on peut y voir la présence de plusieurs faits montrant l’injustice du gouvernement instauré. L’un d’eux est la confrontation entre la femme et Nada, symbole des inégalités que les habitants de Cadix subissent. Durant ce dialogue, la femme est en posture de supplication. On le voit rien qu’à ses premiers mots dans la scène où elle implore Nada de l’aider : “mes enfants n’ont pas de toit, quoi de plus pressé que de leur en donner un ?”. (la tournure de la question met en valeur « de plus pressé ») Par cette phrase elle montre que son raisonnement est fondé sur l’affectif et le sentiment maternel : or, Nada n’est pas touché par les sentiments lui qui incarne la logique administrative. « On te donnera un logement si tu fournis une attestation ». Dans sa réplique des lignes 19 à 25, la femme revendique une vie simple fondée sur la satisfaction des besoins primaires. Elle insiste sur l’idée de « justice » à travers l’anaphore “La justice est que les enfants mangent à leur faim et n’ai pas froid. La justice est que mes petits vivent” (l. 19-20) et sur la faiblesse de son exigence en utilisant deux fois le pronom indéfini « rien » (l.23 et 24). Elle apparaît donc comme une mater dolorosa. Dans sa dernière phrase à travers la proposition « qui ne vous le fassent pardonner » elle replace ses propos sur le terrain de la morale et de la religion et prouve que son humanité,

son humanisme, la distinguent de ceux qui gouvernent. Somme toute la femme nous fait comprendre que le peuple est à bout de souffle d’autant plus qu’il fait face à des situations inédites dont Nada est le symbole.

2) Le nouveau visage de Nada :

Au cours de la pièce, on observe une évolution dans le personnage de Nada. Au début, on le découvre comme quelqu’un de différent des autres qui n’est aimé par personne. Suite à l’arrivée de la Peste et de sa secrétaire, il change beaucoup. (ayez en tête de quelle manière ce changement était visible dans la mise en scène vue en classe.) Tout d’abord, non seulement il passe du côté du dictateur mais il montre son autorité sur les habitants telle une revanche sur le passé. Dans cet extrait, Nada fait face à la femme en montrant de quoi il est capable. Bien qu’ils soient dans le même camp, Nada et la Peste ont une manière de parler bien différente. Tandis que la Peste cherche surtout à affirmer son autorité, Nada sait répondre à la femme sans la menacer tout en gardant son propre caractère. Effectivement on retrouve sa disposition pour la prophétie (l.16,17) “il faudra bien que tout s’achemine vers l'accomplissement dernier qui est le silence et  la mort” mais aussi son coté nihiliste (l.36) “Vive rien”. Finalement, c’est Nada qui a le dernier mot : il prononce une longue phrase assez obscure, poétique (cf deux allitérations dont une en “p” l.29-30 et une en “d” l.32-35) et aux termes métaphoriques. Celle-ci évoque cependant le régime en place avec des images liées à la grandeur et à la force (« anges policiers aux ailes majuscules ») et d’autres à la petitesse et à la soumission (« fourmis bien élevées »). De +, on relève une allusion à la guerre d’Espagne à travers la formule “vivre à genoux plutôt que de mourir debout” : cette devise fait référence à celle prononcée par Dolores Ibárruri pendant la guerre d’Espagne (républicaine) “Mieux vaut mourir debout que de vivre à genoux”. Pour Nada la soumission devient le nouvel ordre sans questionnement moral.

3) L’enjeu du langage Or, tout en étant fondé sur l’injustice le régime l’est aussi sur une manipulation du langage qui constitue un enjeu de pouvoir. On a déjà noté l’hermétisme des paroles de Nada, lequel à deux reprises souligne que l’existence même de la dictature est liée à une sorte d’obscurantisme: “Il s’agit de faire en sorte que personne ne  se comprenne tout en parlant la même langue » (l. 12-13) et « Personne ne se comprend plus : nous sommes dans l’instant parfait » (l.36-37). D’ailleurs la femme déclare ligne 9 « Je n’ai jamais rien entendu à ce langage » (entendre signifie ici « comprendre) et elle associe ce langage au diable “Le diable parle ainsi et personne ne le comprend” (l.10). Ce n’est pas un hasard si Camus utilise ce terme pour définir Nada à ce moment de la pièce car, étant une sorte de prophète avec un caractère impitoyable, il incarne parfaitement la figure du diable. En outre, plus loin dans l’extrait la Peste prononce des paroles qui rappellent deux idées essentielles. La première est que tout totalitarisme a besoin de sa « novlangue » : « Apprenez-leur les maîtres-mots jusqu’à ce qu’eux aussi répètent toujours la même chose, jusqu’à ce qu’ils deviennent les bons citoyens dont nous avons besoin » L’abrutissement du peuple, la massification des individus (cf à ce propos la ph du Chœur « nous voici une masse ») sont rendus possibles par une action sur la langue. La seconde est que ce

type de régime a peur de la parole qui, précisément, peut initier la révolte : c’est pourquoi la Peste exige qu’on « écrase les bouches, que l’on bâillonne ».

Pour le pouvoir, il faut faire taire toute tentative de révolte mais cela, malgré le recours à la force, n’est pas aussi simple qu’il y paraît comme le prouve la confrontation entre Diego et la Peste.

II. Un début de révolte

1) Un renversement de situation mené par Diego

Diego, durant la scène, fait preuve de courage en se confrontant à La Peste et en initiant la révolte. On voit bien que c’est lui qui mène ce renversement de situation. Son arrivée sur le plateau intervient juste après une didascalie (l.38-40) qui rappelle l’absence de libertés (cf miradors, barbelés) et ses propos montrent sa rage, son désespoir et sa peur. Dans se 1ère réplique de l’extrait (l.43-45) il interpelle le peuple/ le chœur. Par ses questions rhétoriques il cherche à leur montrer qu’ils ont trahi leur pays (Où est l’Espagne ?) ; l’emploi du terme « décor » qui renvoie à l’univers du théâtre ainsi que du GN « un autre monde » montre qu’il a compris le basculement dans un espace artificiel et que se révolter est nécessaire pour retrouver son humanité. Ensuite, en réponse au Chœur il prononce un cri de libération qui est essentiel dans la pièce : “J’ai peur aussi. Cela fait du bien de crier sa peur.” Cet aveu est le premier pas vers la libération de Cadix et est le premier signe qui rattache le personnage au cogito camusien « Je me révolte donc nous sommes ». A travers ces paroles, il tente de rassembler le peuple et de le monter contre la Peste. On voit bien que c’est le meneur de ce mouvement Enfin, le personnage affronte le dictateur. Leur opposition est transcrite par un échange de brèves répliques autour du thème de l’innocence. Cette idée associée à la pureté, l’enfance, prouve que, comme la femme avec la justice, Diego se situe du côté de valeurs morales qui n’ont plus cours. Il interpelle la Peste à travers une épanadiplose : “L'innocence, bourreau, connais tu cela, l'innocence !”. Face aux réactions de la Peste rire (cf didascalie l.64) et rejet « L’innocence ! Connais pas ! » Diego tente la confrontation physique : “Alors approche. Le plus fort tuera l’autre” mais évidemment la Peste conserve le pouvoir et le prouve en multipliant les ordres à ses gardes (l.75-76) ce qui pousse Diego à la fuite. Cela prouve que, certes, il a montré son courage, mais il ne peut battre l’Homme tout seul.

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