Philosophie, l'imagination
Cours : Philosophie, l'imagination. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar assia2335 • 30 Octobre 2019 • Cours • 6 837 Mots (28 Pages) • 579 Vues
TD Philosophie Générale. 18/09
« En vérité, il faut qu’il soit longtemps suspendu au sommet, comme un lourd orage, celui qui doit un jour allumer la lumière de l’avenir. » - Nietzsche -
Une technique est un ensemble de moyens, dont l’exécution permet à elle seule d’obtenir un résultat escompté.
A partir de l’imagination, on arrivera à l’imaginaire, et à la détermination du réel.
On dit de l’imagination qu’elle est vive, mais on ne sait pas en quoi elle l’est, on la dénigre sans savoir ce qu’elle est, on dira d’elle qu’elle est intense, qu’on s’en méfie, mais on ne sait même pas quelle sont ses productions précises. On dit souvent que quelqu’un manque d’imagination, ou qu’il en a trop, comme s’il y avait un dosage, on n’aurait jamais la bonne dose d’imagination.
On se sert de l’imagination, c’est quelque chose qu’on a et qu’on utilise, mais ça n’est pas un instrument d’usage.
La grande différence entre l’imagination et un outil qu’on a et dont on se sert, c’est qu’on ne se sépare jamais de l’imagination, elle est consubstantielle. L’imagination est un avoir qui se dit sur le mode de l’être, c’est quelque chose qu’on a, mais parce qu’on l’est d’abord.
L’imagination est une faculté → « faculté » vient de « faculta » en latin, et qui a donné « facilité » → une faculté est une facilité, c’est-à-dire ce qui ne résiste pas, et qui ne demande aucun effort pour être réalisé → ça vient aussi du grec « dunamis » qui veut dire puissance, dans le sens « être capable de » → Aristote (De Anima (Traité de l’âme), livre II, chap. 5) distingue deux formes de puissance → celle de l’homme qui apprend à écrire, puis celle de l’homme qui sait écrire et qui peut l’exercer par lui-même, il suffit de le faire pour le faire → l’homme est avant tout un être capable d’être capable → mais l’homme n’a pas besoin d’apprendre à imaginer (une fois ses capacités cognitives développées) → Aristote définit comme une tension de l’âme la puissance acquise au 2ème sens → l’homme a une possibilité prête à agir → possibilité au sens logique du terme (ne pas être contradictoire) + possibilité au sens de quelque chose qui est réalisable, un « je peux / je suis capable de » fondamental → l’imagination semble être une tension de l’âme → si je veux, sans entrave, je peux imaginer → une faculté (ou une puissance) se définit par ce qu’elle produit → qu’est-ce que l’imagination a la capacité de produire ? → des images mentales, mais l’image mentale, comme telle, est un problème
« Imagination » vient du latin « imago » (qui a aussi donné « image ») → au sens latin du terme, c’est un portrait, puis ça a donné le sens des masques mortuaires (qui contient l’empreinte du visage sur lequel il est posé) → imaginer, c’est produire l’ « imago » de quelque chose → dans son Esthétique, Hegel donne le sens de l’imagination de « einbildungskraft » (puissance de mettre en image des choses) → conceptuellement, un portrait, c’est un artéfact (ce qui vient d’un travail, ce qui est le produit de l’homme) → c’est ni immédiat, ni donné, ni naturel → ça exige une transformation, ou une reprise du donné + un portrait exige un modèle + entre l’image et son modèle, il doit y avoir une différence ontologique, une différence de réalité → l’image comme « imago » se donne comme une copie de la chose originale → elle est marquée par une déficience ontologique → il y a une forme de dénivellation de l’être → cette dénivellation consiste en une double irréalisation → d’abord, tout portrait s’indique lui-même comme reproduction d’un modèle → une image a des limites, elle a un cadre → ce cadre est ce qui nous indique une forme de discontinuité entre ce qu’il y a dans l’image et ce qu’il y a hors de l’image → Jean-Luc Nancy (Au fond des images) écrit « Toute image a quelque chose de sacré » → sacré, c’est précisément ce que l’on ne peut pas toucher → il y a toujours quelque chose de stigmatisé dans l’image → une marque distinctive qui exhibe une différence de statut → « est stigmatisé ce qu’un trait retire et tient à l’écart » → l’image en tant que cadre est ce qui se retire du monde dans lequel elle est → l’image est une irréalisation par son isolation → 2ème irréalisation, l’image en tant que reflet n’est possible qu’en présence de sa source / son modèle (miroir)
L’imagination, c’est la représentation d’un objet en son absence → cette représentation s’indique elle-même comme en absence de cet objet → imaginer, c’est rendre présence de cette absence, mais pas en supprimant cette absence → c’est rendre présent l’absence en son absence même → l’imagination, c’est ce qui représente l’absent en la pleine conscience de son absence → § 28, Anthropologie du point de vue pragmatique, Kant définit l’imagination : « L’imagination est la faculté des intuitions hors de la présence de l’objet » → l’intuition, c’est presque un synonyme de perception → avoir l’intuition, c’est voir
Distinction conceptuelle présentation / présentification → présenter, c’est aller chercher l’objet qui manque pour le mettre devant nos yeux → au contraire, présentifier, c’est présenter en l’absence du présenté → en principe, la présence et l’absence sont des concepts contraires → avec l’imagination, il n’y a plus d’exclusion mutuelle → l’imagination substitue à la fameuse alternative d’Hamlet « être ou ne pas être » une conjonction → l’imagination, c’est être et ne pas être à la fois → et c’est parce que l’absence gagne dans ce compromis qu’en principe, on ne confond pas nos perceptions et nos imaginations (le présenté et le présentifié)
Aristote (Traité de l’âme, III, 3) parle de « phantasma » → la pensée à toujours un rapport avec la vérité (dans le sens de « je pense que », pas dans le sens de rêver) → penser quelque chose, c’est toujours penser en même temps que ce que l’on pense est vrai (de l’ordre de l’opinion, mon opinion, ce que je pense et dans quoi je suis engagé) → au contraire, l’imagination propose des images mentales neutres quant à leur véracité → 427 1527B, Traité de l’âme, Aristote « Devant les yeux, on peut se mettre des fictions (=imaginer) comme font ceux qui, dans les exercices de mémoire, évoquent et fabriquent des images. Or, se faire une opinion, n’est pas à notre discrétion, c’est nécessairement se tromper ou dire vrai. Et de plus, lorsque nous arrivons à l’opinion d’une chose terrible ou effrayante, d’emblée, nous éprouvons avec elle une émotion. » → la fiction imaginée s’indique elle-même comme irréelle → l’imagination est toujours le savoir intrinsèque de l’irréalité de ses propres productions → la fiction se sait comme fiction, comme irréelle → il y a un cas où fiction et irréalité se mélangent : la folie, le délire → le fou, c’est celui qui prend ses présentifications pour des présentations → Descartes, Méditations métaphysiques, première méditation « […] Ces insensés, de qui le cerveau est tellement troublé et offusqué par les noires vapeurs de la bile, qu’ils assurent constamment qu’ils sont des rois, lorsqu’ils sont très pauvres ; qu’ils sont vêtus d’or et de pourpre lorsqu’ils sont tous nus, ou s’imaginent être des cruches, ou avoir un corps de verre. Mais quoi ? Ce sont des fous […] » → ici, la présence prend toute la place, car l’absence de l’absent est oubliée → Locke, Essai sur l’entendement humain, De la différence des imbéciles et des fous « Enfin, il me semble que le défaut des imbéciles vient du manque de vivacité, d’activité et de mouvement dans les facultés intellectuelles […]. Les fous, au contraire, semblent être dans l’extrémité opposée. Car il ne me paraît pas que ces derniers aient perdu la faculté de raisonner ; mais ayant joint mal à propos certaines idées, ils les prennent pour des vérités, et se trompent de la même manière que ceux qui raisonnent juste sur de faux principes. » → la folie, c’est une hypertrophie de l’imaginaire, et non pas une défaillance de la raison → ça préfigure la thèse de G.K. Chesterton (Orthodoxy) « Le fou n’est pas un homme qui a perdu la raison. Le fou est un homme qui a tout perdu, sauf la raison » → entendu comme ça, le problème du fou n’est pas l’incohérence → au contraire, le fou raisonne bien, il fait preuve d’une rectitude logique → il fait des bons raisonnements, dans le sens que ses inférences sont justes → l’inférence est le passage de certaines prémisses à une conséquence (aussi dit syllogisme) → qui dit cohérence ne dit pas vérité, car on peut prendre de faux prémisses, et en arriver à une conclusion « juste » et cohérente, mais en réalité fausse → rationalité n’est pas égal à vérité → le fou, c’est celui qui part de prémisses catastrophiques, mais qui sait faire des inférences → à cause de l’imagination, on part de mauvais prémisses, mais on arrive à des conclusions rationnellement justes → l’imagination semble être une bien étrange faculté → à la lettre, il faut être fou pour la prendre au sérieux → seuls les fous la prennent au sérieux → réciproquement, faire un bon usage de l’imagination, c’est ne pas y accorder d’importance → paradoxe
...