Molière, Dom Juan

CHEVALIER                                      Français                                                 06/03/18

Paula                                          Sujet d'invention                                                  1°S5

Une femme, un piano.

Un homme, un journal.

Un couple, un appartement.

        Assise sur un tabouret, il y a cette femme blanche, sobre, élégante, raffinée, vêtue d'une simple robe orange. Le temps est agréable, c'est un soir d'été, sa robe n'a pas de manche, il fait sombre et la lumière est allumée. Ses cheveux brillants et bruns comme le chocolat sont remontés en un chignon bas, bien coiffé. Cette femme mince à l'allure si féminine ne porte aucun bijou, et très peu de maquillage, cependant, cela ne lui retire en aucun cas la grâce et la légèreté dont elle fait preuve.

        Elle est exténuée, tête baissée, elle tapote avec lassitude le piano devant lequel elle se tient. Elle ne regarde pas réellement la partition qui se dresse devant elle, elle n'y prête pas attention. Elle ne cherche pas à reproduire quelque chose de mélodieux, c'est juste une suite de sons. Elle ne s'attarde même pas sur l'écho que renvoient les notes lorsqu'elles parviennent à ses oreilles. La femme est plongée dans ses pensées, elle songe à son couple. Fixant les touches devant elle sans vraiment les voir, elle pense, elle regarde ce tapis de couleurs monotones, son bras gauche nonchalamment posé sur le bord froid de son instrument. Son regard divague, ses pensées se dispersent, mais elles reviennent toujours au même point. Comment son compagnon et elle ont pu arriver à un si haut point de négligence l'un envers l'autre.

        Cette femme se sent seule. Elle commence à avoir du mal à supporter la confrontation silencieuse qui se déroule entre elle et son époux. Elle se demande s'il s'en rend compte, elle, est consciente que quelque chose s'est brisé entre eux, mais lui se pose-t-il seulement la question ? L'ennui se prolonge et lui semble interminable. Elle aimerait crier, dire à l'homme qui accompagne ses soirées que cela ne peux plus continuer ainsi. Elle voudrait retrouver la fougue d'antan, celle qu'ils avaient lorsqu'ils se sont rencontrés. Elle souhaiterait d'autant plus, que celui avec lequel elle partage son lit, lui accorde plus d'importance, qu'il lui prête plus d'attention. Elle adorerait hurler sa peine. Plus rien ne rythme sa vie, elle voudrait le faire réagir pour qu'elle puisse enfin sortir de sa prostration. Elle a besoin qu'il comprenne afin de pouvoir se réveiller. Mais elle reste calme, pianotant silencieusement d'un doigt, elle ne bouge pas. Cette dame n'arrive pas à exprimer son désarroi, elle est d'une douceur inébranlable, et malgré le fait qu'au fond d'elle même, l'ennui a une place prédominante et qu'elle aimerait en sortir, sa timidité et son calme font partie d'elle et la définissent.

        Toujours figée devant sa machine musicale, la femme médite, elle voudrait avoir le cran de s'exprimer et s'imposer, pourtant c'est au-delà de ses forces, donc elle reste là, pensante, enfermée dans sa sphère. Petit à petit, la perception des choses qui l'entourent lui revient, les notes qu'elle jouent lui parviennent, pour autant, cette prise de conscience du monde extérieur  ne la sort pas totalement de ses pensées qui sont toujours rivées vers son mari. Bien qu'elle soit a demi tournée vers lui, son visage reste accroché à la planche zébrée qui se trouve face à elle. La femme n'a pas besoin de se retourner pour le voir tel une ombre, dans son costume trois pièces, assis sur son fauteuil orange, devant son journal, après sa dure journée de travail. Elle ne le voit pas beaucoup, il part tôt et rentre tard, et malgré cela, lorsqu'ils peuvent passer un peu de temps ensemble, cet homme élégant à la chevelure dorée reste ancré devant son journal comme il le fait à présent.

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