Les fleurs du mal
Dissertation : Les fleurs du mal. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar 7 knights • 22 Décembre 2021 • Dissertation • 2 118 Mots (9 Pages) • 638 Vues
Dissertation sur œuvre
Œuvre : Les Fleurs du Mal,1861,Charles Baudelaire
Sujet :En quoi le titre les fleurs du mal semble-t-il révélateur du programme du recueil ?
L’alchimie est un procédé qui est apparu au Moyen-Age et qui permet de convertir les métaux les plus insignifiants en or. En 1861 ,Charles Baudelaire va utiliser cette alchimie à travers la poésie. Il va condenser ce pouvoir dans son célèbre recueil : les fleurs du mal. Celui-ci va causer un scandale et provoquer un procès pour « outrage à la morale publique ». Entre métamorphose du monde, transformation de la parole et transcendance de la réalité nous pourrons nous demander en quoi le recueil obéit-il a une inspiration paradoxale. Pour cela, nous verrons dans un premier temps sous quelle forme la beauté est présentée, ensuite nous parlerons de la présence du mal dans le recueil, enfin nous étudierons la paradoxalité du poète.
En premier lieu, nous pouvons considérer que la beauté poétique est toujours présentée sous une forme douce et agréable or selon Baudelaire, celle-ci est plutôt froide et sombre. C’est donc une conception assez sombre de la beauté qui nous apparaît. Celle-ci est comparée à un « rêve de pierre » dans le poème La beauté. La référence au minéral fait penser à une statue de pierre, c’est-à-dire à une œuvre d’art certes très belle, mais surtout très rigide. On se « meurtrit » contre son sein : la Beauté ne se caractérise donc pas par sa tendresse puisqu’on se brûle les ailes à vouloir s’en approcher, et a son contact on se retrouve blesser plutôt que réjouit. On comprend également le rapprochement des adjectifs « éternel et muet » qui mettent directement en relief cette statue parfaite mais intouchable. La Beauté inspire au poète un amour absolu. C’est un amour éternel, divin, parfait mais c’est aussi un amour silencieux. Baudelaire refuse le sentimentalisme qui selon lui n’est pas apte à son cœur , il recherche au contraire la violence tragique. Dans le poème l’Idéal il dit : « Ce ne seront jamais ces beautés de vignettes,[…] Qui sauront satisfaire un cœur comme le mien »ici on voit bien qu’il ne laisse pas place aux sentiments et à la figure classique de la beauté. Lui ce qu’il recherche c’est bel et bien un « idéal rouge » qui fait référence au sang et donc à la violence. Il illustre donc cette beauté à travers des figures de la violence : « Ce qu’il faut à ce cœur profond comme un abîme, / c’est vous, Lady Macbeth, âme puissante au crime / Rêve d’Eschyle éclos au climat des autans ». La fascination du répulsif vient certainement de l’association du bien et du mal qui se complètent comme dans L’hymne à la beauté: «Ô Beauté ? ton regard infernal et divin ». Certains de ses poèmes vont même jusqu’à glorifier le sinistre notamment dans le poème Une charogne « Et le ciel regardait cette carcasse superbe […] Comme une fleur s’épanouir. »
D’autre part, Baudelaire considère que cette Beauté va de pair avec la boue comme il le dit dans une ébauche d’un épilogue pour la 2e édition : « Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or. » Dans Allégorie, une prostituée « femme belle et de riche encolure […] Qui laisse dans son vin traîner sa chevelure », par sa beauté et sa fierté est amenée vers une Mort certaine : elle représente la beauté dans le monde du vice. Ici le poète met en avant le cote sombre de la beauté. Dans Un Voyage à Cythère l’auteur dénonce l’illusion d’une beauté lyrique et heureuse et révèle l’omniprésence du macabre et de la douleur puisque l’auteur perçoit une silhouette qui s’avère être en réalité une potence servant aux pendaisons des condamnés à mort avec des « intestins pesant lui coulant sur les cuisses » . Baudelaire cache donc le mal derrière la beauté. Enfin, dans L’Amour et le crâne le poète utilise également la boue et l’or sur un même pied d’égalité puisqu’on on voit l’Amour régner sur les hommes et leur faire croire à « un songe d’or » alors qu’il ne s’agit que d’un jeu « féroce et ridicule » mais dont les deux parties, l’Amour et les hommes, sont indissociables. Baudelaire permet aussi de voir la beauté sans pour autant qu’elle existe en se réfugiant notamment dans l’alcool avec le vin des chiffonniers qui fait l’éloge du vin et qui permet aux chiffonniers de se libérer de la misère. La comparaison entre les chiffonniers et le poète rappelle que tous deux cherchent l’or dans la boue « hochant la tête, / Buttant, et se cognant aux murs comme un poète » Ces transmutations qu’opère Baudelaire entre les deux matériaux que sont l’or et la boue, serait en réalité le rôle même de la poésie qui serait de transformer matière informe en une forme porteuse de sens.
Cette omniprésence de la Beauté, de l’idéal, de la femme prend paradoxalement sa source au plus profond du mal. Nous nous retrouvons directement confronté à ce mal, une fois le livre en main. En effet, il apparaît chez Baudelaire une attirance pour le mal rien que par son titre oxymorique, Les Fleurs du Mal. Le titre d’une des six sections du recueil, est donc également le titre de l’ensemble du recueil et caractérise donc tous les poèmes, aussi bien ceux du Spleen que ceux de l’Idéal. On peut s’attarder plus en détail sur la signification de ce titre qui n’a pas été choisi au hasard. Fleur et mal sont aux antipodes aussi bien culturellement que poétiquement. L’alliance surprenante des « Fleurs et du « Mal révèle une écriture paradoxale et antithétique. La « fleur » est un motif poétique traditionnel qui symbolise le plus souvent la beauté, connote l’innocence et la pureté et est souvent associé à la femme jeune et désirée comme dans le célèbre poème :Mignonne, allons voir si la rose de Pierre de Ronsard. Le mal , lui est associé au hideux et au sombre. Baudelaire nous fait donc la promesse de nous montrer qu’il existe une beauté propre au mal. On retrouve également la préposition ‘du’ qui oriente la signification car elle nous indique l’origine de ces fleurs et de cette beauté : extraite du mal. La formule « Fleurs du Mal »met par ailleurs en lumière une écriture polysémique et ambiguë. La relation entre les fleurs et le mal peut aussi être une relation de possession : les fleurs appartiennent au mal dont le poète deviendrait le porte-parole.
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