Lecture Analytique: La Bruyère, Jugements
Commentaire de texte : Lecture Analytique: La Bruyère, Jugements. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar hadsterx • 26 Septembre 2018 • Commentaire de texte • 1 958 Mots (8 Pages) • 3 143 Vues
La Bruyère (1645 – 1696) : Connu pour son ouvrage Les Caractères publié en 1688 (seul ouvrage
qu’il ait publié auquel il a consacré près de 25 ans de sa vie) constitué essentiellement de
portraits fictifs mais inspirés par les nobles et les gens de la cour du Prince de Condé. Ouvrage
où il dresse un portrait ironique des défauts humains que le personnage exemplifie. Dans Les
Caractères, beaucoup de portraits mais également des textes plus généraux consacrés à des
réflexions sur les mœurs du temps. Il est considéré comme un moraliste et a pour objectif, dans
la tradition classique du XVIIème de plaire et instruire. Très grand succès de cet ouvrage dont il
a été publié de son vivant 8 éditions.
Texte « Des Jugements » propose une représentation originale d’un défaut humain : l’orgueil
mais a surtout pour objectif dans cet extrait de présenter au lecteur une des conséquences
absurdes de cet orgueil : la volonté de domination des hommes sur leurs semblables et
conséquence la violence qui se déchaîne à l’occasion des guerres.
Nous verrons dans un premier temps comment La Bruyère représente de manière très ironique
l’orgueil des hommes et la façon dont il se manifeste. Dans un second temps, nous examinerons
la manière dont la guerre est représentée comme une lutte fratricide et traduit de manière
absurde et condamnable le désir de puissance et la violence dont est capable l’homme vis-à-vis
de son prochain.
I. Orgueil et pouvoir
1. L’homme : un animal raisonnable ?
a. L’aspect polémique de l’extrait se manifeste dès le début par l’apostrophe « Petits
hommes » à laquelle s’ajoute l’apostrophe suivante « espèces d’animaux glorieux et superbes ».
Nous pouvons remarquer ici le contraste entre ces deux adresses : l’une se moque de la
supposée grandeur physique de l’homme avec l’adjectif « petit », l’autre critique des défauts de
caractère avec les adjectifs« glorieux et superbes ». Les deux adresses se complètent (physique
et morale) pour dresser un portrait particulièrement ironique et négatif de l’homme.
b. La première phrase, très longue, est constituée d’une série de subordonnées
relatives : « qui vous enfermez aux foires comme géants », « qui vous donnez sans pudeur de la
hautesse et de l’éminence » , « qui méprisez toutes les autres espèces », « qui ne faites pas
même comparaison avec l’éléphant et la baleine ». La longueur de la phrase avec l’accumulation
d’expansion du nom est à l’image du reproche fait à l’individu : son orgueil, son sentiment de
puissance. Cette expansion s’oppose à l’apostrophe première « petits hommes » qui renvoie,
elle, à la réalité de l’importance de l’homme tant physique que morale : il demeure « petit »
dans la nature lorsqu’on le compare à « ces montagnes voisines du ciel et qui voient les nuages
se former au-dessous d’elles » ou encore en comparaison à « l’éléphant ou la baleine. »
Les deux comparaisons permettent de relativiser l’importance de l’homme dans la
nature contrairement à ce que son orgueil humain peut lui laisser croire.
c. La comparaison avec les animaux constitue un des fils directeurs de l’extrait.
Apparaissent successivement l’éléphant, la baleine, les loups, les lions, le singe, le faucon, le
lévrier, le chien, les chats. Or à deux reprises ,le terme d’« animal raisonnable » apparaît dans le
texte mais de manière distancié ou ironique : l.8 : « J’entends corner (= crier) à mes oreilles :
l’homme est un animal raisonnable » et l.28 : « Vous avez déjà, en animaux raisonnables,
imaginé [...] les lances, les piques... » . La référence aux animaux est donc essentielle puisqu’elle
permet de prendre l’homme à ses propres mots : lui qui se définit comme un « animal
raisonnable » montre en réalité par son orgueil qu’il n’est qu’un animal parmi d’autres, voire un
animal moins raisonnable que les autres animaux. A la ligne 8, La Bruyère se distancie de cette
définition par la phrase ironique qui introduit l’expression : « J’entends corner à mes oreilles ».
Dans la deuxième occurrence du terme, La Bruyère se montre sarcastique : « la raison » dont est
gratifié l’homme consiste à trouver des moyens d’éliminer son prochain par la fabrication
d’armes efficaces.
2. la mise en cause directe du lecteur imaginaire :
a. la série d’impératifs constitue autant d’adresses au lecteur, mis en demeure de
s’expliquer. La première : « approchez » (l.6) met en scène de manière imaginaire une
confrontation directe et physique entre lecteur et auteur. Le lecteur est soumis à l’injonction de
s’expliquer sur son orgueil sans fondement : « répondez »(l.6) puis bénéficie d’un conseil
ironique « laissez-les un peu se définir eux-mêmes» (l.11).
b. les apostrophes et les questions
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