Le mythe de Phèdre, corpus de réécritures
Commentaire d'oeuvre : Le mythe de Phèdre, corpus de réécritures. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar sabrineee • 23 Mai 2017 • Commentaire d'oeuvre • 2 543 Mots (11 Pages) • 1 488 Vues
Ben Mansour Sabrine
1°4
Dossier sur les réécritures
Le mythe de Phèdre
Le mythe (provenant du grec « mythos ») signifie « récit » et est une histoire, un récit qui se transmet oralement. Les mythes désignent des récits fondés sur des croyances extraordinaires et doivent aider à comprendre un trait essentiel propre aux conduites humaines. La mythologie de la Grèce antique est la principale source de mythe en Occident. Ces mythes-là ont pris vie à travers la littérature, notamment grâce aux poètes Homère et Hésiode. Ici, nous nous intéresserons au mythe de Phèdre. Le mythe tragique de Phèdre, fille de Minos et de Pasiphaé, raconte qu’après son mariage avec Thésée, elle ressent un amour passionné pour son beau-fils, Hippolyte et que l’origine de cet amour serait une malédiction jetée par Aphrodite (déesse de l’amour) à Hélios (grand-père maternelle de Phèdre) et à sa descendance. Nous étudierons dans ce corpus un passage (479-546) du livre XV des Métamorphoses du poète Ovide ; le poème « La neige a fui, les près retrouvent leur gazons » dans le recueil des Odes d’Horace ; les tragédies "Phèdre" de Sénèque et de Racine ; les tableaux "Phèdre et Hippolyte" de Pierre-Narcisse Guérin et "Phèdre" d’Alexandre Cabanel.
Ainsi, nous pouvons nous demander comment le mythe de Phèdre a été réécrit, retranscrit, à travers différents genres.
Nous verrons tout d’abord que le mythe de Phèdre prend vie grâce aux poètes. Ensuite, nous nous demanderons comment les dramaturges ont réécrit ce mythe en tragédie. Enfin, nous pourrons voir que Phèdre ne prend pas vie qu’à travers l’écrit, mais qu’elle a aussi inspiré les peintres.
Pour commencer, le mythe de Phèdre a été retranscrit à travers des poèmes. Tout d’abord nous allons voir les points communs entre les poèmes d’Horace et d’Ovide. Dans les deux poèmes, il y a un lien entre la mythologie grecque et romaine : l’évocation de « Diane » (Artémis) jointe à « Hippolyte » chez Horace ; « Hippolyte » devenant « Virbius » chez Ovide. De plus, dans le poème d’Ovide, les noms des dieux font référence à la mythologie romaine (« Pluton », « Apollon », « Diane »). Ce mélange entre les mythologies lie la vie antérieure et la résurrection d’Hippolyte, ce qui montre que les poètes ont décidé de raconter l’intégralité du mythe d’Hippolyte.
Cela nous amène au deuxième point commun : Horace et Ovide se sont ici centrés sur Hippolyte et non sur Phèdre. D’ailleurs, son nom n’apparaît dans aucunes des deux œuvres : elle est définie par « la fille de Pasiphaé » et qualifiée péjorativement de « marâtre impie » chez Ovide ; chez Horace, « Minos » et « Thésée » sont évoqués mais il n’y a aucune mention explicite d’elle. Cependant, le lecteur comprend que c’est Phèdre qui a causé le malheur d’Hippolyte, cela souligne la célèbre renommée des mythes à l’Antiquité.
Le dernier point commun entre ces deux poèmes est le registre élégiaque. En effet, ces deux poèmes exposent des caractéristiques dudit registre tels que la fuite du temps (par exemple « Eté chasse Printemps / Qui lui-même périra » chez Horace qui indique la brièveté de la vie ; l’évocation de la nature rappelle le registre lyrique dont le registre élégiaque est un dérivé), les peines amoureuses (qui ici, font probablement référence à la douleur de Phèdre) et la mélancolie (les champs lexicaux de la tristesse et de la mort rendent compte de la mélancolie : « mort » ; « ténèbres infernales » ; « sentence » ; « ombre et poussière » ; « terrible » ; « craindre » ; « déchirés » ; « mon âme fatiguée » ; « malheurs »).
Maintenant, nous allons nous intéresser aux spécificités du poème d’Horace. Ce poème est une ode. Une ode est un poème divisé en strophes semblables entre elles (Ici, le poème est divisé en sept quatrains et le premier et le troisième vers de chaque quatrain est plus long que les deuxièmes et quatrièmes vers[1]) destiné à célébrer de grands évènements ou de hauts personnages, on parle alors d’ode héroïque. Dans ce poème, Horace recommande au lecteur de profiter du présent mais annonce tout de même un aspect sombre du temps v.7-8 « Ne compte pas sur l’au-delà : vois comme l’Heure / Emporte le Jour radieux. ». Nous pouvons relier le point de vue d’Horace à sa propre citation « Carpe Diem », locution latine, signifiant qu’il faut profiter de l’instant présent sans penser à l’avenir. Bien que cette locution délivre un message positif, Horace décide d’en montrer un côté obscur en évoquant des mythes ayant des fins tragiques : par exemple, il revisite le mythe d’Hippolyte de façon à ce que Diane ne le ressuscite pas même s’il le qualifie d’ « innocent ».
Enfin, nous allons étudier les spécificités du poème d’Ovide. Ce long poème issu des Métamorphoses concerne le passage où, Hippolyte devenu Virbius raconte ses péripéties à la nymphe Egérie. Dans cette œuvre, Ovide s’est centré sur le mythe d’Hippolyte et en raconte l’intégralité. D’ailleurs, Hippolyte est en grande partie le narrateur du poème et le lecteur ne sait pas d’emblée que ce passage porte sur lui : « le fils de Thésée » dans le paratexte et « je suis cet Hippolyte » l’indiquent au lecteur. De plus, ce poème est lyrique, voire pathétique car Hippolyte utilise la première personne (par exemple « mon innocence »), exprime ses sentiments, sa souffrance à travers le récit de sa vie (nous pouvons l’illustrer avec « Pitthée prit soin de mon enfance» ; « mon âme fatiguée ») et énonce des questions rhétoriques (lorsqu’il dit « Maintenant, ô Nymphe, pouvez-vous comparer votre malheur au mien ? »).
Bien que ces poèmes aient quelque peu énoncé le mythe de Phèdre, ce genre n’est pas celui où notre protagoniste est la plus mise en valeur, c’est pourquoi nous allons désormais étudier les œuvres de dramaturges où notre héroïne sera davantage mise en avant.
Nous allons maintenant étudier les tragédies éponymes de Sénèque et de Racine toutes deux nommées "Phèdre". Nous allons d’abord en dégager les ressemblances. Pour commencer, ces deux œuvres sont centrées sur le mythe de Phèdre et non sur celui d’Hippolyte comme dans la tragédie "Hippolyte porte-couronne" d’Euripide. Si Phèdre est davantage mise en avant dans les tragédies auxquelles nous nous intéressons, c’est d’une part grâce au fait que c’est Phèdre elle-même qui déclare sans le vouloir son amour à Hippolyte qui montre bien le côté d’une femme passionnée qui perd le contrôle de soi. D’autre part, c’est aussi et surtout grâce à la fin tragique que les dramaturges lui ont accordé. En effet Racine, s’étant inspiré de Sénèque pour écrire cette œuvre, a décidé de terminer la pièce par Phèdre qui confesse son crime, atteste l’innocence d’Hippolyte puis finit par se donner la mort : ces actes rendent compte du fait que Phèdre a été rongée par sa souffrance amoureuse et que comme tout personnage tragique, elle est destinée à la mort.
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