La Condition Humaine - André Malraux

Lecture cursive : La Condition Humaine

Présentation

J'ai choisi le roman d'André Malraux La Condition humaine, publié en 1933. Suivant Les Conquérants, en 1928, et La Voie royale, en 1930, déjà sur l'Asie, cette œuvre, soutenue par Gaston Gallimard, a eu d'emblée un grand retentissement et a reçu le prix Goncourt l'année de sa publication. Elle a été d'emblée associée à l'image d'aventurier de l'auteur. Toutefois, André Malraux a eu des activités en Indochine mais peu de contacts avec la Chine. De même, l'arrière-plan idéologique du marxisme n'est que secondaire par rapport à la réflexion métaphysique indiquée par le titre. André Malraux s'est ensuite engagé dans la guerre d'Espagne, la Résistance, et il a été le premier ministre de la culture en France auprès du général de Gaulle entre 1959 et 1969 avant sa mort en 1976.

Enjeux

Pour moi, plusieurs enjeux se superposent dans ce roman.

D'abord, l'histoire du temps présent et l'engagement de l'écrivain. Dans le combat politique, les héros rejoignent les masses d'ouvriers et de paysans chinois exploités par les patrons, les propriétaires terriens et les usuriers, pour lesquels le communisme est un message collectif de dignité et de salut. C'est le contexte du Shangaï des traités inégaux, mais ils rejoignent un combat mondial dans la ligne, notamment, de la révolution russe et de l'affrontement entre partisans de Staline et de Trotski.

Ensuite, l'absurdité du destin des héros, marqués par la souffrance et la mort. L'œuvre est ainsi le reflet du problème des horreurs du XXe siècle, à commencer par la première guerre mondiale. En réponse, ces personnages incarnent des manières possibles de vivre leur humanité, dans la tragédie puisqu'ils refusent de renoncer à eux-mêmes sous des déguisements : exprimer ses démons, les "pieuvres" à travers la destruction terroriste comme Tchen, poursuivre un idéal politique comme Kyo, exprimer la fraternité dans la lutte comme Katow. D'autres personnages vivent d'échappatoires, soit dans l'obsession narcissique comme l'ambitieux Ferral avec ses affaires d'argent et sa liaison avec Valérie, soit dans la dissolution de leur personnalité comme l'attitude baroque et lucide du perdant Clappique. Enfin, Gisors, père de Kyo, et May, sa compagne, témoignent du lien persistant de l'amour.

Enfin, l'œuvre répond fondamentalement à un enjeu esthétique. Elle montre au lecteur, de manière saisissante, un monde de violence et de désordre entre les nations, les classes sociales, les partis politiques, les acteurs économiques, les hommes et les femmes, les personnages sont "existentialistes sans autre consistance que l'action immédiate. La rédaction, en phrases et paragraphes courts alternés de réparties brèves, dans des langues variées, la narration, fondée sur des scènes successives, accentue l'effet sur le lecteur. Dans ces conditions, la réflexion mène au désespoir, à l'opium. Seul l'artiste, qui s'abstrait, à travers l'amour dans le cas du peintre japonais Kama, de la condition humaine, peut parvenir à refléter la permanence et l'unité du monde, remettant en cause l'idée d'un "roman-reportage". C'est la clé de l'ambition métaphysique de La Condition humaine.

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