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L'invitation au voyage

Commentaire de texte : L'invitation au voyage. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  12 Octobre 2016  •  Commentaire de texte  •  2 081 Mots (9 Pages)  •  3 130 Vues

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Baudelaire, « Spleen et Idéal », Les Fleurs du Mal, 1857

« L'Invitation au voyage »

Problématique : Comment ce poème nous révèle-t-il l’idéal baudelairien ?

Introduction

[Jeanne Duval, Mme Sabatier et Marie Daubrun ont été les inspiratrices de Charles Baudelaire, auteur des Fleurs du Mal, précurseur du symbolisme.] [Le poème « L’invitation au voyage », extrait de « Spleen et Idéal », première partie des Fleurs du mal, est inspiré par Marie Daubrun, jeune comédienne aux yeux verts rencontrée en 1847. Il ne décrit pas un voyage réel mais celui que lui inspire le regard de cette femme, un voyage imaginaire dans un « pays qui (lui) ressemble ». On peut en relever la composition originale : trois strophes séparées par un refrain; d’autre part, le jeu des sonorités produit un ensemble harmonieux : le poème présente une forte musicalité.] [Cette « invitation au voyage » ne nous donne-t-elle pas les clés de l’idéal baudelairien ?] [C’est ce que nous analyserons en étudiant le lieu, miroir de la femme aimée, puis la vision idéale de cet endroit imaginaire et enfin les composantes du bonheur telles que nous les suggère ici Baudelaire.]

I. Un lieu miroir de la femme aimée

1. La correspondance femme paysage

— L’invitation se fonde sur une correspondance étroite entre la femme et le paysage : « au pays qui te ressemble (v.6).

— Cette correspondance est explicitée dans la deuxième partie de la première strophe : on retrouve des éléments identiques pour qualifier le pays et la femme : le feu et l’eau.

« Les soleils mouillés » (v.7) rappellent les « yeux / Brillant à travers leurs larmes » (v.11-12)

(feu) (eau) (éclat, feu) (eau)

— La fascination exercée par le regard de la femme aimée et par le pays imaginé est soulignée par le mot « charmes » (v.9), qu’il faut prendre au sens de fort « envoûtement », « enchantement », de même que l’adjectif « mystérieux » (v.10) est mis en évidence par la diérèse « mystéri/eux » et l’adverbe d’intensité « si » qui le précède.

— L’esthétique et le sentiment sont associés : « les ciels » (v.8), terme de peinture, renvoient au regard de la femme aimée.

— Impression générale de mystère, d’imaginaire que le regard de la femme provoque ; rôle unificateur de cette femme : la rêverie part de son regard et revient à elle dans les derniers vers « pour assouvir / Ton moindre désir » (v.32-33).

2. Une relation fusionnelle

— L’évocation du pays idéal suscité par Marie Daubrun nous entraîne vers un ailleurs : « là-bas » (v.3) où l’amour est roi : l’on peut y « vivre ensemble » (v.3), « Aimer à loisir, / Aimer et mourir » (v.4-5).

— La femme, inspiratrice et accompagnatrice, est présentée de manière idéalisée :

• femme enfant à protéger : « Mon enfant » (v.1)

• âme-sœur figurée comme le double et l’égale du poète : « ma sœur » (v.1)

• source de « douceur » (v.2), elle permet une relation fusionnelle (« vivre ensemble »)

• même l’allusion à ses « traitres yeux » (v.11) indique moins une duplicité, une perversité qu’un charme puissant et invincible.

3. Un lieu idéal parce qu’imaginaire

— C’est un pays créé par l’imagination :

• l’impératif « songe » (v.2) au début du poème nous place aussitôt dans le domaine du rêve.

• les conditionnels : « décoreraient » (v.17), « parlerait » (v.24) énoncent des actions possibles mais non réalisées.

• cependant, l’indicatif est utilisé dans dernière strophe : le rêve est si fort qu’il en devient réel.

— La structure du poème facilite la rêverie : les strophes longues la déploient par tableaux successifs ; c’est une vision de plus en plus large, du regard (première strophe) à la chambre (deuxième strophe) puis au paysage tout entier (troisième strophe) ; les heptasyllabes et les pentasyllabes, vers impairs, par leur souplesse rendent mieux le mouvement de la rêverie et favorisent donc l’invitation au voyage.

— L’harmonie est soulignée par les aspects mélodieux du retour fréquent des mêmes sonorités dans tout le poème :

• assonances en « a », « en », « on », « é », « eu » et « ou ».

• allitérations en « r » et « l ».

— La rêverie s’ancre dans la réalité, celle d’un pays du nord, la Hollande (« ciels brouillés » « calme », « ordre » « canaux ») comme nous l’indique le poème en prose intitulé également « L’Invitation au voyage ».

II. Le paradis baudelairien

1. Un paradis originel

— Par une allusion à « la langue natale » de l’âme, Baudelaire fait référence au paradis originel, à l’Éden biblique.

— Une évasion hors du temps où l’amour est préservé de toute dégradation comme l’indiquent :

• le distique :

« Aimer à loisir (en toute liberté, sans contrainte temporelle)

Aimer et mourir » (anéantissement définitif)

• la succession de verbes à l’infinitif « vivre » (v.3), « aimer » (v.4), « aimer, mourir » (v.5) empêchant toute actualisation précise.

— Impression d’éternité mise en relief aussi par le rythme du poème donnant l’impression d’un bercement, et l’harmonie des sonorités.

2. Un ailleurs à coloration exotique

— Le paradis baudelairien prend la forme d’une évasion dans l’espace vers un ailleurs

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