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L'ile des esclaves de Marivaux

Commentaire d'oeuvre : L'ile des esclaves de Marivaux. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  12 Mars 2022  •  Commentaire d'oeuvre  •  1 432 Mots (6 Pages)  •  508 Vues

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                           Français Explication linéaire l’île des esclaves 

[1] - L'Île des esclaves est une création de Marivaux, en 1725.Cette pièce représente un lieu utopique. Quatre personnages sont échoués sur l'île sur laquelle l'inversion des rôles entre maîtres et esclaves est la loi.
Arlequin vient d'arriver avec son maître Iphicrate dont il dressera le portrait à la scène 5. Cléanthis fait celui de sa maîtresse  Euphrosine  dans la scène 3 qui nous intéresse ici.
 Nous assistons dans cet extrait à l'expression sans retenue d'un portrait de maître, la maîtresse en l'occurrence, par une esclave totalement libre de s'exprimer.
[2] - [Lecture] (Surjouer le ton superficiel de Cléanthis jouant les paroles de sa maîtresse Euphrosine qui écoute les paroles de son ancienne esclave) 
[3) – [Problématique]
Comment Cléanthis exprime-t-elle devant un public de maîtres la satire d'une coquette superficielle ?
[4] - [Annonce du mouvement du texte]
Le passage se présente en deux temps :
. de la ligne 92 à 100 : Euphrosine peinte dans ses bons jours …
. de la ligne 101 à 116 : Euphrosine peinte dans ses mauvais jours …

[Développement]
[1] - [Rappel du titre de la 1ère étape dans le mouvement du texte] : Euphrosine peinte dans ses bons jours, de la ligne 92 à 100.
[2] - [le détail de cette étape]
- Trivelin attire l'attention d'Euphrosine, silencieuse mais qui n'en pense pas moins, pour écouter son portrait. On remarque qu'il n'a donné aucune consigne contraignante à Cléanthis qui a donc le champ libre pour s'exprimer comme elle le veut sur sa maîtresse.
- Immédiatement, Cléanthis entre dans un moment de
 théâtre dans le théâtre in média res, c'est-à-dire sans transition. Elle joue d'abord son propre rôle au lever de sa maîtresse. Les trois termes relevant du bien-être resplendissant centrent l'attention sur la préoccupation majeure de la maîtresse : donner d'elle sa meilleure image : "belle""du vif" et "du sémillant" (l. 94). La journée se présentant au mieux, sa maîtresse est alors assimilée à un soldat parti à la conquête de la séduction du regard des autres maîtrisé par elle, d'où les mots "armes" et "glorieuse", renforcés par l'adverbe "vite" porteur de l'envie de la conquête !  
- Le 
"on" pour nommer son esclave (l. 95) renvoie Cléanthis à un anonymat qui la déshumanise d'emblée par sa maîtresse.
- Puis les lieux où sa maîtresse exerce son pouvoir de contrôle du regard d'autrui sont nommés par Cléanthis . Il s'agit des 
"spectacles", des "promenades" (l.95) et des "assemblées", des lieux fréquentés par les oisifs aristocrates dont l'activité principale consiste à paraître au mieux afin de dominer le regard d'autrui partout où il peut être croisé ! La satire bat son plein !!
- La fin de la première réplique de Cléanthis dans cet extrait confirme ce qui vient d'être dit en concentrant l'attention de la maîtresse sur la pièce centrale visée par le regard d'autrui, 
le visage. Cléanthis montre le plaisir égocentrique de sa maîtresse sûre d'elle dans ce combat de l'apparence maîtrisée où "craindre" (l.99) de laisser apparaître une faiblesse sur l'apparence de soi serait le début d'une catastrophe, même si tout cela est perçu par Cléanthis et le public comme de la superficialité absolue !
- La brève réplique de Trivelin (l.100) confirme la réussite du portrait qui vient d'être fait d'une maîtresse totalement ravie de jouir de son apparence flatteuse ! De plus Trivelin encourage à sa manière Cléanthis à poursuivre une peinture aussi bien réussie dans la vraisemblance …
[3] - [Conclusion de cette étape] Cléanthis a su jouer ce qui correspond à l'état d'esprit de sa maîtresse centrée sur son apparence dès son réveil. Le personnage d'Euphrosine ne ressort que par cet aspect volontairement choisi par Cléanthis pour exprimer
 sa satire d'une maîtresse superficielle dont l'unique activité sociale est la représentation de son apparence dans une envie toujours renouvelée de dominer ceux qui la regarderont !
Mais qu'en est-il lorsqu' Euphrosine se réveille dans ses mauvais jours ? …  
[4] - [Rappel du titre de la 2ème étape dans le mouvement du texte] : Euphrosine peinte dans ses mauvais jours, de la ligne 101 à 116.
[5] - [Le détail de cette étape]
- Les propos de Cléanthis sont organisés puisqu'elle nous guide par son
 "au contraire" (l. 101) vers une satire de sa maîtresse perdant le contrôle de son image.
- Cléanthis se glisse alors dans le rôle de sa maîtresse par l’interjection apeurée
 "Ah !" suivie des deux exclamatives (l. 102 et 103). Les jugements dévalorisant l'aspect physique dans ces exclamatives confirment bien la peur profonde d'Euphrosine de ne pas pouvoir soutenir le regard d'autrui dans ces conditions.
- La satire se loge aussi dans l'emploi par Cléanthis du pronom indéfini 
"on" répété ligne 103 qui fait écho au même pronom qu'Euphrosine avait employé ligne 95 en déshumanisant sa servante. C'est maintenant Cléanthis, rancunière, qui renvoie sa maîtresse à peu de choses, comme elle le mérite à ses yeux ! 
- Cléanthis nous fait mesurer la détresse comique de sa maîtresse en surjouant par son insistance la profonde tristesse d'Euphrosine totalement déçue par son visage ! Les éléments courts qui se succèdent dans les lignes 104 et 105 imitent
 la quasi panique de celle qui ne voit que sa déchéance dans son miroir. Elle devra donc se cacher pour ne pas déchoir en se montrant !
- La décision catégorique de 
"Madame" jusqu'à la ligne 107 exprime la terreur éprouvée par celle  qui refuse presque de vivre  si son apparence ne lui convient pas, occupation superficielle d'un personnage qui n'existe au fond que dans le regard d'autrui ! Un personnage vide par conséquent ; la satire va jusque là !!
- Cléanthis va se charger à présent de créer
 une anecdote dans l'anecdote ; il s'agit d'une visite rendue à sa maîtresse dans ces journées qu'elle ne voudrait pas vivre. La "compagnie" (l. 108) arrive et Cléanthis nous fait plonger dans un monologue intérieur, celui d'Euphrosine consciente de jouer sa réputation dans son apparence, et donc sa survie sociale ! Les 2 questions que se pose Euphrosine l. 108-109 et 109 -110 finissent par nous faire sentir l'ironie de Cléanthis éclairant le petit jeu cruel des soi-disant "bonnes amies" prêtes à profiter de la faiblesse que montrerait Euphrosine en exposant une apparence défavorable pour elle ! 
- Puisqu'il s'agit d'un combat, futile mais permanent, le
 "remède" doit venir vite ! Il suffit de mentir et c'est ce que s'empresse de faire Euphrosine.
- Cléanthis montre pour cela un mini jeu de rôles qu'elle saura traduire par la suite. Elle imite les paroles des visiteurs à l'affût de la détresse de leur hôte par la question ligne 111,
 "Comment vous portez-vous, Madame ?" puis elle répond à la place de sa maîtresse cherchant hypocritement la compassion  de ceux qui la regardent.
- La boucle est bouclée quand Cléanthis montre sa clairvoyance  et sa lucidité en traduisant les pensées de sa maîtresse qui implore à sa manière  de ne pas être jugée dans son état : 
"ne me jugez pas aujourd'hui".
- Cléanthis clôture 
son petit théâtre satirique par un changement de ton radical qui montre par son "J'entendais tout cela, moi" la clarté de vue dans sa perception à l'égard de la conduite sociale de sa maîtresse. La force du "Je" de Cléanthis appuie son discours plein de lucidité.
[6] - [Conclusion de cette étape] Cléanthis a su montrer dans ce deuxième temps du portrait de sa maîtresse un degré qui aggrave la peinture d'un personnage qui déploie tous les moyens à sa disposition pour 
fuir l'authenticité de ce qu'elle est . Le mensonge sans scrupule contribue alors à exprimer la dimension vaine d'une telle existence !

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