L'Homme et l'Autre

Dissertation

Depuis le début du XV° siècle, l'Homme n'a cessé de voyager, de découvrir de nouvelles terres, de prendre possession de nouveaux continents jusque-là inexplorés. L'époque des Grandes Découvertes a marqué un tournant dans l'histoire de l'humanité en changeant notre vision des autres.

Selon Levi-Strauss le voyage est un moyen indispensable de rapporter des connaissances ou des informations, mais bien d'autres raisons poussent au voyage. « En dehors du voyage intérieur » que constitue le roman, les auteurs ont souvent choisi d'entraîner leurs personnages vers des lieux exotiques, car cela leur permet de retrouver une nature vierge de toute civilisation où les sentiments passent pour plus authentiques.

Dans le voyage, ce qui compte est d'amasser des connaissances et des informations. On peut ainsi rapporter des connaissances sur des lieux fondamentalement différents de notre quotidien pour les partager. C'est ce que traduit selon Diderot le récit de voyage de Bougainville. Dans le premier paragraphe du texte, il décrit de manière très imagée la rencontre avec un vieux chef tahitien. Cela nous permet à la fois d'apprécier une façon de vivre fort différente, mais aussi une façon de penser tout aussi singulière, pour l'explorateur comme pour le lecteur, lorsqu'il est question de « lumières inutiles » quand les mœurs les plus sages doivent aller à l'essentiel et éviter de créer des « besoins superflus ». On peut encore constater dans l'ouvrage bien plus récent de Jacques Lacarrière : « L'été grec », que celui-ci rapporte au-delà de l'hommage rendu bien des connaissances sur différentes façons d'être ou d'agir. Il va jusqu'à dire que le voyage peut non seulement « métamorphoser les habitudes du corps » mais aussi celles de l'esprit (sa façon d'être avec les autres et la confiance à l'égard d'autrui). Il fait l'éloge de la valeur humaine qu'apporte le voyage au « véritable voyageur », et ouvre en cela une porte sur une autre façon de vivre.

Mais en dehors de notre regard nouveau sur les autres, il est aussi possible de rapporter des informations sur la façon dont ces derniers nous perçoivent. « La découverte des Sélénites » de Cyrano de Bergerac en est un premier témoignage. Dans le supplément au voyage de Bougainville, le témoignage porte plus sur la comparaison et sur l'échange, mais le constat qui en résulte sonne de toute vraisemblance. Dans le texte de Victor Segalen, il est évident que si la curiosité nous pousse à l'exotisme, l'auteur veut nous apprendre à garder saine cette curiosité et pour de bonnes raisons. Il veut ici nous donner une leçon de comportement face au Monde et à la façon dont nous y sommes perçus.

Mais on voyage aussi pour d'autres raisons tout aussi légitimes. Tout d'abord, cela permet de réfléchir sur les autres, ce qui nous amène bien souvent à mesurer nos propres soucis et relativiser nos propres problèmes. C'est aussi bien souvent le plaisir de sentir ce qui est justement différent et qui le restera probablement toujours qui nous incite à aller vers « l'exotisme ». Comme l'exprime Segalen, la sensation d'exotisme n'ait autre que la notion

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